Devrions-nous avoir peur des trous noirs ? Récemment, des scientifiques ont découvert une étoile qui s’est s’échappée à toute vitesse au lieu d’être avalée par un trou noir. Son étonnante aventure pourrait nous inquiéter : la Terre pourrait croiser, elle aussi, le chemin d’un trou noir. Mais le danger pourrait plutôt se trouver ailleurs.
« S’il y a quelque chose qui doit nous faire peur, c’est la rencontre avec une autre étoile, pas un trou noir ! », nous assure Alain Riazuelo, chargé de recherche au CNRS et astrophysicien à l’IAP (Institut d’astrophysique de Paris). Voici pourquoi.
Où se trouve le trou noir le plus proche ?
Intéressons nous à la probabilité d’une rencontre entre notre système solaire et un trou noir. Où se trouve le trou noir le plus proche dans notre galaxie ? « À la louche, nous connaissons une trentaine de trous noirs dans notre galaxie, et notre connaissance des populations stellaires laisse à penser qu’il y en a quelques dizaines de millions, soit un million de fois plus que ce qu’on en connaît », poursuit l’astrophysicien. On peut donc estimer que l’on ne connaît qu’un seul trou noir, sur un million existants.
« Si on ne connaît qu’un trou noir sur un million et que l’on suppose qu’ils sont répartis de façon uniforme et aléatoire autour de nous, alors, statistiquement, le trou noir (invisible) le plus proche de nous est 100 fois plus proche — c’est la racine cubique de 1 million, 100 x 100 x 1000 = 1 million », complète le scientifique. Résultat : le trou noir le plus proche de notre planète se trouverait à quelques dizaines d’années-lumière. Pour rappel, une année-lumière équivaut à 9 461 milliards de kilomètres.
Il est possible d’arriver à cette estimation d’une autre façon, nous explique Alain Riazuelo : « On estime qu’il y a 1 trou noir pour 10 000 étoiles, ce qui signifie que le trou noir le plus proche est, statistiquement, dans les 20 fois plus éloigné que l’étoile la plus proche — à nouveau parce que 20 x 20 x 20 fait à peu près 10 000. Puisque notre plus proche voisine stellaire est à 4 années-lumière, on obtient 80 années-lumière, soit un ordre de grandeur comparable au précédent. »
Mais « on s’en fiche complètement »
La « proximité » entre un tel trou noir et notre petit système solaire est donc à relativiser. « Mais le point important est que l’on s’en fiche complètement !, intervient l’astrophysicien. Si on compte un trou noir pour 10 000 étoiles, cela signifie que si un astre se rapproche du système solaire, il s’agira, dans 9 999 cas sur 10 000… une étoile. » Autrement dit, le risque de croiser le chemin d’une étoile est beaucoup plus « élevé » que celui de se trouver sur la route d’un trou noir.
Toute la question est alors de savoir dans combien de temps notre système solaire pourrait rencontrer une autre étoile, « l’astre le plus commun de notre galaxie (donc, statistiquement, le plus dangereux) », souligne Alain Riazuelo. On estime qu’une « rencontre rapprochée » entre ces deux astres, à une distance de 315 milliards de kilomètres (1/30e d’année-lumière), se produirait une fois tous les milliards d’années, nous indique le scientifique. « Une telle distance correspond à 2 000 fois la distance Terre-Soleil et n’aurait aucune incidence sur la trajectoire de la Terre autour du Soleil. Tout juste aurait-on droit à une étoile particulièrement brillante (comparable, voire supérieure à la Lune) pendant quelques millénaires, mais totalement inoffensive. »
Nous pouvons dormir tranquilles
Et si la distance lors de cette rencontre était encore plus faible ? « Si vous voulez une rencontre 10 fois plus rapprochée, elle-même assez peu susceptible de provoquer des dégâts, il faut attendre 100 fois plus longtemps, soit 100 milliards d’années… Soit bien plus que l’âge de l’univers », explique l’astrophysicien (l’âge de l’univers est estimé à environ 13 milliards d’années).
Si vous aviez peur que notre petite planète croise un trou noir sur sa route, soyez donc rassurés. « Pour qu’un trou noir s’approche de nous à 200 fois la distance Terre-Soleil, il faut attendre un million de milliards d’années, ou, en chiffres : 1 000 000 000 000 000 d’années. Vous pouvez dormir sur vos deux oreilles », conclut l’astrophysicien.
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