Les moteurs ioniques n’existent pas que dans la science-fiction. L’industrie spatiale s’en sert déjà pour propulser des sondes ou des satellites. À titre d’exemple, la Nasa avait marqué les esprits en 1998 en éprouvant pour la première fois cette technologie dans des conditions réelles, avec Deep Space 1. Depuis, d’autres puissances se sont engouffrées dans cette voie.
Son principe est de procéder à l’ionisation du carburant, un gaz en l’occurrence, au lieu de le brûler. Ce procédé entraîne une libération d’ions, qui sont ensuite accélérés à l’aide d’un champ électrique. À l’heure actuelle, c’est le xénon, un gaz noble, qui est privilégié pour alimenter les moteurs ioniques.
C’est typiquement le cas de l’Europe. Que ce soit avec le satellite Artémis, conçu en partenariat avec le Japon, en 2001, ou la sonde SMART-1 en 2003, l’Agence spatiale européenne (Esa) s’est aventurée sur ce terrain il y a maintenant de nombreuses années. Ici, c’est un propulseur à effet Hall qui a servi, alors que la Nasa a installé un moteur ionique à grille pour Deep Space 1.
Le moteur ionique a certains avantages sur un moteur spatial traditionnel. Toutefois, il est tributaire de la quantité de carburant qui est embarquée au départ. Quand tout le xénon a été consommé et ionisé, sa propulsion cesse. C’est ce qui s’est produit par exemple avec le satellite européen Gravity Field and Steady-State Ocean Circulation Explorer, qui avait un stock de 40 kg de xénon pour l’ensemble de sa mission.
À court terme, la réponse la plus simple à ce problème consiste à augmenter l’emport de xénon. Mais plus la masse de la charge utile augmente, plus cela coûte de l’argent : typiquement, il faudra peut-être employer un lanceur lourd et brûler d’importantes quantités de carburant classique pour simplement emmener l’engin dans l’espace. Et cette réponse ne peut pas servir à l’infini.
Une première mondiale
C’est pour ça que les récents progrès accomplis dans ce secteur par l’Agence spatiale européenne sont très prometteurs. Pour le dire simplement, des tests ont permis de trouver une alternative à l’emploi de bonbonnes de xénon pour les sondes et les satellites — ou en tout cas, un complément –, ce qui pourrait notamment prolonger significativement la durée des missions spatiales.
Concrètement, l’Esa a mis au point un moteur ionique qui est capable de collecter son propre carburant en se baladant simplement dans l’atmosphère pour y collecter certains gaz. « Cela ouvre la voie à des satellites volant en orbite très basse pendant des années », observe l’Agence. Et cela vaut pour l’atmosphère terrestre comme pour d’autres, même très ténues, à l’image de l’atmosphère martienne.
Simulation d’altitude
Le prototype, qui est le premier du genre à exister indique l’Esa, a fait ses preuves dans une chambre sous vide. Il s’agissait de reproduire le même environnement que l’on trouve à 200 km d’altitude. « Il n’ y a pas de vannes ou de pièces complexes – tout fonctionne sur une base simple et passive. Il suffit d’alimenter les bobines et les électrodes pour obtenir un système de compensation de traînée extrêmement robuste », écrit l’Esa.
La démonstration s’est déroulée en trois étapes : d’abord, il y a eu une alimentation classique du moteur ionique avec du xénon. Ensuite, celui-ci a été partiellement remplacé par un mélange d’air composé d’oxygène et d’azote. La dernière phase a consisté à couper l’arrivée du xénon pour ne faire appel qu’à des molécules communes de l’atmosphère (l’oxygène et l’azote la composent à plus de 99 %).
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