Voilà des conclusions pour le moins inattendues, qui vont fortement intéresser tous ceux qui pensent que les bracelets connectés et autres capteurs d’activité favorisent l’exercice physique et donc la perte de poids — à commencer par certaines assurances santé qui essayent de les imposer en se disant qu’elles auront moins de frais à rembourser liés à l’obésité. Une étude étonnante publiée dans le très sérieux Journal of the American Medical Association (JAMA) tend à montrer qu’au contraire, ces « wearables » seraient des obstacles à un régime efficace.
L’étude menée par sept chercheurs de l’Université de Pittsburgh a été dirigée par le professeur John M. Jakicic, qui travaille au Département de la santé et de l’activité physique et au Centre de recherche sur la gestion du poids. Elle a été conduite pendant deux ans, d’octobre 2010 à octobre 2012, auprès de 471 volontaires en surpoids de 18 à 35 ans, dont 77 % de femmes, qui voulaient perdre du poids.
Au départ, les chercheurs pensaient calculer le niveau de l’impact positif que les capteurs d’activité peuvent avoir sur le régime. Mais ils ont découvert à leur grande surprise que les volontaires qui portaient un capteur d’activité censé les aider à suivre eux-mêmes leurs efforts ont en réalité perdu moins de poids que les autres, qui suivaient un programme plus traditionnel.
Pour mener cette étude de grande ampleur, les scientifiques ont d’abord demandé à l’ensemble des 471 volontaires de suivre le même programme sans objet connecté pendant les six premiers mois. Ils devaient noter eux mêmes dans un journal la durée et l’intensité des efforts physiques qu’ils faisaient, et chaque semaine ils se rendaient à un bilan au cours duquel leur poids était suivi, et des conseils leur étaient donnés. Pendant cette période, tous les participants ont perdu du poids.
Lors des 18 mois suivant, le groupe a été divisé en deux. Le premier a conservé une journalisation manuelle de leur activité, en se rendant sur un site internet dédié. L’autre portait un capteur d’activité qui leur disait précisément quels étaient leurs efforts réalisés ou à faire. Les deux groupes recevaient chaque semaine des SMS d’encouragement, et étaient briefés lors de cours appels téléphoniques, une fois par mois.
À la fin des deux ans, il s’est avéré que ceux qui n’avaient pas de capteur d’activité ont perdu 6,5 kg. Les volontaires qui portaient sur eux un capteur n’ont perdu que 4 kg.
Mais pourquoi ?
Les chercheurs n’ont pas encore d’explication à cette conclusion surprenante, mais ils avancent des pistes qu’ils entendent désormais vérifier. Ils se demandent, par exemple, si les personnes en surpoids qui ont du mal à réaliser les efforts demandés ne se découragent pas rapidement lorsqu’elles voient sur leur capteur que les chiffres n’avancent pas aussi vite qu’ils le voudraient.
Au contraire, il serait aussi possible que les capteurs aient pour effet d’intensifier les efforts physiques à un point où la personne surcompense l’énergie dépensée en s’alimentant de trop. Lorsque l’on fait un régime, le sport peut paradoxalement être traître s’il est réalisé avec un enthousiasme tel que la personne qui mange trop a l’impression fausse ou réelle de tout éliminer, et continue à s’alimenter autant, ce qui ne permet pas à l’estomac de réduire. Or pour ces personnes, la priorité n’est pas tant de faire de l’exercice que de s’habituer à manger moins et de réduire la taille de l’estomac pour atteindre plus vite le sentiment de satiété.
Il est enfin possible, entre autres explications, que ceux qui ont délégué la surveillance de leur activité à un outil technologique se soient inconsciemment déresponsabilisés. Ils feraient moins attention que ceux qui devaient avoir conscience de ce qu’ils faisaient, pour le renseigner tous les jours dans un journal.
En somme, le fait de porter un traqueur d’activité et de suivre les objectifs n’est pas suffisant pour un régime efficace, et peut même jouer contre la personne motivée.
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