L’un des plus grands enjeux de la pandémie causée par la maladie Covid-19 est la façon que l’on a d’interpréter les données. Un graphique ou des chiffres ne sont pas forcément parlants s’ils sont mal compris. De même, ces informations peuvent être incomplètes. Raison pour laquelle l’épidémiologiste française Catherine Hill nous alerte sur une approche qu’elle estime trop partielle scientifiquement : l’accent mis sur les foyers de l’épidémie. « Il ne faut pas inverser la cause et la conséquence », nous dit-elle, car les foyers ne sont qu’un symptôme identifié d’une diffusion plus large.
Le dernier rapport de Santé Publique France pointe une série de foyers (ou clusters) où surviennent le plus de cas de l’épidémie : établissements de santé, entreprises privées et publiques, rassemblements familiaux, en tête de liste. Dans le Finistère, où le taux de reproduction du virus inquiète les autorités, 11 foyers épidémiques ont été recensés, en pointant essentiellement du doigt les fêtes de famille.
La fixation sur les foyers : une erreur ?
S’il est vrai que dans ces configurations rapprochées, où l’on baisse la garde, sont particulièrement propices aux contaminations, Catherine Hill nous explique que ce n’est pas de cette façon qu’il faut analyser la propagation de l’épidémie. « Les foyers ne représentent que la partie la mieux identifiée de la circulation du virus », affirme-t-elle à Numerama. « Cette fixation sur les foyers est une grave erreur », car ils ne sont que « la partie émergée de l’iceberg ».
Un foyer se définit par la survenance d’au moins 3 cas confirmés ou probables, au sein d’une même communauté ou d’un rassemblement temporaire. De fait, cette forte concentration dans un milieu souvent fermé (famille, établissement…) génère des personnes contaminées facilement identifiables. Cela ne signifie pas pour autant que ces foyers sont en soi la cause de la circulation du virus : les personnes contagieuses qui se déplacent, hors des foyers, ont un rôle plus important encore dans l’épidémie selon Catherine Hill. « Une personne contagieuse qui se déplace va contaminer des personnes qui n’auront pas de liens apparents entre elles et ces contaminations n’apparaîtront pas comme un foyer. »
« Le virus circule via les personnes asymptomatiques », ajoute-t-elle. La maladie Covid-19 peut effectivement être contagieuse même avant et en l’absence de symptômes. Les incertitudes perdurent sur le nombre de personnes asymptomatiques et sur le ratio de contamination par ce biais. Mais ce qui est de plus en plus acté par un continuum de travaux scientifiques, c’est qu’une partie importante de l’épidémie se fait de manière silencieuse, via cette transmission asympatomatique.
Un appel au dépistage massif
Si Catherine Hill tient à attirer l’attention sur ce sujet, c’est parce que l’attention que l’on porte aux foyers est selon elle symbolique d’une mauvaise façon de surveiller et de contenir l’épidémie. Son appel d’épidémiologiste : dépister massivement la population à l’aide de tests PCR. C’est le meilleur moyen, explique-t-elle, de contrôler réellement la situation, alors qu’à l’heure actuelle « tout est sous-estimé ».
« C’est grâce au dépistage de deux millions de personnes que la Chine a repris le contrôle en évitant la survenance d’une deuxième vague », illustre-t-elle. En France, fin juin 2020, le ministre de la Santé a annoncé qu’un dépistage systématique va être expérimenté dans des zones à risque d’Ile-de-France, ce qui concernera 1,3 million de personnes. Reste toutefois la question des capacités humaines pour tester les gens : en plein été, les laboratoires, notamment parisiens, croulent actuellement sous les demandes de rendez-vous, et de nombreuses personnes rapportent avoir du mal à en obtenir.
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