Après la Chine, des « bébés CRISPR » pourraient-ils naître en Russie ? Denis Rebrikov, un biologiste russe, a l’intention de modifier des embryons humains et de faire suite à l’expérience menée par He Jiankui à la fin de l’année dernière, rapporte la revue Nature le 10 juin 2019.
Denis Rebrikov pourrait entamer ses tests avant la fin de l’année, s’il obtient les autorisations nécessaires. Comme He Jiankui, il veut utiliser la controversée technique du « ciseau génétique ». La méthode CRISPR consiste à couper dans l’ADN (d’où la métaphore du ciseau) pour modifier un patrimoine génétique. À l’aide d’une enzyme, Cas9, une entaille est faite dans l’ADN et permet ainsi d’éteindre le gène ciblé.
Une méthode présentée dans un article en octobre
Sur ResearchGate, un site qui met en relation les scientifiques, Denis Rebrikov se présente comme le directeur de recherche de DNA Technology, une entreprise de biotechnologie. Le chercheur est également le co-auteur d’un article publié dans la revue Bulletin of RSMU en octobre 2018. Le texte porte sur la méthode CRISPR et estime que l’édition d’un gène, CCR5, est une méthode fiable pour immuniser un futur individu contre le VIH.
Le choix du gène CCR5 n’est pas un hasard : il est inspiré par le cas du patient de Berlin, une personne guérie du sida depuis 2007. Ce patient avait reçu une greffe de moelle osseuse d’un donneur possédant une immunité naturelle contre le VIH. Cette immunité est provoquée par la mutation du gène CCR5.
Une expérience avec des femmes séropositives
Denis Rebrikov veut utiliser la méthode sur des embryons, en ciblant ce même gène. Il compte ensuite implanter les embryons génétiquement modifiés dans l’utérus de femmes séropositives. D’après Nature, il prétend que son expérience sera moins risquée et moins controversée que celle entreprise par He Jiankui. Ce dernier avait mené des tests sur des couples avec un homme séropositif et une femme séronégative. En ciblant plutôt des femmes séropositives, Denis Rebrikov veut réduire le risque de transmission entre la mère et son enfant (plus élevé qu’entre un père et son enfant). Il assure avoir déjà conclu un accord avec un centre spécialisé dans le VIH, pour trouver de futures participantes.
Comme le souligne Nature, le projet du biologiste russe suscite déjà le scepticisme d’une partie de la communauté scientifique. Même si Denis Rebrikov assure que sa technique est plus sûre que celle de He Jiankui, les risques qu’encourent désormais les « bébés CRISPR » montrent que la technique n’est pas encore maitrisée et que ses conséquences sont incertaines. Denis Rebrikov prétend qu’il n’est « pas assez fou » pour reproduire les erreurs de son homologue chinois : son expérience, si elle a lieu, donnera peut-être l’occasion de vérifier cela.
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