John Vidale et son équipe ont fait une bien étonnante découverte : le noyau interne — le « cœur » — de la Terre changerait régulièrement de forme : un mécanisme qui serait quasi constant. Leur étude a été publiée le 10 février 2025 dans Nature.
On savait déjà que ce noyau pouvait vivre des évolutions régulières. Il y a quelques mois, Vidale et son équipe avaient sorti une étude qui suggérait que la vitesse de rotation de ce noyau avait ralenti ; ce qui venait en renfort d’autres travaux précédents en ce sens.
Un responsable : le noyau externe ?
Le noyau interne de notre planète est une « boule de fer solide, chaude et dense, de la taille de Pluton », résumait John Vidale dans un ancien papier de 2022. Il fait approximativement 1 220 km de rayon et, s’il est solide, il est lui-même situé au sein du noyau externe qui est liquide. C’est ensuite qu’on trouve le manteau (interne puis externe), et enfin la croûte (interne puis externe, de nouveau).
Impossible de se rendre dans le noyau interne, bien sûr, ni d’y envoyer des sondes : il faut en analyser les ondes, ou plus précisément les données sismiques. Elles permettent de modéliser la forme, la vitesse de rotation du noyau et même d’en sonder la composition chimique.
En l’occurrence, pour cette étude, les chercheurs ont étudié en détail 168 paires de tremblements de terre, ayant eu lieu au même endroit, entre 1991 et 2023. Au sein de chaque paire, les séismes sont quasi identiques, et ce sont les différences infimes au fil du temps qui procurent justement des informations précieuses. C’est ainsi que les auteurs ont pu identifier des changements ces dernières décennies dans la forme que prend ce noyau.
Ces changements auraient lieu à la frontière entre le noyau interne et le noyau externe, c’est-à-dire aux points de contact. Les 3 000 °C, au moins, du noyau externe seraient de nature à déformer le noyau interne. De fait, le cœur atteindrait donc son point de fusion à sa frontière, où il serait presque mou. Les changements, qui modifieraient la forme de « boule » initialement décrite, provoqueraient des dépressions et des aspérités.
« Pas sûrs à 100 % d’interpréter correctement ces changements »
Cette interprétation est toutefois à prendre avec des pincettes. Les résultats, obtenus de manière indirecte via les ondes sismiques, pourraient notamment provenir de variations dans le champ magnétique terrestre, par exemple. Pour un objet aussi difficile à étudier que le noyau interne terrestre, les données doivent être croisées et complétées solidement avant d’en arriver à une conclusion qui ferait consensus. Par exemple, début 2023, une étude affirmait que le noyau de la Terre avait changé de sens de rotation… ce qui avait très fortement débattu au sens de la communauté scientifique.
« Nous ne sommes pas sûrs à 100 % d’interpréter correctement ces changements » : John Vidale lui-même considère qu’il n’y a là rien de définitif et qu’il faut poursuivre les recherches, rassembler plus de données. « En science, nous essayons généralement d’examiner les choses jusqu’à ce que nous les comprenions », explique-t-il à la BBC. « Selon toute vraisemblance, cette découverte n’affecte pas notre vie quotidienne d’un iota, mais nous voulons vraiment comprendre ce qui se passe au milieu de la Terre. »
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