96 sacs d’urine, de matières fécales et de vomi se trouvent actuellement sur la Lune. Ils font partie des nombreux objets et matériaux d’origine humaine abandonnés sur notre satellite au cours des précédentes explorations. Les récupérer pourrait faire partie des plans de la Nasa lors de la prochaine exploration lunaire.
Celle-ci pourrait avoir lieu bien plus tôt qu’escompté : le 26 mars 2019, la Maison-Blanche a annoncé que des astronautes américains fouleraient le sol lunaire dans 5 ans, en 2024 (à l’origine, la Nasa prévoyait un alunissage à la fin de cette décennie). L’occasion de récupérer les sacs laissés sur l’astre se présentera-t-elle plus tôt que prévu ? Depuis février 2018, un ingénieur de la Nasa, Mark Lupisella, travaille sur une mission potentielle qui consisterait à récupérer ces sacs et les étudier.
Pourquoi ces sacs d’excréments suscitent-ils autant d’intérêt ? Ils pourraient être très utiles pour nos futures explorations spatiales, par exemple en direction de Mars. Aussi futile ou dégoûtant que puisse paraître le sujet de ces selles laissées sur la Lune, elles seraient précieuses si l’on parvenait à prouver qu’une forme de vie y existe. Des chercheurs se sont posé la question le 27 février dernier, dans une étude parue dans la revue Astrobiology : d’après eux, les chances que ces micro-organismes aient survécu sont minces.
Des bactéries vivantes dans nos selles
Pourquoi imagine-t-on que la vie peut exister dans ces sacs ? Pour le comprendre, il faut expliquer de quoi sont composées les selles humaines. Même si cela dépend de ce que l’on mange, on considère généralement qu’elles contiennent 75 % d’eau et 25 % de matières solides. Ces dernières sont principalement « des matières organiques, composées de 25 à 54 % de cellules microbiennes (dont une petite partie probablement constituée de virus) qui peuvent êtres mortes ou vivantes », ont expliqué deux biologistes américains dans une étude sur la « transplantation fécale » en 2016.
Selon ces auteurs, les bactéries constituent entre 6 et 13 % de nos selles. Mais encore faut-il faire la distinction entre celles qui sont viables, endommagées ou mortes : les biologistes estiment que les bactéries viables constituent entre 3 et 6 % de la matière fécale humaine. Plus de 1 000 espèces différentes de bactéries peuplent nos intestins.
Revenons aux sacs déposés sur la Lune par les astronautes qui s’y sont succédé. Pourrait-on alors imaginer que les bactéries qui ont été ainsi abandonnées aient survécu aux conditions hostiles à la vie sur notre satellite ? Si la réponse est oui, on pourrait se demander ces mêmes bactéries vivantes pourraient voyager dans l’espace, comme le relève Vox.
Les chances de survie sont minces
« Je serais très surpris si quelque chose a survécu », a fait remarquer Charlie Duke à nos confrères. L’astronaute américain est le dixième individu à avoir foulé le sol de la Lune, lors de la mission Apollo 16 en 1972. D’après lui, le rayonnement solaire (responsable des tâches observables sur la Lune) a probablement détruit la moindre trace de vie dans les sacs d’excréments.
Les scientifiques qui se sont penchés sur la question en février vont dans le même sens. Après avoir estimé la quantité de microbes viables qui ont atteint la surface de la Lune, ils ont créé un modèle pour voir comment ils pourraient survivre aux conditions sur l’astre.
Ultraviolets, températures extrêmes : des conditions difficiles pour ces bactéries
Ils en concluent qu’il est peu probable que ces bactéries soient viables « après une seule lunaison » (l’intervalle entre deux nouvelles lunes) car elles seront endommagées à cause de l’irradiation aux ultraviolets ou des températures extrêmes sur la Lune. Sans champ magnétique ou couche d’ozone suffisamment protecteurs, il y a de fortes chances pour que les bactéries soient mortes.
À supposer que cela soit confirmé lors d’une future exploration lunaire, il restera d’autres axes de recherche pour les scientifiques. Par exemple : en laissant nos selles dans l’espace, risquons-nous de le contaminer ? Le traité de l’espace, ratifié en 1967, exige des États qu’ils prennent soin d’éviter des contaminations sur la Lune ou d’autres corps célestes. Si nos déjections sont contaminantes, cela risque de poser problème lors de futures missions.
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