La Food & Drug Administration, l’autorité américaine des aliments et des médicaments, se préparerait selon le New York Times à approuver en urgence un médicament contre Covid-19 : Remdesivir. Cette molécule est développée par Gilead, initialement contre Ebola, et fonctionne par le blocage du développement de l’ARN viral. Le médicament fait l’objet de nombreux tests cliniques sur le nouveau coronavirus SARS-CoV-2 depuis les débuts de la crise. L’un de ces essais, démarré le 21 février dernier, vient de livrer ses résultats préliminaires ce 29 avril 2020. Ils sont véritablement positifs, bien qu’il soit un peu tôt pour crier victoire.
Sur le site du NIH (National Institutes of Health), on peut lire que les patients impliqués, souffrant d’un stade avancé de Covid-19, ont guéri plus rapidement avec le Remdesivir que ceux auxquels du placebo a été administré. Il s’agit d’une étude randomisée, contrôlée, en double-aveugle, impliquant 1 063 patients venant de 47 lieux dans le monde — un format solide, donc, de recherche scientifique. En revanche, elle n’a pas encore été certifiée par un comité de lecture indépendant. Elle est, qui plus est, contredite par un travail précédent. Comment comprendre cette situation contradictoire ?
Ce que montre l’étude
Selon cette étude, la guérison à l’aide de Remdesivir serait 31 % plus rapide qu’en l’absence du médicament. Le temps de guérison des patients recevant le placebo était en effet de 15 jours, quand 11 jours ont suffi pour les patients traités au Remdesivir. Il y a également un impact sur la mortalité et, même faible, ce n’est pas négligeable : elle était de 11,6 % dans le groupe placebo et de 8 % dans le groupe Remdesivir.
Le directeur du NIH, Anthony Fauci, a déclaré à la presse que cette nouvelle étude prouve que cette molécule « a un effet net, significatif et positif ». Un chiffre de 31 % reste bien éloigné d’une efficacité entière de 90 à 100 %, mais, pour lui, il s’agit déjà d’une preuve que le médicament peut bloquer le coronavirus. De fait, le NIH indique qu’il étudie actuellement toutes les options avec le laboratoire Gilead pour mettre le médicament à disposition le plus rapidement possible dans de bonnes conditions.
Mais le remdesivir doit encore fait ses preuves
Ces informations sont clairement prometteuses, mais le problème de la crise sanitaire actuelle est qu’une bonne nouvelle vient pour l’instant avec ses limites, car il est souvent trop tôt pour considérer que toutes les preuves sont rassemblées.
En l’occurrence, le problème est qu’une étude chinoise publiée la semaine dernière avait conclu à une bien moindre efficacité de ce médicament. Cet essai, randomisé et contrôlé, semblait montrer que le Remdesivir n’accélère pas la guérison chez les patients atteints de Covid-19 — il n’y avait rien de significatif en matière d’efficacité, en somme. La publication des résultats avait d’ailleurs fait polémique, car diffusés trop tôt, par erreur via le site de l’OMS, obligeant Gilead à temporiser en avance sur la portée de ces mauvais résultats. Et il s’avère, en effet, que cette étude n’a pas une énorme portée car elle reste faible : l’essai ne portait que sur 237 patients et a été stoppé trop tôt par manque de patients éligibles.
Nous nous retrouvons donc avec deux études qui disent chacune l’inverse de l’autre. La première montre que le Remdesivir n’a pas de véritable efficacité, mais l’essai clinique derrière ce résultat est de faible portée. La seconde montre une efficacité significative, mais cet essai à lui seul ne suffit pas à lui seul à prouver réellement l’efficacité systématique de la molécule, d’autant qu’il n’a pas encore été « certifié » par les pairs. Malgré cette contradiction, la situation est plutôt positive, puisque la seconde étude est assez solide et, si une relecture par les pairs et de nouveaux résultats positifs s’en suivent rapidement, alors il y a des chances pour que la FDA l’homologue dans la foulée, faisant de Remdesivir le premier médicament pleinement approuvé contre Covid-19.
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