L’édition 2016 de la BlizzCon, début novembre, a été jugée plutôt décevante par un certain nombre d’observateurs malgré l’annonce d’un mode de jeu pour fêter les vingt ans de Diablo dans Diablo 3, la présentation d’un nouveau personnage pour Overwatch ou encore la mise en place d’une ligue professionnelle pour le sport électronique à partir de 2017.
Google DeepMind s’est déjà distingué en début d’année avec AlphaGo, une IA qui a été la première à battre l’un des tous meilleurs joueurs de go au monde, par quatre poins à un.
Mais l’information de la BlizzCon la plus parlante pour l’avenir du jeu vidéo est celle du partenariat qui a été annoncé entre Blizzard et DeepMind, une filiale de Google. Le 5 novembre, au cours d’une conférence consacrée à l’avenir de l’intelligence artificielle dans StarCraft II, les deux entreprises ont fait savoir leur intention de mobiliser le célèbre jeu de stratégie en temps réel pour faire avancer les recherches dans le domaine.
Après avoir fait sensation en début d’année au jeu de go, Google DeepMind entend désormais s’attaquer à un palier plus difficile : les jeux qui ne permettent pas de disposer en permanence d’une information complète et parfaite pour savoir ce que fait en temps réel l’adversaire — comme c’est le cas au jeu de go, où chaque adversaire a accès aux mouvements de l’autre et aux positions de l’ensemble des pierres.
Dans StarCraft II, comme dans la plupart des jeux de stratégie en temps réel ou en tour par tour, l’approche est différente. Trois races avec leurs points forts et leurs points faibles s’affrontent : les terrans (proches des humains en apparence), les zergs (des insectes géants) et les protoss (une race mystique très avancée technologiquement et dotée de capacités psychiques). Le but du jeu est de collecter deux ressources (du minerai et du gaz), développer sa base, bâtir une armée pour ensuite aller écraser son adversaire. On retrouve ce qu’on appelle le « brouillard de guerre » sur la carte : celui-ci masque les zones quand aucune de ses propres unités ne s’y trouve. Pour les révéler, il est nécessaire d’en déplacer au moins une ou d’utiliser une technique, généralement temporaire (un scan de zone par exemple).
Pour une IA, la tâche sera donc plus difficile car elle devra régulièrement prendre de l’information chez l’adversaire, établir une stratégie en conséquence et s’adapter très vite si elle voit du changement chez l’ennemi. Et même en espionnant une base, des données lui échapperont : elle pourra voir par exemple que le centre technique ennemi développe une technologie mais sans savoir laquelle.
Autres difficultés : la variété et la richesse de StarCraft II. Il faut tout à la fois gérer la vision de la carte, la santé des unités et des bâtiments, les unités des joueurs (les siennes, celles de l’adversaire) et leur type (récolteur, unité de corps à corps, à distance, etc). Sans même parler des bâtiments, de la récolte et de la gestion des ressources, d’attaquer, de défendre, de l’arbre technologique…
Pour Blizzard comme pour DeepMind, le partenariat promet d’être gagnant-gagnant. L’éditeur s’offre peut-être l’occasion de créer des niveaux d’IA encore plus ardus pour les joueurs — même si la difficulté la plus élevée n’est déjà pas simple à vaincre — et, pourquoi pas, de créer des évènements avec des matchs contre des IA ou même des IA participant aux tournois de StarCraft II. Ou, pourquoi pas, faire en sorte que l’IA devienne une sorte d’enseignant, même pour les très bons joueurs.
DeepMind peut quant à lui puiser dans l’expérience dans l’un des jeux de stratégie en temps réel les plus populaires et les plus compétitifs au monde. Maintenant que les jeux dotés d’une information complète et parfaite sont mieux maîtrisés par l’IA que par un humain — le jeu de go ayant un peu été le Saint Graal du genre –, ce sont vers les jeux offrant une information incomplète et imparfaite qu’il faut se tourner.
L’environnement de travail sur lequel les équipes de DeepMind pourront travailler sera disponible à partir du premier trimestre 2017. L’IA qui sera élaborée — AlphaSC ? — puisera certainement dans les milliers de parties jouées à haut niveau par les meilleurs joueurs du monde pour apprendre les mouvements généraux et les stratégies qui sont mises en place pour attaquer ou contrer.
Jusqu’ici, rien d’étonnant. C’est de cette façon que DeepMind a fait fonctionner AlphaGo : en se reposant sur l’apprentissage profond (ou « deep learning »), une méthode consistant à faire ingérer des quantités considérables de données à une machine pour qu’elle soit en mesure par la suite de travailler de façon autonome. C’est logiquement le même chemin que devrait suivre l’entreprise avec StarCraft II.
Bien sûr, qui dit temps réel dit nécessité d’adapter la machine de manière à ce qu’elle ne soit pas hors de portée d’un affrontement avec un humain. Il faudra par exemple brider le nombre d’actions par minute qu’elle est capable d’exécuter par rapport à un être humain. À titre indicatif, dans une partie de haut niveau, les joueurs sont susceptibles de monter à 300 actions par minute, voire 400.
C’est ce qu’admet DeepMind : « Les ordinateurs sont capables d’effectuer un contrôle extrêmement rapide, mais cela ne démontre pas nécessairement l’intelligence ». Pour cela, il faudra que l’IA « interagisse avec le jeu dans les limites de la dextérité humaine en termes d’actions par minute ». Sinon, ce n’est pas du jeu : un PC peut faire des milliards de calculs à la seconde, un humain non ; et pourtant, le premier n’est pas intelligent.
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