Après une légère et courte « pause » le temps de l’été, l’inquiétude renaît au sujet d’une deuxième vague française dans le cadre de l’épidémie causée par le coronavirus SARS-CoV-2. Paris et les Bouche-du-Rhône passent en « circulation active du virus », et l’épidémie connaît globalement une tendance à la hausse sur le territoire, la progression était au plus haut depuis la fin du confinement. Ce weekend du 15 août, les données présentées étaient de 3 310 nouveaux cas samedi et 3 015 dimanche.
Mais que nous révèlent au juste ces chiffres, alors même que la tendance dans les hôpitaux semble quant à elle au reflux (les hôpitaux ont une activité relativement « normale » par rapport aux débuts de la première vague) ?
L’activité épidémique augmente
Pour Guillaume Rozier, data scientist, fondateur de CovidTracker, « l’activité épidémique augmente, c’est indiscutable ». Ce n’est pas vraiment les chiffres journaliers qui le montrent, puisqu’ils sont soumis à des retards et décalages. Le plus pertinent, rappelle le data scientist, est de regarder le taux de positivité, c’est-à-dire la proportion de tests positifs à l’échelle de tous les tests effectués. Et justement, « ce taux augmente très fortement depuis une à deux semaines (actuellement 2,6%), ce qui montre une augmentation nette de l’activité épidémique », nous explique-t-il. En clair, pour un même nombre de dépistages réalisés, les résultats positifs sont supérieurs à ceux d’il y a quelques semaines, et c’est cela qui dénote une hausse de l’activité.
Pour autant, le système hospitalier semble aller bien. On est bien loin d’une saturation ou d’un début de saturation, comme nous l’ont confirmé des médecins en hôpitaux. Le coronavirus continue à provoquer des décès, mais la courbe « s’aplatit » et, même si de nouveaux patients sont admis en réanimation, les services de réanimation continuent dans l’ensemble à se vider dans de nombreux établissements.
Guillaume Rozier indique à Numerama que la deuxième vague est pour l’instant scindée en deux éléments d’analyse : « D’un côté la deuxième vague épidémique est probablement là, d’un autre on n’observe pas de vague ‘sanitaire’. » La deuxième vague tant redoutée apparaît donc à l’heure actuelle de manière partielle : le nombre de contaminations est croissant, mais la tendance se traduit ces dernières semaines par peu de cas graves.
Comment expliquer cette « scission » actuelle de l’épidémie ?
Une transition des jeunes vers les plus âgés
L’absence de nouvelle crise sanitaire depuis fin juillet / début août, malgré la reprise de l’épidémie, est probablement à trouver dans la tranche d’âge des cas positifs, à savoir une « écrasante majorité des 20-35 ans » nous rappelle Guillaume Rozier. Les formes sévères de la maladie Covid-19 ne sont pas absentes chez les jeunes, mais restent rares à l’échelle des contaminations. Cette situation est toutefois soumise à évolution : « Mais les cas vieillissent semaine après semaine. L’augmentation dans les hôpitaux me semble inévitable dans les prochaines semaines. »
L’évolution est d’ailleurs déjà en route, relève le data scientist, avec davantage de cas chez des personnes plus âgées. Les rapports hebdomadaires de Santé Publique France mettent en avance une augmentation de la tranche d’âge. Le rapport du 30 juillet 2020 s’en tenait à montrer une augmentation de l’incidence sur les 20-30 ans, quand celui du 13 août relevait une augmentation des hospitalisations chez les moins de 40 ans (et du taux d’incidence sur les 25-35 ans).
« C’est ce qu’il s’est passé en Floride il y a quelques semaines », illustre Guillaume Rozier. « « Vague épidémique chez les jeunes -> propagation vers les personnes plus âgées -> vague sanitaire. »
Guillaume Rozier a comparé les données de la Floride avec celles, récentes, de la France. Les « heatmaps » (ci-dessus, cartes représentant les données statistiques par des cases thermiques) montrent clairement la façon dont, en Floride, la vague a démarré chez les plus jeunes avant de se propager chez les plus âgés. « On commence à voir le triangle se dessiner aussi » pour la France, interprète le data scientist (attention : le graphique pour la Floride utilise une case pour une semaine, celui pour la France une case pour un jour, la représentation étant axée sur une période plus courte).
Les données statistiques, en cette mi-août 2020, révèlent donc bien une reprise de l’épidémie en France, mais aussi que celle-ci est davantage maîtrisable d’un point de vue sanitaire. Que les hôpitaux se vident ne doit pas voiler l’urgence de la situation : les mesures de précaution et la vigilance ne peuvent pas faiblir.
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