Un navire japonais s’est échoué au large de l’île Maurice, déversant des tonnes d’hydrocarbures dans l’eau. Des volontaires essayent de contenir les coulées, mais le vraquier menace de se briser. Voici ce qu’il faut savoir sur cette catastrophe.

« Nous sommes dans une situation de crise environnementale », a déclaré à la presse le Premier ministre de l’île Maurice Pravind Jugnauth ce weekend du 8 août 2020. Le navire japonais MV Wakashio s’est échoué sur un récif sur la côte sud-est de l’île, fin juillet, pour une raison encore non confirmée. L’équipage a pu être évacué en toute sécurité. En revanche, dans sa cale, le vraquier contenait près de 4 000 tonnes d’hydrocarbures. En s’écoulant de la coque, le fioul a déclenché une marée noire. C’est une catastrophe écologique, dans une zone précieuse et protégée.

Les autorités mauriciennes ont demandé à ce que le public, dont les pêcheurs, ne s’approche pas des lieux. Après avoir espéré contenir la situation fin juillet, le gouvernement en a finalement appelé à une aide de la France. « Le naufrage du Wakashio représente un danger pour l’île Maurice. Notre pays n’a pas les compétences et l’expertise pour le renflouage des navires échoués, c’est ainsi que j’ai sollicité l’aide de la France à Emmanuel Macron », a écrit le Premier ministre mauricien. Le Japon a également envoyé des experts pour travailler aux côtés des équipes françaises et mauriciennes.

L'écoulement d'hydrocarbures est visible en quelques jours. // Source : Directorate-General for Defence Industry and Space

L'écoulement d'hydrocarbures est visible en quelques jours.

Source : Directorate-General for Defence Industry and Space

La biodiversité en danger

Le navire Wakashio s’est échoué à Pointe d’Esny, un lieu particulièrement sensible écologiquement puisque le parc marin de Blue Bay se trouve non loin. Or, le site est classé dans la convention Ramsar, qui reconnaît des « zones humides d’importance internationale ». On y trouve en effet une biodiversité abondante, riche, notamment en poissons, tortues et en coraux rares, dont des espèces vulnérables et des spécimens coralliens géants vieux d’un millénaire.

« Des milliers d’espèces autour des lagons vierges de Blue Bay, Pointe d’Esny et de Mahebourg risquent de se noyer dans une mer de pollution, avec des conséquences désastreuses pour l’économie, la sécurité alimentaire et la santé de l’île Maurice », s’est inquiété Greenpeace Africa. Même son de cloche parmi les associations locales, comme Eco-Sud, qui explique que le risque est « énorme pour toute la réserve de pêche, pour toute la côte est » et affirme que « ce sera une catastrophe ». Le président français Emmanuel Macron a également rappelé dans un tweet que « la biodiversité est en péril » et qu’il y a « urgence d’agir ».

Dans les médias mauriciens locaux, on s’étonne de la multiplication des affaires similaires dans la région. En 2016, un autre vraquier a chaviré près de l’île Maurice, le MV Benita, un pétrolier libérien. «Il y a une défaillance dans le système de surveillance maritime. C’est extrêmement grave. On annonce un Oil Spill Management Plan, mais c’est l’action qui compte. Il y avait eu d’énormes dégâts avec Benita. Les pêcheurs ont beaucoup souffert», dénonce l’écologiste Yan Hookoomsing auprès de L’Express Mauricien. Sans compter qu’à Blue Bay même, il y a quelques mois, en février 2020, il y a eu une pollution conséquente avec des eaux usées qui se sont écoulées dans le lagon.

Une mobilisation citoyenne écologique

Sur place, en tout cas, les volontaires se mobilisent, par centaines. La mission : disposer un maximum de barrages en chanvre et en tissu, afin de dresser de contenir au maximum les coulées d’hydrocarbures. Pendant ce temps, d’autres volontaires, couverts de liquide noir, mais heureusement vêtus de combinaisons, de masques et de gants en caoutchouc, car directement exposés au liquide toxique, récupèrent dans des seaux les produits déversés dans l’eau.

La situation est en partie sous contrôle à l’heure actuelle, la fuite ayant été bloquée avec succès dimanche soir. Mais ce n’est qu’un répit temporaire. Les fissures sont toujours là et le risque est que le navire se brise en deux, ce qui aggravait la catastrophe écologique. Les images satellites montrent également que, si une partie des coulées a pu être circonscrite, une autre partie est déjà en déplacement vers d’autres côtes, en raison des vents et des marées. Des dégâts écologiques sont donc malheureusement inévitables, même s’il est encore possible de les limiter.

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