Le rover Curiosity a débuté sa mission sur Mars en 2012. Depuis, il nous offre de belles photos, mais pas seulement. Grâce à ses instruments, nous allons de découvertes en découvertes. La dernière en date, annoncée par la Nasa ce 12 novembre 2019 : dans le cratère de Gale, que le robot explore, les niveaux d’oxygène montent et descendent de manière totalement étrange. On n’y trouve, pour l’instant, aucune explication chimique qui soit logique.
Curiosity approfondit la géologie martienne, en creusant dans la roche de notre planète voisine. On sait maintenant qu’il y avait probablement un grand lac salé il y a trois milliards d’années. Curiosity est aussi muni d’un laboratoire chimique, par lequel il aspire l’air de Mars et l’analyse. À partir des données que le rover nous a retournées, on connaît en détails la composition de l’atmosphère martienne : principalement du dioxyde de carbone (95 %), des petits niveaux d’azote et d’argon, ainsi qu’une faible proportion (0,16 %) d’oxygène.
Les analyses de l’air par Curiosity ont rapporté des éléments fascinants. À la surprise des scientifiques, le rover avait découvert un pic de méthane sur Mars il y a quelques mois. Cette trouvaille reste en partie inexpliquée : le méthane est un gaz qui peut provenir aussi bien d’une vie microbienne que d’une activité rocheuse. Tout ceci est d’autant plus intrigant que les niveaux de méthane semblent augmenter soudainement de manière périodique. La nouvelle découverte de Curiosity, sur l’oxygène, pose le même type de questionnements.
Les scientifiques « complètement stupéfiés »
Mars n’est peut-être pas (ou plus) une planète habitable, mais tout comme la Terre, elle a des saisons. Les missions d’exploration robotique ont révélé que la pression de l’air évolue au fil d’une année martienne. En hiver, le dioxyde de carbone (gaz majoritaire sur Mars) se gèle aux deux pôles, ce qui débouche sur un abaissement de la pression de l’air. Puis, au printemps, le dioxyde de carbone recommence à s’évaporer, la pression augmente à nouveau jusqu’à la fin de l’été. Les autres gaz minoritaires, l’azote et l’argon, suivent très exactement le même comportement dans leurs niveaux. On peut prédire chimiquement leur proportion en fonction du dioxyde de carbone.
C’est là que les données de Curiosity révèlent un bémol : l’oxygène ne suit pas du tout ce même schéma. Ce gaz est alors en partie imprédictible par la chimie atmosphérique. « La première fois qu’on a vu ça, on était complètement stupéfiés », annonce Sushil Atreya, professeure en sciences du climat et de l’espace, dans le communiqué de la Nasa. Elle est co-autrice d’un article paru dans Journal of Geophysical Research et qui approfondit la découverte. Les scientifiques ont d’abord pensé à un problème technique dans l’instrument de mesure, mais après plusieurs vérifications, il est finalement clair que ce n’est pas un « bugg ».
Au printemps et en été, l’oxygène augmente soudainement
Les niveaux d’oxygène obéissent, sur Mars, à leurs propres règles. Au printemps et en été, l’oxygène augmente soudainement autour de 30 %, avant de revenir à ce que l’on peut chimiquement prédire en automne. Depuis le temps que Curiosity explore le cratère martien de Gale, le rover est en mesure de confirmer que ce phénomène se produit chaque année, avec des niveaux différents d’oxygène à chaque fois. Le fait que le comportement de ce gaz soit différent chaque année, avec ces pics, signifie selon Melissa Trainer, directrice de la recherche, qu’il s’agit « d’une source chimique et d’un puits que nous ne connaissons pas encore ».
Une corrélation méthane / oxygène ?
Si l’oxygène se comporte aussi bizarrement que le méthane, n’y aurait-il pas une corrélation ? C’est une sérieuse posssibilité, car les pics de ces deux types de gaz suivent des hauts et des bas similaires au fil des saisons martiennes. Vous pouvez le constater sur le graphique ci-dessous [les signes noir et rond sont l’oxygène ; ceux carré et gris sont le méthane : on constate qu’ils suivent souvent une courbe assez proche]. « Nous commençons à voir une corrélation alléchante entre le méthane et l’oxygène durant une bonne partie de l’année martienne. Je pense qu’il y a quelque chose. Mais je n’ai pas encore les réponses. Personne ne les a », relève Sushil Atreya.
Comme précisé plus haut, ce type de gaz peut avoir deux types de source. Elle peut être géologique (via des interactions rocheuses et chimiques) ou alors biologique. Cette seconde option signifierait la présence d’une vie microbienne sur Mars… sauf qu’il n’en existe aucune preuve. La première option semble donc la plus logique, mais les scientifiques ne négligent aucune piste et vont tout mettre en œuvre pour résoudre ce mystère. Quelle que soit la réponse, ce sera fondamental pour comprendre notre planète voisine. « Pour moi, c’est un appel à toutes les personnes intelligentes que ce sujet intéresse : essayez de trouver », conclut Melissa Trainer.
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