Le coronavirus SARS-CoV-2 pourrait avoir des similitudes avec des coronavirus habituels, plus proches des rhumes hivernaux… et ainsi déclencher une immunité croisée. L’hypothèse doit encore être confirmée.

À court ou moyen terme, l’immunité collective n’est pas une solution contre la maladie Covid-19. D’après les données de l’Institut Pasteur, le 11 mai dernier il n’y aurait que 4,4 % de la population à avoir été immunisée contre le coronavirus SARS-CoV-2. Même des épidémiologistes dressant des scénarios d’avenir sur la pandémie à l’échelle mondiale excluent tout simplement l’immunité collective de l’équation. Le fait est que, tout en déclenchant une crise sanitaire, la maladie Covid-19 touche malgré tout une proportion des populations bien en-deçà des 50-60 % requis pour qu’une immunité de groupe porte ses effets.

Depuis quelques jours, un nouveau terme émerge dans les discussions : l’immunité croisée. Une étude américaine a été publiée sur le sujet dans la revue scientifique Cell, en mai 2020. Alors que les auteurs voulaient à l’origine évaluer la réponse immunitaire chez les patients convalescents, ils ont découvert, dans le groupe de contrôle (non-infecté par le coronavirus), que 40 et 60 % d’entre eux étaient déjà immunisés contre le coronavirus. Ils portaient en eux des lymphocytes T adaptées à une défense contre la maladie Covid-19, sans pourtant n’avoir jamais été infectés. Ce résultat appliqué à grande échelle, cela voudrait dire qu’une « immunité croisée » rendrait plus de la moitié de la population déjà immunisée contre ce coronavirus. Comment serait-ce possible ? Qu’est-ce que cette immunité croisée ?

 

Il existe déjà d'autres types de coronavirus, aptes notamment à déclencher des rhumes. Ils pourraient avoir une structure proche de SARS-CoV-2 et donc être à l'origine d'une possible immunité croisée. // Source : Pixabay

Il existe déjà d'autres types de coronavirus, aptes notamment à déclencher des rhumes. Ils pourraient avoir une structure proche de SARS-CoV-2 et donc être à l'origine d'une possible immunité croisée.

Source : Pixabay

D’autres coronavirus similaires provoquent de simples rhumes

L’immunité est un mécanisme de défense, comme une sorte de bouclier. Tous les êtres vivants ont un système immunitaire inné, en guise de défense de base contre les attaques d’agents infectieux. À cette première barrière, s’ajoute ensuite, chez les vertébrés, le système immunitaire adaptatif, qui relève en quelques sortes d’une immunité acquise avec le temps. Lorsque le système immunitaire inné détecte un agent infectieux nouveau, le système immunitaire adaptatif produit la réponse adaptée. Les cellules spécifiques que sont les lymphocytes T et B vont détruire les protéines produites par le pathogène. Un mécanisme de mémoire dans cette défense fait que lorsqu’un agent infectieux a déjà attaqué le corps, celui-ci est déjà préparé à le combattre. On devient alors immunisé, grâce à des anticorps contre ce pathogène.

Si l’on parle d’immunité collective concernant le nouveau coronavirus, c’est parce qu’à un certain moment, dans un population, à force que le pathogène ait circulé, une grande partie de la population a été infectée. De fait, chez chacune des personnes concernées, le système immunitaire est préparé à produire la réponse adéquate pour empêcher l’agent infectieux de contaminer le corps. L’immunité collective se développe donc a posteriori d’une infection. L’immunité croisée, en revanche, est une protection a priori : sans même avoir été infecté par l’agent infectieux spécifique qu’est le coronavirus, le système immunitaire est déjà préparé, connaît déjà la bonne réponse, et l’infection du corps n’aura pas lieu, puisque les lymphocytes détruiront les protéines avant qu’elles n’agissent.

Pour que ce soit possible, cela signifie qu’il y a de fortes similitudes entre des coronavirus qui vous ont déjà infectés, et le nouveau. « Nous avons détecté des cellules lymphocytes T auxiliaires réactives au SARS-CoV-2 dans ~40-60 % des individus non-exposés, suggérant qu’il y a une reconnaissance en immunité croisée des lymphocytes T entre les coronavirus hivernaux habituels et SARS-CoV-2 », écrivent les auteurs de l’étude parue dans Cell. Il s’avère effectivement que, même s’il est devenu courant de parler « du coronavirus » pour désigner la pandémie actuelle, cette catégorie virologue est courante. Les coronavirus humains habituels (229E, OC43, HKU1…) déclenchent ces rhumes que l’on a pendant l’hiver.

Ce serait un signal positif pour un vaccin efficace

Cette approche pourrait fournir des réponses à la diversité des formes que la prend la maladie. Des personnes dont le système immunitaire est préparé avec une immunité croisée ont déjà une défense élevée face à la maladie Covid-19, ce qui la rend l’infection peu grave voire tout à fait bénigne. Ce serait également une bonne nouvelle pour la vaccination : « les personnes qui ont une immunité croisée vont répondre mieux et plus vite au vaccin », expliquent les auteurs au Scientific American.

Attention toutefois à ne pas en tirer de conclusions hâtives. Comme une bonne partie de la recherche médicale à ce jour concernant la structure du coronavirus SARS-CoV-2 et la maladie qui en résulte, il s’agit de travaux en cours, qui demandent à être corrélés par d’autres études. Le faisceau de preuves n’est pas encore complet.

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