Le clavier de votre ordinateur se perd sous un tas de mouchoirs sales, vos reniflements agacent déjà vos voisins, votre nez est bouché et votre voix menace de s’éteindre à tout moment. Alors que les températures ont particulièrement baissé, en ce début d’automne, vous faites partie des malchanceux qui ont attrapé, non pas le coronavirus, mais un rhume. Selon l’expression consacrée, vous avez « attrapé froid » : une formulation qui n’est pas valable scientifiquement.
On n’attrape pas une rhinopharyngite parce qu’il fait plus froid dehors. Cette affirmation a de quoi surprendre, alors que l’infection semble toujours accompagner la baisse des températures et l’arrivée des premiers flocons. Elle débarque aussi au début de l’automne, quand nous ne savons pas quoi enfiler pour affronter les températures fraiches du matin, sans avoir trop chaud le reste de la journée.
Qu’est-ce qui explique le rhume ?
La traduction anglaise du mot « rhume » contribue d’ailleurs à entretenir cette idée reçue : dans la langue de Shakespeare, on utilise le mot « cold » qui signifie également « froid ».
Le froid ne semble pas totalement étranger à cette infection respiratoire répandue : comme le relève l’American Lung Association, les adultes ont en moyenne deux rhumes dans l’année, qui surviennent le plus souvent entre les mois de septembre et mai. Le fait qu’il s’agisse de la période la plus fraîche de l’année n’est pas un hasard, mais ce ne sont pas les températures basses qui expliquent que l’on tombe malade.
Selon Faïza Bossy, médecin généraliste à Paris interrogée par Numerama, le rhume s’explique surtout par les variations de température. « On peut tout aussi bien attraper un rhume dans un pays chaud, si on se trouve dans un lieu climatisé. Une variation de 3 à 5 °C est difficile à supporter pour l’organisme et peut être la cause des symptômes d’un rhume », nous précise l’experte. Certaines prédispositions contribuent à nous faire tomber malade : « Lorsque vous êtes fatigué, par exemple, le corps se défend moins bien, car il y a une diminution de l’immunité », poursuit notre interlocutrice.
Pourquoi attrape-t-on le rhume pendant l’hiver ?
La croyance populaire que le rhume est lié au froid vient du fait que les « virus responsables du rhume prédominent pendant les mois d’hiver dans cette partie du monde », expliquait Stan Spinner, médecin pédiatre au sein du Texas Children’s Hospital, au New York Times en février dernier. Malgré leur présence plus importante, les virus responsables du rhume ne sont pas les seuls fautifs : notre tendance au confinement pendant les périodes automnale et hivernale est responsable de la propagation de l’infection.
Comme l’ont souligné nos confrères du Huffington Post, la baisse des températures nous incite à adopter des comportements pour éviter d’avoir froid. Non seulement nous nous agglutinons plus volontiers dans certains lieux fermés (l’école, le métro, les restaurants), mais en plus ces endroits sont moins régulièrement aérés. Ceci laisse aux virus le loisir de se propager entre individus, bien plus facilement que si nous étions dehors dans le froid.
Faïza Bossy abonde et insiste sur le fait que le problème ne vient pas tant du confinement, que d’un air saturé lorsque le chauffage est mal adapté. « Dans un wagon de métro, selon la manière dont le renouvellement d’air est calculé, il sera probablement bien aéré s’il n’y a qu’un seul passager. Avec 100 personnes dans le wagon, le renouvellement d’air sera plus compliqué », nous indique-t-elle.
Le rhume est-il contagieux ?
Le rhume est bénin, mais il est très contagieux. Pour comprendre pourquoi nous attrapons aussi souvent des rhumes au cours de notre vie, il faut aussi savoir que les virus porteurs de l’infection existent par centaines : l’American Lung Association en dénombre plus de 200 sortes. Les rhinovirus sont les plus courants : ils trouvent dans nos nez un endroit parfait où se loger, car leur température de croissance optimale est de 33 °C.
La pluralité des virus à l’origine du rhume explique pourquoi il est difficile de trouver un véritable remède à l’infection : vous pouvez attraper des virus très différents au cours de votre vie — même si leurs effets seront toujours les mêmes.
À la promiscuité et la diversité des virus à l’origine du rhume, s’ajoute à un autre facteur : l’humidité de l’air. En hiver, l’air est bien plus sec : de ce fait, la muqueuse nasale est plus sensible aux virus. L’utilisation du chauffage en intérieur aggrave le problème, car il assèche les sinus et empêche le mucus nasal de s’écouler correctement, et de lutter contre le virus.
En 2013, une étude publiée dans la revue PLOS a établi qu’un taux d’humidité évitait la propagation des virus grippaux : lorsqu’ils sont expulsés par un éternuement, ils se fixent aux molécules d’eau. Si l’air est sec, ils tracent plus aisément leur chemin jusqu’aux autres individus.
Voilà pourquoi nous sommes plus sujets à l’infection en automne et en hiver : ce n’est pas parce que nous restons exposés pendant quelque temps aux températures froides. Vous saurez désormais que répondre si l’on vous dit de ne pas sortir sans pull, car vous risquez « d’attraper froid. » Comme Faïza Bossy, vous pourrez rétorquer que « le grand froid intense n’est pas responsable du rhume ».
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