Sur la côte ouest du Groenland, un glacier est en train de s’étendre vers l’océan. Pourtant, l’expansion du Jakobshavn Isbræ, aussi connu sous le nom de glacier Illulissat, n’est pas une bonne nouvelle sur le plan environnemental. Des scientifiques néerlandais et américains (dont des membres de la Nasa) l’ont montré dans la revue Nature Geoscience le 25 mars 2019.
« Depuis 2016, Jakobshavn a avancé à nouveau, ralenti et épaissi », constatent les chercheurs. Pendant 20 ans, le glacier était en train de s’amincir, de reculer et de fondre rapidement. Les scientifiques pensent que l’inversion de cette tendance n’est peut-être que temporaire : elle est liée « au refroidissement régional des océans ».
Le Jakobshavn Isbræ se trouve près de la ville d’Illussat, qui abrite un fjord (une vallée glaciaire envahie par la mer) où se jettent d’imposants glaciers. Il produit 10 % de l’inlandsis du Groenland, qui représente la deuxième plus grande masse de glace sur Terre. Les scientifiques ont découvert l’épaississement du glacier grâce aux données des missions Oceans Melting Greenland (OMG) et Operation IceBridge de la Nasa pour étudier les glaces polaires.
Le glacier fond toujours, mais plus lentement qu’avant
Entre 2000 et 2010, la fonte du Jakobshavn Isbræ a été responsable d’une élévation globale du niveau des mers de presque 1 millimètre. Au cours de la décennie précédente, le Jakobshavn Isbræ s’était déchargé de sa glace de façon anormale. Aujourd’hui, il continue à fondre et à contribuer à la hausse du niveau des mers, « mais à un rythme plus lent », note la Nasa dans un communiqué.
Comment expliquer ce changement surprenant ? Les auteurs notent que des courants d’eaux se sont refroidis à proximité du glacier. Dans la baie de Disko, qui appartient à la commune d’Illulissat, la température de l’océan a baissé de 2°C entre 2014 et 2016, en dessous de 150 mètres de profondeur. « L’eau de cette couche plus profonde se jette dans le fjord glacé d’Illulissat et entre en contact avec le Jakobshavn Isbræ en profondeur », écrivent les scientifiques.
Une variation temporaire du climat
Ces eaux froides sont liées à un phénomène connu sous le nom d’oscillation nord-atlantique (NAO) — qui entre en jeu dans la fonte rapide de la calotte polaire du Groenland. La NAO se caractérise par des changements de pression dans l’Atlantique Nord. Cette variation de climat amène l’océan Atlantique à « basculer lentement entre chaud et froid tous les 5 à 20 ans », explique la Nasa. Actuellement, l’Atlantique est entré dans une phase de refroidissement. Elle est accompagnée par le refroidissement des courants sur la côte sud-ouest du Groenland en 2016, qui a atteint le Jakobshavn Isbræ.
Autrement dit, le glacier est tributaire de ces changements : lorsque l’océan Atlantique se réchauffera, le Jakobshavn Isbræ risque de recommencer à fondre. « Jakobshavn se démarque momentanément de ce climat. À long terme, les océans se réchauffent », explique Josh Willis du Jet Propulsion Laboratory et co-auteur de l’étude.
Le Jakobshavn Isbræ montre ainsi qu’il n’est pas toujours facile d’anticiper la fonte future des glaciers et leur contribution à l’élévation du niveau des mers. Cela dit, la fonte moins rapide du glacier et l’épaississent observé restent à nuancer : actuellement, le Jakobshavn Isbræ fond toujours plus vite qu’au début des années 1990.
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