Le jour J est arrivé. Dans la nuit du mardi 20 au mercredi 21 octobre 2020, la mission OSIRIS-REx va tenter pour la première fois de toucher l’astéroïde Bennu. Objectif : récolter un échantillon de l’astre, pour l’analyser ensuite sur Terre. Si la mission réussit, ce sera important pour la Nasa, car jamais les États-Unis n’ont encore ramené d’échantillons d’astéroïdes collectés dans l’espace jusque sur la Terre.
Pourquoi avoir envoyé OSIRIS-REx explorer cet astéroïde en particulier ? Que peut-il nous apprendre ? Que sait-on déjà de l’objet ? La Nasa a résumé ce 16 octobre tout ce qu’il fallait savoir de Bennu (ou Bénou), cet objet céleste dont l’agence espère récolter un échantillon d’environ 60 grammes cette nuit.
Un vieil astéroïde, très sombre
Bennu, dont le diamètre est estimé à 500 mètres, est un astéroïde de type B, qui contient une importante quantité de carbone. Ce carbone explique l’aspect très sombre de Bennu, qui réfléchit peu la lumière qui arrive jusqu’à lui : environ 4 %, précise la Nasa. On peut comparer cette valeur à la quantité de lumière réfléchie par Vénus (une planète connue pour sa brillance dans notre ciel), estimée à 65 %.
On estime que Bennu n’a pas subi de modification radicale dans sa composition. C’est pourquoi la Nasa soupçonne que, sous sa surface si sombre, on pourrait trouver des roches et des éléments chimiques faisant office de véritables vestiges de la naissance du système solaire. Car Bennu se serait formé pendant les 10 premiers millions d’années du système solaire, il y a plus de 4,5 milliards d’années.
Bennu aurait voyagé depuis sa naissance
La Nasa pense que Bennu n’est pas né là où il se trouve aujourd’hui. Son lieu de naissance probable est la Ceinture principale d’astéroïdes, une région du système solaire logée entre les orbites de Mars et de Jupiter. Son déplacement, qui l’a rapproché de la Terre, serait dû à ce qu’on nomme l’effet Yarkovsky. Il provient d’une infime pression exercée par la lumière du Soleil sur les astéroïdes, résume ici l’agence spatiale canadienne.
La lumière du Soleil est composée de photons. Lorsqu’ils atteignent un astéroïde, ils peuvent être réfléchis ou être absorbés. Dans le deuxième cas, ils réchauffent la surface de l’objet. Ensuite, l’astéroïde ré-émet les photons, après un certain temps pendant lequel l’astéroïde tourne sur lui-même (un jour sur Bennu dure 4 heures et 17 minutes). C’est la force produite par cette émission de photons qui correspond à l’effet Yarkovsky.
Les photons qui rayonnent depuis la partie la plus chaude de l’astéroïde (qui n’est pas tout à fait alignée avec le Soleil, du fait de la rotation de l’objet) donnent une toute petite impulsion, susceptible de faire ralentir ou accélérer l’astéroïde. Pour Bennu, l’expulsion de chaleur lui donne une poussée vers le Soleil estimée à 0,29 kilomètre par an, selon la Nasa. Ceci suffit à modifier son orbite.
La collecte de l’échantillon sera moins facile que prévu
En 2019, on s’est rendu compte que la surface de Bennu est plus abrupte que ne le prévoyait la Nasa. Grâce aux observations d’OSIRIS-REx, les scientifiques se sont rendu compte qu’il serait plus délicat que prévu de toucher Bennu. La surface de l’astéroïde, qu’on imaginait lisse, est couverte de gros rochers. La descente de la sonde vers sa surface va nécessiter une grande précision afin de manœuvrer vers un site de prélèvement sûr.
Bennu est un « agglomérat lâche »
L’astéroïde Bennu est ce qu’on appelle en astronomie un « agglomérat lâche » (ou une « pile de débris », « rubble pile » en anglais). De tels objets ont été créés par l’agrégation de morceaux rocheux entre eux, qui ont été compressés ensemble sous l’effet de la gravité. Les agglomérats lâches naissent d’un impact, quand un corps beaucoup plus imposant est brisé. Pour Bennu, on pense qu’il devait s’agir d’un astéroïde de 100 km de large.
Cela signifie que Bennu doit être rempli de zones creuses à l’intérieur. La Nasa estime que 20 à 40 % du volume de l’astéroïde est en fait un espace vide. Si Bennu commençait à tourner plus vite ou se trouvait en interaction avec un corps planétaire, il finirait probablement par voler en éclats.
Bennu contient-il des indices sur l’origine de la vie ?
Parce que Bennu est très ancien, il pourrait peut-être contenir des matériaux abritant eux-mêmes des molécules qui étaient présentes lorsque la vie s’est formée pour la première fois sur la Terre, selon la Nasa. Les formes de vie sur Terre reposent sur des chaines de carbone, lié à de l’oxygène, à de l’hydrogène, de l’azote et d’autres éléments.
Néanmoins, il faut garder à l’esprit que les éléments organiques que les chercheurs s’attendent à découvrir sur Bennu pourraient ne pas avoir nécessairement une origine biologique.
Bennu représente-t-il un risque pour la Terre ?
Il existe un risque, plutôt faible, que Bennu puisse un jour heurter notre planète. Il s’agit d’un astéroïde géocroiseur Apollon, ce qui veut dire que sa trajectoire l’amène à couper l’orbite de la Terre. Bennu est considéré comme un objet potentiellement dangereux par le Centre des planètes mineures.
Il faut cependant nuancer le risque que l’objet représente : la Nasa estime que Bennu a une chance sur 2 700 de heurter la Terre entre les années 2175 et 2199. Rappelons également que l’objet a une densité faible et qu’il est probable que, s’il venait à impacter la Terre, il se désintègrerait avant d’arriver jusqu’au sol. Les scientifiques continuent de le surveiller étroitement et leurs prédictions devraient être encore affinées avec la mesure de l’effet Yarkovsky par OSIRIS-REx.
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