Plus rien ne devrait nous surprendre de la part de l’animal le plus apte à potentiellement survivre sur la Lune sans protection artificielle. Les tardigrades sont extrémophiles : là où tant d’êtres vivants ne tiendraient pas, ils résistent sans problème. Ils peuvent ainsi survivre à des températures extrêmes et à l’absence d’oxygène. On savait déjà qu’une sorte de bouclier leur permet de contrecarrer les radiations, mais des biologistes viennent de découvrir une espèce ayant la capacité de survivre à des doses létales de radiations UV grâce à un mécanisme encore jamais vu chez les tardigrades.
Pour résister aux radiations, les scientifiques avaient déjà identifié l’ingrédient clé du bouclier des tardigrades : la protéine Dsup. Celle-ci, nommée ainsi pour damage suppressor (suppression des dommages), protège leur code génétique d’être endommagé. Dans leur papier de recherche publié dans les Biology Letters le 14 octobre 2020, une équipe de chercheurs indiens met au jour une nouvelle espèce de tardigrade, dont la technique de protection est différente : c’est la fluorescence.
Les tardigrades étudiés appartiennent à la classe Eutardigrada. Il en existe plus de 700 espèces, et celle-ci est donc une nouvelle à ajouter à ces quelques centaines.
La fluorescence les protège
Les chercheurs ont prélevé des tardigrades sur de la mousse verte poussant sur des murs de béton, dans la ville de Bangolore, en Inde. Puis ils les ont exposé à une lampe germicide, un équipement qui permet de tuer de nombreux pathogènes en émettant une lumière ultraviolette. Les tardigrades sujets à l’expérience ont été soumis, via cette lampe, à des doses théoriquement mortelles de radiations ultraviolettes. Leur réaction ? Briller. Ils émettent en effet une lumière bleutée dans ces conditions.
« Nous montrons que la fluorescence génère une tolérance aux radiations UV létales », chez ces tardigrades, écrivent les auteurs. Car les autres tardigrades ainsi que les vers (nématodes) également présents ne s’en sont quant à eux pas sortis. Il est probable que la lumière bleue émise par cette autofluorescence permette de renvoyer les rayons, et donc d’atténuer le nombre de radiations atteignant l’organisme. Les chercheurs ont pu extraire la substance fluorescente, afin d’y plonger une espèce de tardigrade sensible aux UV ainsi que des nématodes. Résultat : leur résistance aux radiations s’est accrue. Les chercheurs décrivent ce mécanisme comme « remarquable ».
« Cela fournit la démonstration expérimentale directe de la photoprotection par fluorescence », ajoutent les auteurs. Quant à la raison d’être de ce boucler fluorescent, ils estiment qu’il s’agit d’une mutation évolutive, pour adapter l’organisme des tardigrades locaux aux très hautes radiations UV de cette région, l’Inde du Sud. Ce n’est pas la première fois que l’on constate une capacité adaptative importante de la part de cette espèce. Leur bouclier quasi imparable, rendant leurs différentes espèces extrémophiles, provient de leurs habitats terrestres faits de mousse : lorsqu’elle s’assèche, elle produit des radicaux hydroxyles (atomes générés par les rayons X), contre lesquels il faut donc se protéger pour survivre.
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