C’est une question provocante qui, peut-être, se posera au sein de l’état-major de SpaceX : au regard des résultats insatisfaisants de ce Starship v2, ne faudrait-il pas abandonner directement cette génération pour passer à celle d’après ? Surtout après la nouvelle catastrophe qui a eu lieu, cette fois au sol, dans le centre d’essai de SpaceX.
Dans la nuit du 18 au 19 juin 2025, l’entreprise américaine a connu un revers majeur avec le test du « Ship 36 », un modèle qui faisait l’objet de vérifications en vue du dixième vol de la fusée géante (le « Ship 36 » avait déjà été éprouvé deux jours avant avec un exercice n’impliquant qu’un moteur). Il a explosé pour une raison indéterminée et détruit partiellement la zone.
Une enquête sera nécessairement conduite pour déterminer les causes de ce raté — mais une analyse image par image suggère que le problème s’est déclenché au sommet de l’étage supérieur. On ignore à quel point le vol 10 du Starship va être ralenti. Cela dépendra des dégâts dans le centre d’essai. Les évaluations sont en cours.

Inévitablement, cette destruction du « Ship 36 » interroge la fiabilité de cette génération d’étage supérieur. À la fin 2024, SpaceX a décidé de franchir une étape dans le développement de son lanceur en passant à la v2 avec le vol 7. Quelques jours avant, l’entreprise américaine avait détaillé tous les grands changements de cette v2.
Un Starship v2 qui a beaucoup évolué, et qui a beaucoup explosé
Dans les grandes lignes, le Starship v2 dispose de réservoirs plus grands, mais également de volets redessinés à l’avant. Le véhicule dispose aussi de tuiles et de couches de protection thermique secondaire de dernière génération. Il y a eu par ailleurs des modifications concernant la propulsion, tandis que l’avionique a bénéficié d’une refonte complète.
En somme, sur le papier, c’est un Starship fortement renouvelé. Mais, force est de constater que depuis sa mise en service début 2025, il n’est jamais parvenu à atteindre tous les objectifs que SpaceX lui a fixés. Ceux-ci consistent, pour faire simple, à survivre jusqu’au moment de l’amerrissage à l’autre bout du monde, dans l’océan Indien.

Bien sûr, le propre des tests — dans le secteur aérospatial, en particulier — consiste à prendre certains risques, sans avoir la garantie que tout se passera bien tout le temps. Chez SpaceX, c’est presque une marque de fabrique : on lance des choses, on voit comment ça se passe, on corrige ce qui a cafouillé, et on recommence.
Mais le Ship v2 enchaîne les déboires :
- le vol 7, survenu en janvier ? Il a fini en pluie d’étoiles filantes ;
- le vol 8, organisé en mars ? Même désintégration dans le ciel ;
- le vol 9, lancé en mai ? Destruction lors de la rentrée atmosphérique ;
À chaque fois, SpaceX a utilisé un Ship v2. Et systématiquement, c’est le même scénario qui se joue : un raté entraîne une enquête de l’entreprise, notamment à la demande de l’administration fédérale de l’aviation aux États-Unis (FAA), qui régule les activités spatiales outre-Atlantique. Des correctifs sont mis en place et de nouveaux tests sont organisés pour le vol suivant.
Dans le cas des vols 7 et 8, la défaillance a eu lieu un peu avant le « SECO », un acronyme désignant l’extinction de la propulsion de la fusée (Second-stage Engine Cutoff). Cette séquence a pu être passée avec succès pour le vol 9. Cependant, l’intégrité de l’étage supérieur n’a semble-t-il pas tenu durant la rentrée atmosphérique.

Cette phase est complexe, en raison des contraintes énormes que subit la structure. Compte tenu de la vitesse de retour vers la Terre, cela occasionne un frottement de plus en plus intense avec l’air, qui se redensifie au fur et à mesure. Cette friction malmène l’étage et provoque aussi une élévation très forte de la température sur la zone de contact.
Si on parle véritablement de survie dans l’atmosphère pour signifier le défi que ce moment constitue, ce n’est pas le seul instant périlleux. Outre le « SECO », le moment Max Q est aussi un challenge (il désigne l’instant où la contrainte mécanique sur la fusée est maximale). Idem pour la séparation des deux étages (« hot-staging ») ou le retour sur Terre.
À quand un Starship v3 ?
Ces derniers mois, SpaceX a signalé au fil des mises à jour du Ship v2 que les soucis observés à chaque désintégration dans l’atmosphère avaient des causes relativement différentes. Cela étant, ces déboires successifs incitent plutôt à se demander s’il ne faudrait pas plutôt passer à un Ship v3, et en finir avec ce v2 qui semble n’avoir que des problèmes.

Le fait est que, justement, un Starship « v3 », est en préparation. Elon Musk en parlait par exemple en mars 2024. En août de la même année, il indiquait aussi que ce modèle pourrait transporter près de 200 tonnes de charge utile dans une configuration spécifique. En novembre, il ajoutait que cette v3 serait plus puissante que la mythique Saturn V.
La configuration finale de cette v3 n’est pas connue avec certitude et reste susceptible de bouger, notamment en fonction des péripéties autour de la v2. On sait que l’étage supérieur doit avoir plus de moteurs et avoir un corps plus allongé encore. Elon Musk avait montré un aperçu de l’évolution de la fusée géante lors d’une conférence, fin mai.
Reste que certaines futures évolutions pourraient n’advenir qu’avec des générations ultérieures (v4, par exemple). Quant à savoir quand cette v3 fera ses débuts, cela reste à voir. « Nous nous concentrons sur la conception du Starship v3 », indiquait Elon Musk en avril. D’autant qu’il va maintenant aussi falloir se concentrer sur la remise en état de la base.
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