C’est lors du grand entretien matinal de France Inter, ce vendredi 5 juin 2020, que Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, a déclaré concernant la France qu’« on peut dire que raisonnablement l’épidémie est contrôlée, le virus continue à circuler, notamment dans certaines régions, il circule à une petite vitesse. » Une déclaration qui intervient quatre semaine après la sortie de confinement. Cela ne signifie pas que l’épidémie de la maladie Covid-19 est derrière nous, au contraire, cela veut dire que tout se joue encore maintenant, plus que jamais. Explications.
À l’heure actuelle, que ce soit en France ou à l’échelle mondiale, aucune certitude n’est possible sur l’avenir de la pandémie. Seuls différents scénarios peuvent être construits à partir de la forme que prendraient certaines variables. C’est par exemple que les épidémiologistes de l’université du Minnesota ont bâti 3 scénarios pour le futur de Covid-19 à l’échelle mondiale. Pour la France précisément, 4 scénarios ont été dessinés par le Conseil scientifique, dans son nouvel avis diffusé le 4 juin 2020 :
- 1) Une épidémie sous contrôle : « Ce scénario repose sur l’hypothèse que la stratégie de contrôle préconisée dans l’avis 6 (mesures barrières, testing et contact tracing) est appliquée et maintenue pendant un temps suffisamment long après le confinement. »
- 2) Une reprise locale de l’épidémie avec la ré-émergence de foyers : « Ce scénario indique une circulation active, mais localisée du virus. Afin d’éviter une reprise de l’épidémie au niveau national ces clusters doivent être maîtrisés par des mesures importantes et précoces. »
- 3) Une reprise diffuse, en bruit de fond : « Cette reprise de l’épidémie traduit plutôt un relâchement des mesures de contrôle de la circulation du virus par la population permettant une reprise active de la transmission du virus et de façon diffuse. A cette situation de départ, vient s’ajouter la reprise progressive des déplacements interrégionaux favorisant la dissémination du virus. »
- 4) Un nouveau stade critique : « Dans ce scénario, les efforts pour stopper la reprise de l’épidémie (scénario 3) ont échoué. Le nombre de cas continue d’augmenter et on arrive au ‘moment critique’ où, toutes les autres approches ayant échoué, les autorités doivent décider si elles souhaitent instaurer un deuxième confinement pour éviter le débordement des services de réanimation. »
De l’incertitude des scénarios
Le Conseil scientifique indiquait dans son rapport que le scénario 1 reste celui qui se dessine le plus favorablement. Il précisait cela dit que le deuxième scénario, d’une reprise localisée dans certains foyers, reste très probable également, au regard des secondes vagues en Allemagne et en Asie dans les périodes d’après-confinement.
Les épidémiologistes ne peuvent de toute façon pas donner de réponse définitive sur l’existence d’une seconde vague en France, ni sur son éventuelle intensité. Comme nous l’expliquions dans un article sur le sujet en mai, les études scientifiques montrent qu’il existe certaines variables pertinentes à surveiller, et que la suite des événements dépend de ces facteurs. Parmi eux, il y a notamment le choix gouvernemental des mesures adoptées dans chaque pays, l’étendue de leur respect dans la population, et sur quelle échelle de temps.
« Maintenant, les soignants, c’est vous »
C’est bien pour cette raison que Jean-François Delfraissy a tenu à rappeler que le coronavirus SARS-CoV-2 continue de circuler sur le territoire. Même en l’absence de vague, il est présent. Quand une épidémie est sous contrôle, cela signifie que l’absence de nouvelle vague dépend entièrement de la persistance et de l’étendue de ce fameux contrôle.
« On se relâche un peu, c’est humain, le tout est qu’on ne se relâche pas trop. Maintenant les soignants c’est vous, vous êtes vos propres soignants », a ajouté Jean-François Delfraissy sur France Inter. Un message clair : toutes les mesures de prudence, de la distanciation physique de 2 mètres en passant par le port du masque, la moindre utilisation des transports, le maintien autant que possible du télétravail, le lavage des mains au savon ou au gel hydroalcoolique, sont autant de pratiques qui doivent être maintenues dans leur ensemble pour lutter contre l’épidémie.
Une épidémie sous contrôle est donc une épidémie envers laquelle on maintient les mêmes règles qu’en période de pic. Deuxième enseignement à tirer de cette déclaration de Jean-François Delfraissy : le scénario d’une reprise à l’automne n’est pas exclu. Parmi les scénarios mondiaux dressés par les épidémiologistes du Minnesota, il y avait un avenir où la pandémie se calmait à l’été, puis une deuxième vague élevée advenait à la rentrée. Une possibilité confirmée par Jean-François Delfraissy, qui indique que 8 pandémies sur 10 régressent dans l’été puis 5 sur 10 repartent à l’automne.
Cela ne signifie pas qu’il faut exclure la thèse d’une absence de regain de l’épidémie, scénario où le coronavirus resterait en toile de fond (jusqu’à un vaccin) sans jamais redéclencher de pic. Il est important de garder ce scénario optimiste en tête pour ne pas tomber dans un pessimisme irrationnel, mais la raison scientifique et la sûreté humaine appellent aussi à se préparer au pire. S’il y a bien une chose sur laquelle tous les épidémiologistes se rejoignent, que ce soit Jean-François Delfraissy ou les différentes études publiées jusqu’à maintenant, c’est que les gouvernements doivent avoir un plan concret d’action pour être prêt en cas de nouveau pic, tout comme les citoyens et citoyennes doivent conserver leur vigilance.
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