Dans le monde nanoscopique, ce sont les Suisses les plus rapides. En effet, l’équipe de l’université de Bâle a été la première à franchir la ligne d’arrivée de la piste en or au cours de la NanoCar-Race, une compétition de machines moléculaires qui s’est déroulée fin avril sous l’égide du centre national de la recherche scientifique (CNRS). Leur machine a parcouru au total une distance de 133 nanomètres.
Ce n’était pourtant pas gagné : les quatre membres de l’équipe ont connu un grand nombre de soucis pendant la course. Leur molécule, baptisée Swiss Nano Dragster, a dû être remplacée à trois reprises tandis que les deux pilotes, Rémy Pawlak et Tobias Meier, ont été confrontés à deux crashs ainsi qu’à la nécessité de nettoyer la piste. Seule l’équipe française a connu autant de difficultés.
Il faut savoir que l’équipe mixte américano-autrichienne est arrivée avant mais elle ne se déplaçait pas sur la même surface (de l’argent, alors que les autres étaient sur de l’or). Par ailleurs, elle n’a pas eu le moindre souci technique significatif. Sa machine moléculaire, la Dipolar Racer, est celle qui a parcouru la plus grande distance, 450 nanomètres, les deux équipes s’étant par la suite lancées un autre défi après avoir franchi la ligne d’arrivée, à savoir aller le plus loin possible avant la fin de la compétition.
La Dipolar Racer est aussi la « nano-voiture » qui s’est déplacée le plus rapidement : sa vitesse moyenne était de 75 nanomètres par heure, contre 20 pour l’écurie suisse. Mais à cette échelle, il ne suffit pas d’aller vite. Il faut aussi réussir à bien manœuvrer la machine moléculaire pour qu’elle aille dans la bonne direction et suive le trajet du circuit, fait de lignes droites et de virages à 45 degrés.
À cette vitesse, traverser une pièce de 2 euros prend 400 ans. Faire un kilomètre 800 000 ans
Quant aux quatre aux équipes engagées dans la course, elles ont connu des fortunes diverses.
Alors que la Swiss Nano Dragster et la Dipolar Racer sont arrivées dès le 28 avril, les quatre voitures n’ont pas réussi à achever le parcours prévu par le CNRS. Ainsi, après une première journée difficile, elles « ont finalement décidé de reprendre le départ et d’essayer de repartir malgré différents problèmes techniques », explique Christian Joachim, lors d’un point presse le 29 avril.
De fait, la machine américaine conçue par une équipe de l’université de l’Ohio n’est pas toujours allée dans le bon sens. « Ils étaient très contents hier en début de nuit », fait savoir le directeur de recherche CNRS qui officiait pour l’occasion en tant que directeur de la course. « Ils avaient fait 20 nanomètres puis après ils ont reculé et ils ne savent pas pourquoi », ajoute-t-il.
Finalement, la nano-voiture terminera la course après avoir parcouru 43 nanomètres et quelques pépins techniques.
La voiture allemande, surnommée Windmill, a fait face un autre problème : « l’équipe a cassé deux molécules », et après en avoir cherché une troisième, elle s’est retrouvée bloquée sur la route, raconte Christian Joachim. Malheureusement, cela ne donnera rien : la nano-voiture restera bloquée jusqu’à la fin mais Francesca Moresco et Frank Eisenhut, les deux membres de l’équipe, auront réussi à parcourir 11 nm.
Mais ce sont les véhicules français et japonais qui ont eu le plus de malchance.
« Pour la Green Buggy, c’est-à-dire la voiture toulousaine, on l’a perdue en pleine nuit. Ce matin, [l’équipe] en a retrouvé une et a essayé de la remettre sur la piste » explique Christian Joachim. Cette perte, associée aux soucis techniques rencontrés la veille et le lendemain au final, aura été fatale pour l’équipe française puisque le petit véhicule hexagonal n’aura pas réussi à franchir la moindre distance significative.
Quant à l’équipe japonaise, derrière la nano-voiture Nims-Mana, elle aura fait à peine mieux avec un nanomètre de parcouru. Il faut dire que la malchance était au rendez-vous : crash d’un logiciel à plusieurs reprises, machine moléculaire égarée pendant un temps, sortie de route, perte de l’intégrité de la molécule… les soucis égrainés par Christian Joachim sont nombreux. Reste « qu’ils sont repartis bravement » malgré ces déboires, note-t-il.
Mais plus encore que le classement final de la course, ce sont les bénéfices sur le plan scientifique qui importent. C’est ce qu’a rappelé en filigrane Claire-Marie Pradier directrice adjointe scientifique de l’Institut de chimie du CNRS : « il ne s’agit pas d’une compétition, c’est une aventure humaine commune ». Bref, même dans le monde nanoscopique, le crédo de Pierre de Coubertin s’applique : « le plus important n’est pas de gagner mais de participer ».
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