Vous avez la sensation que la musique a ce « petit quelque chose » d’universel ? Une équipe de chercheurs apporte des données scientifiques pour appuyer cette idée.

Que ce soient des hymnes, des berceuses, des chants sacrés, des mélodies dansantes, des rythmes guerriers… toutes les cultures du monde ont au moins la musique comme point commun dans leur quotidien. La musique est si présente, si importante dans nos vies, que l’on se plaît souvent à dire qu’elle est universelle. Mais que dit la science à ce sujet ? Existe-t-il un langage commun derrière toutes les musiques du monde ? C’est bel et bien la conclusion que partage une équipe de chercheurs dans un article paru dans Science ce 22 novembre 2019.

Le trio à l’origine de cette étude est composé d’un spécialiste des données scientifiques, d’un psychologue et d’un anthropologue. Ensemble, ils ont rassemblé, pendant cinq ans, une base de données musicale d’une ampleur sans précédent. Ils ne se sont pas contentés de collecter quelques chansons classiques et modernes, ils ont également pioché dans les collections personnelles d’ethnomusicologues, d’anthropologues, pour récupérer des données du monde entier, d’un maximum de cultures. Les scientifiques ont inclus, dans les morceaux répertoriés, les musiques purement vocales.

La structure musicale des morceaux correspond à des contextes similaires (danse, berceuse, rituel...) dans toutes les cultures, selon cette étude. // Source : Pixabay

La structure musicale des morceaux correspond à des contextes similaires (danse, berceuse, rituel...) dans toutes les cultures, selon cette étude.

Source : Pixabay

Ils ont d’abord essayé d’établir une corrélation entre les données musicales et les données ethnologiques. Sur 315 cultures sur lesquelles ils ont pu trouver des informations d’ordre ethnologique, à chaque fois, ils ont trouvé la mention de musiques culturellement propres. À partir de cette base, l’équipe de scientifiques a croisé les données musicales de toutes ces cultures variées. Des corrélations sont bien ressorties de ce travail entre data, psychologie, anthropologie et musicologie.

Une grammaire universelle

L’équipe scientifique décrit, dans son article, avoir repéré des modèles récurrents à travers l’intégralité des musiques répertoriées. Les morceaux utilisés dans un contexte similaire présentent des caractéristiques similaires. Dans n’importe quelle culture, la musique est associée à un comportement, à une situation spécifique. Les chercheurs ont la sensation qu’il existe donc une « grammaire universelle » qui gouverne la musique, qu’importe la culture où celle-ci est jouée, chantée.

Il existe en effet partout des contextes qui conditionnent ce à quoi ressemble la musique et même sa tonalité : la danse, la spiritualité, l’amour, le deuil, la guerre, la maladie. Les chercheurs ont repéré quatre catégories qui obéissent de manière impressionnante aux mêmes structures musicales :

  • les berceuses,
  • les morceaux de guérison,
  • les musiques de danse,
  • les musiques d’amour.

La rythmique et les tonalités des musiques utilisées dans ces contextes ont de nombreuses corrélations. Par exemple, les musiques de danse ont indéniablement un rythme plus rapide que n’importe quels autres morceaux. Cela signifie qu’à partir du tempo, de l’attaque ou encore de la gamme de hauteur, on peut prédire si la musique analysée sera utilisée dans un contexte de berceuse, de danse, de romance, etc.

Contrairement à l’idée dominante en musicologie, la tonalité pourrait être universelle

Pour les auteurs de l’étude, l’analyse profonde de cette immense base de données permet d’arriver à la conclusion que la musique est factuellement « universelle ». Ils estiment également que les résultats sur l’importance du contexte signifient que, partout, la musique imprègne la vie sociale d’une façon très similaire. Ils en profitent alors pour briser ce qu’ils estiment être une légende occidentale : « En musicologie, la tonalité est souvent considérée comme une invention de la musique occidentale, mais nos données soulèvent la possibilité controversée que cela puisse être une caractéristique universelle de la musique ». L’équipe de chercheurs pense que leurs conclusions prouvent l’existence d’une prédisposition psychologique à la musique, commune à toute l’humanité.

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