Dans une expérience, des cellules vivantes ont été mises à l’épreuve pour résoudre des labyrinthes. Elles ont réussi à trouver leur chemin grâce à un phénomène chimique : la chimiotaxie.

Des cellules vivantes peuvent-elles se repérer dans un labyrinthe ? Trouver la sortie tout en évitant les impasses ? La réponse est oui : c’est exactement ce qu’on fait des amibes, des micro-organismes, dans une expérience dont les résultats sont publiés ce 28 août 2020 dans Science.

Qui plus est, ces amibes ne se sont pas dépêtrées de n’importe quels labyrinthes. Leur niveau de difficulté allait de facile à très difficile. L’un d’entre eux était celui de Hampton Court, l’un des plus célèbres au monde. Il avait été conçu pour le roi Henri VIII, dont c’était l’un des divertissements préférés : il fallait environ 20 minutes pour atteindre le centre. Évidemment, les amibes n’ont pas parcouru le véritable labyrinthe végétal du roi, mais une reproduction microscopique.

Leur stratégie repose sur un phénomène chimique : la chimiotaxie.

Elles peuvent « voir dans les coins »

Il se trouve que les cellules vivantes de notre corps doivent déjà, constamment, résoudre un labyrinthe au quotidien : notre corps. Les globules blancs utilisent la chimiotaxie pour repérer et attaquer les infections. Les spermatozoïdes repèrent les œufs à féconder par chimiotaxie. Ce phénomène chimique est ce qui permet à toutes ces cellules corporelles de se repérer et d’accomplir leur tâche, à partir des éléments chimiques présents dans leur environnement : cela fonctionne par attraction / répulsion. La présence ou l’absence de tel composé chimique et sa teneur vont orienter la cellule pour qu’elle aille dans telle ou telle direction.

Les amibes ont pu se repérer dans toutes sortes de labyrinthes. // Source : Tweedy & al. / Science

Les amibes ont pu se repérer dans toutes sortes de labyrinthes.

Source : Tweedy & al. / Science

En l’occurrence, les auteurs de l’expérience publiée dans Science se sont concentrés sur la capacité de ces micro-organismes à autoproduire des composés chimiques pour tracer leur chemin. Car c’est ainsi qu’ils ont pu se repérer avec une grande efficacité dans les labyrinthes miniatures, sans même passer par des impasses. « Les cellules n’attendent pas que vous leur disiez quoi faire, confie Robert Insall, auteur de l’étude, à LiveScience. En libérant des composés chimiques en face d’elles, elles savent quelles branches du labyrinthe mènent à des impasses et lesquelles mènent à la sortie. C’est vraiment incroyable. »

Les amibes sont, comme tout être vivant, attirées par certaines choses. Pour elles, c’est une solution appelée adénosine monophosphate : elles iront là où il y en a le plus. Les scientifiques en ont donc injecté dans les branches des labyrinthes miniatures. En libérant leur propre substance, les amibes savent par chimiotaxie quelle proportion d’adénosine monophosphate les attend : or, quand il y a une impasse, la concentration est moins élevée. Elles n’ont même pas besoin d’emprunter la branche pour faire le choix de changer de direction. « Elles peuvent vraiment voir dans les coins », illustre l’auteur de l’étude.

C’est donc ainsi que les cellules ont pu résoudre ces labyrinthes, sans se tromper une seule fois — une belle illustration de la mécanique bien huilée du vivant, puisque la capacité des cellules à effectuer leurs tâches efficacement est déterminante dans le bon fonctionnement du corps humain, entre autres. Le seul labyrinthe à s’être joué des amibes est celui de Traquair : bien qu’elles arrivaient à trouver leur route, il était trop long à résoudre, et les amibes mourraient avant d’avoir pu atteindre la sortie.

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