« Nous ne faisons que traverser l’Histoire », dit René Belloq, archéologue rival d’Indiana Jones dans le film Les Aventuriers de l’Arche perdue. Et, c’est en fouillant nos sols que l’on s’en rend le mieux compte.
Avant de mener des travaux d’aménagement dans l’espace public, l’État doit mener ce que l’on appelle des « fouilles préventives ». Le but ? Éviter de détruire d’anciens sites archéologiques encore inconnus. Ce sont des archéologues de l’INRAP (Institut National d’Archéologie Préventive) qui s’en occupent. Dans un article publié sur leur site ce 27 janvier 2025, ils expliquent qu’entre octobre et décembre 2024, dans le cadre de la restructuration d’un groupe scolaire à Dijon, ils ont donc découvert plusieurs vestiges datant de multiples époques. La plus surprenante d’entre elles étant des fosses circulaires avec des corps adultes enterrés en position assise.
Des inhumations de l’âge du Fer
Datant approximativement du second âge du Fer (- 450 au changement d’ère), ce sont 13 tombes qui ont été découvertes. Elles sont de forme circulaire, d’environ un mètre de diamètre et placées sur une bande de 25 mètres de longueur dans une direction qui va du nord au sud. Leur état de conservation est remarquable.
À l’intérieur, des adultes sont tous enterrés en position assise dans le fond de la fosse, le dos contre la paroi est et le regard tourné vers l’ouest. Les bras sont le long du corps, les mains à côté du bassin ou des fémurs et les jambes sont fléchies. Ils sont enterrés sans possession ni bijoux. Seul un brassard en roche noire a été retrouvé dans une des tombes et c’est sa datation (entre -300 et -200) qui a permis de rattacher les tombes à la période gauloise.
Pendant les années 1990, avant la construction d’un parking et d’une résidence à 100 mètres de distance du site actuel, des sépultures identiques datant de l’époque gauloise et de l’Antiquité avaient été mises au jour. Que les deux sites soient aussi proches géographiquement incite les archéologues à penser qu’il s’agissait d’un même espace d’occupation. Il comprenait un fossé défensif, une route et sur son bord, un endroit où enterrer des animaux. Il s’agirait donc probablement d’un lieu de culte de la fin de l’époque gauloise.
Un site rare et des interprétations encore en question
Ce n’est pas la première fois que des tombes avec des inhumations assises sont découvertes. Cependant, elles restent rares : une douzaine de sites seulement au total, dont neuf en France, plutôt dans le nord. Bien que ces sépultures soient éloignées géographiquement, il ressort plusieurs similitudes de leur analyse :
- elles sont en bordures d’habitations aristocratiques ou de lieux de culte, loin des nécropoles,
- ce sont systématiquement des hommes (quand le sexe a pu être déterminé) d’âge adulte,
- ils sont tous assis dans la même position (assise) et avec la même orientation (le regard vers l’ouest).
Les archéologues font le parallèle avec des statues de pierre ou de métal dans cette même position assise datant toutes de 450 avant J.-C.. à 235 après J.-C.. (donc entre la période nommée de la Tène finale et du Haut-Empire).
Le travail d’archéologue est un travail d’enquête et de déduction. Ici, tous les indices portent à croire que ces personnes avaient un statut particulier, et de ce fait bénéficiaient de pratiques d’inhumations particulières. Ce qui entraine la question suivante : quel était ce statut ? Est-ce qu’il s’agissait de nobles, de guerriers, de classes dominantes, de personnalités politiques ou religieuses ? Il faudra plus d’investigations pour répondre à ces questions…
De multiples découvertes
Ces inhumations rares ne sont pas la seule pépite délivrée par le site de Dijon. L’archéologie repose sur un principe de superposition. Pour simplifier : avec le temps, les couches s’accumulent et un site plus récent (dans la majorité des cas) se trouve au-dessus d’un site plus ancien. En fouillant, les archéologues ont donc non seulement trouvé ces inhumations exceptionnelles, mais également une nécropole d’enfants âgés de moins d’un an datant du Ier siècle après J.-C.. (correspondant à la période gallo-romaine). Par ailleurs, il y avait des fosses de plantation (des creux pour planter des plantes) superposées à cette nécropole datant aussi de la période gallo-romaine. Cela signifierait qu’au fil du temps, cet espace funéraire est devenu un espace agraire. Enfin, une couche plus contemporaine montre la présence d’une boucherie à proximité.
Les trouvailles dans le sol dijonnais sont le reflet de la grande richesse historique de nos sols. Peut-être plus terre à terre que l’image d’Indiana Jones, les archéologues de l’INRAP n’en font pas moins un travail essentiel de mémoire et de préservation du patrimoine.
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