À quoi ressembleront les villes du futur ? Pour le bien-être humain et économique, comme pour le climat, elles devront être vertes. Les « espaces verts », ou plutôt, de vrais espaces naturels qui n’auraient rien d’artificiel, seront la clé pour que ces villes puissent être vivables. Si le constat paraît presque évident si on pose la question du point de vue du moral des habitants, il s’avère également être de plus en plus un fait scientifique, une condition sine qua non que l’on puisse vivre, à proprement parler, dans ces villes.
Une étude espagnole parue ce 28 avril 2020 dans The Lancet Planetary Health en arrive à la conclusion qu’une plus large « canopée », entre autres espaces de verdure, a un impact direct sur la santé des citoyens et des citoyennes. Les auteurs prennent Philadelphie comme cas pratique, mais considèrent que leur méthodologique peut s’adapter à toutes les aires urbaines du monde. Ils basent leurs travaux sur les données statistiques rassemblées lors d’une précédente étude, parue en novembre 2019 dans la même revue scientifique.
Ce nouveau travail de recherche s’inscrit effectivement dans la continuité d’autres travaux autour de l’impact de la nature sur l’humanité. Entre autres publications, des scientifiques publiaient en mai 2019 une étude — basée sur 3 500 participants — montrant que les enfants qui grandissent dans des environnements naturels, et donc pas directement dans les villes, présentent moins de risques de soucis mentaux en grandissant, et une plus grande vitalité (niveau ressenti d’énergie).
Et si la nature sauvait des vies ?
Le travail que les scientifiques espagnols livrent dans The Lancet Planetary Health a le mérite d’être précisément chiffré, et de montrer que cela peut s’avérer être une question de vie ou de mort au sens littéral. Ils ont cherché à estimer le nombre de décès prématurés, toutes causes confondues, qui pourraient être évités par l’accroissement d’un environnement naturel au sein d’une ville. Ils ont procédé à différents scénarios d’extrapolation à partir des données en leur possession sur la ville de Philadelphie, à la fois sur la mortalité et sur la superficie des espaces verts actuels.
403 décès prématurés pourraient être évités chaque année
Le scénario le plus ambitieux est celui que la ville cherche actuellement à atteindre, à savoir que la couverture forestière totale de Philadelphie représente 30 % de l’aire urbaine d’ici 2025. Si cet objectif était rempli, alors d’après les chercheurs ce seraient 403 décès prématurés en moyenne qui pourraient être évités chaque année. Cela représente tout de même 3 % de la mortalité globale à Philadelphie. Même les scénarios les moins ambitieux resteraient positifs : si la canopée est portée à 5 % de la ville, cela mènerait à 271 décès en moins par an ; une augmentation jusqu’à 10 % permettrait d’éviter 376 décès chaque année.
« Bien que chaque ville ait ses propres caractéristiques, cette étude fournit un exemple pour toutes les villes du monde : de nombreuses vies peuvent être sauvées en augmentant les arbres et l’écologisation des environnements urbains, même à des niveaux modestes », écrit Mark Nieuwenhuijsen, le coordinateur de l’étude. « Les espaces verts augmentent la biodiversité et réduisent l’impact du changement climatique, rendant nos villes plus durables et plus vivables », ajoute le scientifique.
Une dimension économique et sociale
L’étude élargit son horizon aux champs économiques et sociaux. Car les auteurs ne se contentent pas de montrer que les espaces verts peuvent véritablement améliorer la santé et sauver des vies, ils expliquent qu’ils peuvent générer un bénéfice de 4 milliards de dollars.
L’autrice principale de l’étude, Michelle Kondo, ajoute à cela que le constat est clair : une majeure partie des décès prématurés qui peuvent être évités concernent les quartiers les plus pauvres de la ville : « Les programmes de reforestation urbaine ne sont pas seulement essentiels pour améliorer la santé publique, ils sont aussi une façon de réduire les inégalités dans la santé et de promouvoir une justice environnementale. »
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