La recrudescence de maladies de Kawazaki chez les enfants serait bel et bien lié à la Covid-19, selon cette première étude « peer-reviewed » publiée dans The Lancet.

Depuis plusieurs semaines, les médecins pédiatres d’Europe et des États-Unis pointent une recrudescence de cas de la maladie de Kawazaki, une maladie infantile et probablement infectieuse. Elle provoque de la fièvre, des exanthèmes (éruptions cutanées), une inflammation des muqueuses, de la conjonctivite. Cette maladie est rare, raison pour laquelle l’augmentation actuelle, même légère, de nouveaux cas est notable. En France, ces dernières semaines, la Direction générale de la Santé a recensé 125 cas chez des enfants — c’est très peu, mais davantage que d’habitude.

Les infectiologues soupçonnent que cette recrudescence est reliée à la pandémie Covid-19. Les deux maladies sont en effet toutes deux inflammatoires de manière multi-systémique et ont des symptômes en commun, comme par exemple une fièvre prolongée ou un choc cytokinique — c’est-à-dire une surréaction du système immunitaire. La maladie infantile de Kawazaki, en raison de ce soupçon, fait l’objet d’une surveillance renforcée depuis que l’alerte a été donnée, et même si les cas restent peu nombreux. Le lien entre les deux reste hypothétique, mais une première étude révisée par les pairs renforce cette idée.

Rappelons que si les enfants sont bien moins à risque que les adultes face à Covid-19, ils doivent malgré tout respecter les mêmes gestes protecteurs, notamment car ils peuvent être porteurs asymptomatiques.

Les enfants doivent respecter les mêmes gestes protecteurs que les adultes. // Source : Pixabay

Les enfants doivent respecter les mêmes gestes protecteurs que les adultes.

Source : Pixabay

8 enfants positifs au coronavirus sur 10 hospitalisés

C’est dans la grande revue médicale The Lancet que l’on trouve cette étude, publiée le 13 mai 2020, qui se penche sur ce lien. L’analyse est fixée à Bergame, l’un des épicentres de Covid-19 en Italie. En temps normal, l’hôpital de la ville traite un enfant atteint par la maladie de Kawazaki tous les trois mois en moyenne. Entre le 18 février et le 20 avril 2020, en pleine vague épidémique, dix enfants ont été admis avec des symptômes de la maladie. C’est trente fois plus que d’habitude. Les chercheurs montrent que sur ces 10 enfants hospitalisés, 8 ont été testés positifs au nouveau coronavirus.

C’était un test sérologique : le dépistage a permis de constater rétrospectivement que les enfants avaient développé des anticorps contre la Covid-19. Mais ils ont été hospitalisés bel et bien pour des symptômes associés chez les enfants à la maladie de Kawazaki. Les deux enfants testés négatifs pourraient faire l’objet de faux-négatifs, précisent les auteurs, notamment car l’un d’entre eux a été traité aux immunoglobulines, ce qui pourrait masquer les anticorps développés contre le coronavirus.

Aucun des enfants dont parle l’étude n’est décédé — une maladie de Kawazaki bien traitée n’est que très rarement mortelle. Par contre, les auteurs relèvent que les symptômes de la maladie étaient globalement plus sévères que lors de cas antérieurs à la pandémie. Par exemple, 60 % d’entre eux ont développé des complications cardiaques ; contre un ratio 10 % en temps normal. Autre chiffre, la moitié des enfants ont subi un syndrome de choc toxique, alors qu’aucun des enfants traités avant février 2020 n’ont eu cette complication à l’hôpital de Bergame.

Une « pseudo-maladie de Kawazaki »

« Notre étude fournit les premières preuves solides d’un lien entre l’infection par le SARS-CoV-2 et cette infection inflammatoire [la maladie de Kawazaki], et nous espérons qu’elle aidera les médecins du monde entier dans leur lutte contre ce virus encore peu connu », écrit l’un des auteurs dans un commentaire de l’étude.

Ils rappellent que leur travail de recherche se base sur un faible nombre de cas et qu’il faut des études ultérieures, dans d’autres foyers, mais ils insistent toutefois pour qu’une différence soit d’ores et déjà faite entre ce qu’il se passe aujourd’hui et les cas pré-pandémiques. Il faudrait parler, selon eux, d’une « pseudo-maladie de Kawazaki » (Kawazki-like disease), et non d’une « maladie de Kawazaki », en raison des différences notables dans les symptômes et les causes. Le ministre de la Santé Olivier Véran avait adopté la même terminologie sur le sujet.

L’existence potentielle de ce lien ne change cela dit rien au fait que les enfants restent moins exposés à des formes symptomatiques et/ou sévères de Covid-19. Cette recrudescence de maladies de Kawazaki ou pseudo-maladies de Kawazaki se traduit encore, même en cette période, par une rareté des cas. Par ailleurs, cette maladie, même la forme plus sévère possiblement aggravée par le coronavirus, n’est quasiment jamais mortelle lorsqu’elle est traitée.

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