La pandémie causée par la maladie Covid-19 est aussi le moment pour questionner la relation entre l’humanité et son environnement. Le confinement a par exemple réduit d’un tiers le bruit sismique dans certaines zones. Mais qu’en est-il de notre rapport aux animaux ? Les recherches scientifiques sur l’origine de la crise pointent pour l’instant sur une mutation du virus. Il serait passé de la chauve souris ou du pangolin vers l’être humain. Si la Chine est signataire de la Convention internationale contre le trafic des espèces sauvages, laquelle protège justement ces animaux, c’est dans un marché de la ville de Wuhan que la transmission initiale aurait eu lieu, puisqu’il s’agit du foyer de la pandémie.
« Les maladies infectieuses émergentes chez les humains sont souvent causées par des agents pathogènes provenant d’hôtes animaux, et les foyers de zoonoses représentent un défi majeur pour la santé mondiale », écrivent les auteurs d’une étude qui vient de paraître, le 8 avril 2020, dans Proceedings of the Royal Society B. La zoonose correspond à la transmission d’un pathogène de l’animal vers l’humain. Leur travail de recherche tend à démontrer que l’impact croissant de l’humanité sur la vie sauvage augmente les risques de zoonoses.
Plus on empiète sur l’habitat naturel, plus les risques augmentent
Les chercheurs partent du constat les maladies provenant des animaux sauvages se sont accrues au fil des dernières décennies. Ils ont modélisé les données pour mettre en relation 142 virus issus de zoonoses avec les animaux qui en sont à l’origine, et les évolutions dans la population et les habitats de ces animaux (à partir du catalogue fourni par l’Union internationale pour la conservation de la nature). Les résultats de l’étude montrent que plus il y a d’animaux sauvages « domestiqués » ou contraints d’évoluer face à l’impact du mode de vie humain, plus les risques de maladies infectieuses issues de ces animaux augmentent.
Cela concerne d’abord les animaux dont la population est plus abondante du fait de leur domestication à des fins d’exploitation — alimentaire principalement. C’est le cas surtout du bétail, où l’on retrouve le plus de virus transmis à l’être humain. Puis, dans un deuxième groupe, sont situés les animaux sauvages qui ont adapté leur distribution, leur comportement et leur habitat aux changements anthropogéniques (d’origine humaine), comme les chauves-souris ou les rongeurs. Enfin, le troisième groupe correspond aux espèces en voie disparition, du fait de la chasse intensive, du trafic ou de la disparition de leurs habitats. Ces animaux sauvages menacés représentent deux fois plus de risques de zoonoses que les espèces dont le risque d’extinction provient d’autres facteurs que les humains.
« Dans une convergence malheureuse de nombreux facteurs, cela entraîne le type de pétrin dans lequel nous nous trouvons actuellement »
D’un point de vue épidémiologique, ces trois groupes et trois configurations ont un facteur commun : l’habitat naturel se réduisant, les populations de ces animaux sauvages et les populations humaines multiplient les contacts. Les risques de zoonoses se multiplient alors à leur tour. « La propagation des virus provenant des animaux est le résultat direct de nos actions concernant la faune et son habitat », explique la directrice de cette recherche Christine Kreuder Johnson. « Ces actions menacent simultanément la survie des espèces et augmentent le risque de propagation. Dans une convergence malheureuse de nombreux facteurs, cela entraîne le type de pétrin dans lequel nous nous trouvons actuellement. » Pour la crise sanitaire actuelle, cette convergence réside par exemple probablement dans la consommation alimentaire illégale de pangolins, de mauvaises conditions sanitaires dans le marché aux animaux de Wuhan, et la mutation d’un coronavirus.
En tout cas, pour Christine Kreuder Johnson, il est très clair que si nous voulons éviter que se reproduisent des pandémies à l’échelle de Covid-19, l’humanité doit trouver un moyen de coexister plus sainement avec la vie sauvage. Elle appelle à ce que, au sortir de cette crise, nous repensions l’interaction entre nos activités et les animaux.
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