La crise sanitaire provoquée par la pandémie Covid-19 a provoqué un coup d’arrêt économique dans de nombreuses régions du monde. Résultat, les observations satellite constatent une baisse drastique de la pollution dans de nombreuses zones du monde. Même le « bruit sismique » généré par les activités humaines a chuté. Malheureusement, ce coup d’arrêt n’aura pas suffit à freiner un désastre environnemental : la déforestation de l’Amazonie et, par la même occasion, le danger qui pèse sur les peuple autochtones. La situation est même pire que jamais.
D’après les dernières données de l‘Institut national de recherches spatiales (INPE) du Brésil, ce sont 327 kilomètres carrés de forêt amazonienne qui ont été rasés, en mars 2020. Sur les douze derniers mois, le total est porté à 9 152 kilomètres carré. Il s’agit, à l’échelle d’une année, du chiffre le plus haut depuis mai 2008.
La déforestation illégale augmente
Depuis quelques années, la déforestation amazonienne est en forte augmentation. Ne serait-ce qu’en 2019, les observations satellite de l’INPE montraient qu’elle a bondi de 85 %. Cette évolution néfaste pour cet environnement s’est déjà traduite par des incendies ravageurs qui ont marqué le monde entier, l’été dernier. Et, comme nous l’indiquait alors l’écologue Philippe Grandcolas, ces feux croissants auront un impact irrémédiable sur l’écosystème local en plus d’un impact gravissime à l’échelle de la planète. L’arrivée au pouvoir du Président d’extrême-droite Jaïr Bolsonaro n’arrange rien : « Les politiques et la rhétorique de l’administration Bolsonaro ont encouragé les destructions provoquées par les mafias et mis en danger la forêt et ses habitants », pointait Human Rights Watch en février 2020.
Aujourd’hui, non seulement la pandémie Covid-19 ne freine pas la déforestation, mais il semblerait même qu’elle aggrave ces pratiques destructrices, notamment celles illégales hors de contrôle, ce qui met en danger plus que jamais l’écosystème mais aussi les indigènes qui y vivent. L’association de la tribu Karipuna, avec l’aide du CIMI (Conseil Indigéniste Missionnaire) et de l’ONG Greenpeace, a déposé une plainte. Dans l’État de Rondônia, au Brésil, en plein cœur de l’Amazonie, ce peuple indique avoir « entendu des bruits constants de machines et de tronçonneuses, même très près du village ». Le défrichage de la forêt ne s’était pas approché aussi près des frontières du village depuis près de 40 ans, ce qui constitue selon ce texte une preuve d’une « recrudescence de la déforestation et de la dégradation » des terres.
D’après un reportage de la BBC, l’augmentation actuelle de la destruction environnementale en Amazonie vient aussi et notamment des chercheurs d’or. Les images satellites montrent que ces mineurs étendent actuellement leurs opérations. Si la pandémie Covid-19 n’a pas eu d’impact sur le cours de l’or, toujours élevé, elle a en revanche fait chuter le prix local de l’essence. Une situation « idéale », dans le cadre de ces pratiques, pour faire opérer au maximum les véhicules et machines.
Les indigènes sont menacés par le nouveau coronavirus
La situation est évidemment problématique d’un point de vue environnemental, à la fois pour l’écosystème local et celui de la planète. Mais les conséquences sont également humaines. Il y a, d’abord, le risque d’une recrudescence de violences envers les peuples indigènes : plus les groupes de déforestation progressent vers les villages, plus ce danger augmente lors du contact. Par ailleurs, la destruction de l’environnement provoque aussi des contacts plus réguliers avec les animaux sauvages, ce qui est cause d’une multiplication de zoonoses, le passage de pathogènes de l’animal vers l’humain. Dans le contexte pandémique de Covid-19, les incursions au sein des territoires indigènes peuvent avoir des conséquences rapides plus graves encore : l’accélération de la transmission du coronavirus chez ces peuples.
Comme le rapporte National Geographic, SARS-CoV-2 a d’ores et déjà commencé à circuler au sein de certaines tribus qui, du fait de leur isolement et donc en l’absence de soins médicaux, pourraient subir un contre-coup d’autant plus meurtrier. Un enfant de 15 ans issu de la tribu isolée Yanomami est décédé des suites de Covid-19. « Aujourd’hui, le principal vecteur de propagation de COVID-19 à l’intérieur du territoire indigène Yanomami est sans aucun doute les plus de 20 000 mineurs illégaux qui entrent et sortent du territoire sans aucun contrôle », a dénoncé l’Institut socio-environnemental brésilien. Pour ces peuples les plus isolés, cette immixtion au sein de leurs terres est en effet la voie majeure de transmission de la maladie.
La situation rappelle les pires heures du colonialisme : rappelons que l’arrivée des colons a décimé bien des peuples ne serait-ce que par la transmission de germes. La tribu Karipuna ne compte aujourd’hui pas plus d’une cinquantaine de personnes, ce qui signifie qu’une maladie se transmettant aussi rapidement que Covid-19 pourrait être plus que jamais fatale envers ces autochtones. La situation des indigènes n’est d’ailleurs pas vraiment meilleure aux États-Unis pendant cette pandémie : l’entreprise TC Energy refuse toujours d’annuler le développement de l’oléoduc Keystone XL. Les communautés Amérindiennes, qui se battaient déjà contre le projet, craignent encore davantage les conséquences en pleine pandémie, à cause du processus local de construction : « À la lumière de l’épidémie (…) », le fait que des ouvriers « construisent et vivent dans ces campements constitue une menace grave et immédiate pour la santé et la sécurité publiques des tribus », indiquent ces dernières dans une nouvelle plainte.
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