Vous vous souvenez peut-être du jeu 2048, qui avait connu un beau succès il y a une demi-douzaine d’années. Dans une grille de quatre cases par quatre, le but du jeu est de faire apparaître la tuile 2048 en fusionnant des tuiles affichant la même valeur, via des mouvements horizontaux ou verticaux. Simple sur le papier, l’exécution demande toutefois un peu d’anticipation pour ne pas se faire bloquer.
Sa grande simplicité avait d’ailleurs donné lieu à une ribambelle de déclinaisons (2048 étant lui-même dérivé de 1024, un jeu mobile conçu par le studio Veewo) : Flappy2048 par exemple s’inspire du jeu Flappy Birds, avec des tuiles soumises à la gravité. LHC mettait en scène les particules, tandis que Doge2048 jouait sur le mème Doge, qui consiste à utiliser des photos de chiens de race Shiba avec un texte en Comic Sans MS. Pour les très motivés, il existe aussi des versions très dures ou, à l’inverse, si vous avez un poil dans la main, des résolveurs automatiques.
Encore aujourd’hui, 2048 continue d’inspirer le développement d’alternatives. Il existe ainsi une version jouant avec les entrées du tableau périodique des éléments, baptisée Fe[26]. Vous démarrez avec deux tuiles d’hydrogène, l’élément chimique le plus simple dans l’univers puisqu’il ne se compose que d’un proton et d’un électron, et le but est d’obtenir la tuile de fer, et ses 26 protons et 30 neutrons.
Le fer signe la fin de vie des étoiles
Pourquoi d’ailleurs le jeu se limite-t-il aux éléments allant de l’hydrogène au fer, sans aller plus loin dans le tableau périodique ?
Parce qu’il s’agit de reproduire le fonctionnement interne d’une étoile. Au cours de sa vie, un astre synthétise des éléments chimiques de plus en plus lourds (hydrogène, hélium, carbone, oxygène, néon, etc.). Mais quand arrive le moment de la production de fer, alors l’étoile est vouée à disparaître, soit en se contractant jusqu’à une naine blanche, si l’étoile est peu massive, soit en implosant en supernova et donner lieu à une étoile à neutrons ou bien à un trou noir, selon ses caractéristiques.
C’est ce qu’explique l’astronome canadien Jean-René Roy dans son ouvrage L’astronomie et son histoire.
Quand l’ère du fer arrive dans le cœur d’une étoile, elle « fait alors face à un cul-de-sac irréversible, une crise de l’énergie sans issue, car le fer est un cas très spécial : sa fusion ne peut produire de l’énergie ; au contraire, elle en demande ! ». L’effondrement peut alors débuter, car l’équilibre entre la gravité exercée par l’étoile et l’énergie libérée par la fusion nucléaire commence à être rompu.
Il poursuit : « cette crise prend son origine dans le fait que l’énergie de liaison par nucléon (proton ou neutron) du noyau de fer est telle qu’il faut fournir de l’énergie pour produire des réactions de fusion, contrairement aux éléments moins lourds. […] Cette situation a des conséquences catastrophiques pour l’étoile. Au lieu de libérer de l’énergie, le fer et les quelques éléments de son groupe tendent à éteindre la fournaise intérieure de l’étoile. […] ».
Voilà pourquoi la fusion s’arrête et, donc, la raison de la fin de partie de [Fe]26.
Fusions et décompositions
Développé par Dimitar Dimitrov et Kevin O’Connor, le jeu a néanmoins une petite subtilité : il y a certes des fusions qui s’opèrent à travers le jeu, comme toute bonne nucléosynthèse qui se respecte, mais des décompositions peuvent aussi survenir : le béryllium devient de l’hélium, le néon en oxygène, et l’isotope du Fer 52 (52Fe) se dégrade en chrome. Or, il vous faut viser l’isotope du Fer 56 ( 56Fe,). Vous suivez ?
Si vous ne vous en sortez pas, une astrophysicienne a prodigué quelques conseils à une internaute un peu larguée :
« Le béryllium va se décomposer en hélium 4, ajoute 3 hélium 4 pour obtenir du carbone, ajoute de l’hélium 4 pour obtenir de l’oxygène, puis fusionne les tuiles d’oxygène pour obtenir du silicium, ce sont alors des additions jusqu’au nickel 56 qui va ensuite se décomposer en Fer 56. Mais évite le magnésium, c’est un poison pour la fusion ! », a glissé une astrophysiciennne à une internaute un peu larguée, en guise de conseil.
En ce qui nous concerne, nos deux premières tentatives à Fe[26] se sont pour ainsi dire égarées dans les fusions d’isotopes différents. Malgré la mise en garde sur le magnésium, il n’a pas été possible de l’éviter, ce qui a abouti à des « tuiles mortes » dans la grille, ce qui a entravé notre nucléosynthèse et abouti en bout de course à l’arrêt des activités de notre étoile, faute de carburant.
Si fusionner des trucs vous plaît, on ne saurait trop vous conseiller de jeter un œil sur un autre jeu, mobile cette fois, appelé Atomas. On vous en avait parlé il y a quelques années : pas de grille ici, mais un cercle, où des éléments doivent également être fusionnés pour en faire apparaître de plus complexes. Une manière ludique de réviser les éléments du tableau de Mendeleïev.
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