L’observation d’un astéroïde troyen de Mars a révélé une composition curieusement semblable à celle de la Lune. Une des hypothèses serait que l’objet provienne effectivement de l’astre. Mais d’autres scénarios sont possibles.

La composition d’un astéroïde qui évolue dans le sillage de Mars est étonnement similaire à celle de la Lune. Des scientifiques se sont interrogés sur ses origines dans une étude de la revue Icarus, présentée par le planétarium d’Armagh (en Irlande du Nord) le 3 novembre 2020. « Notre analyse montre une similarité remarquable entre VF31 et la surface lunaire », peut-on lire dans le document. Il n’est pas exclu que l’objet soit un vieux morceau de débris, datant de l’époque où des impacts sont supposés avoir formé la Lune et des planètes rocheuses comme la Terre.

Qu’est-ce qu’un astéroïde troyen ?

L’astéroïde qui attire l’attention des scientifiques est nommé « (101429) 1998 VF31 ». Il s’agit, comme le mentionne le Centre des planètes mineures, d’un astéroïde troyen de Mars. « Les astéroïdes troyens gravitent autour du Soleil près des points d’équilibre de Lagrange L4 et L5 à 60° devant ou derrière une planète le long de son orbite », rappellent les auteurs de l’étude. Dans le système solaire, il n’y a que trois planètes auxquelles sont liés de tels objets de façon stable : Mars, Jupiter et Neptune.

La stabilité de l’orbite de ces objets est fort utile pour mieux comprendre comment s’est formé le système solaire. Les astéroïdes troyens de Mars, particulièrement, sont la seule population de ce type dans les environs terrestres. « Ce sont très probablement des matériaux qui se sont arrimés à l’orbite martienne au moment où l’architecture du système solaire atteignait sa configuration finale », estiment les scientifiques dans Icarus. Dans cette étude, ils ont mobilisé de nouvelles observations de 1998 VF31, afin de mieux comprendre l’origine des astéroïdes troyens de Mars et leur rôle dans l’évolution du système solaire.

Astéroïdes troyens de Mars (le groupe L5 est en vert, derrière Mars représentée en rouge). // Source : Wikimedia/CC/AndrewBuck (image modifiée)

Astéroïdes troyens de Mars (le groupe L5 est en vert, derrière Mars représentée en rouge).

Source : Wikimedia/CC/AndrewBuck (image modifiée)

Pour examiner (101429) 1998 VF31, les scientifiques ont mobilisé le Très Grand Télescope de l’Observatoire européen austral, et son instrument X-SHOOTER afin de voir comment la surface de l’objet reflète la lumière émise par le Soleil dans des couleurs différentes. Les observations ont ensuite été comparées à des données sur des corps dont la composition est connue. Deux options étaient envisagées : soit l’astéroïde est constitué d’un matériau semblable aux planètes rocheuses, soit il est fait de matières typiques du système solaire externe.

Trois scénarios

En tentant de classer l’astéroïde, ils ont dû élargir la comparaison à d’autres types de surface et ont été bien surpris de constater une correspondance avec la surface lunaire.

Les auteurs se gardent de trancher sur la possibilité que l’objet puisse bien provenir de la Lune, mais envisagent plusieurs scénarios :

  • (101429) 1998 VF31 a peut-être obtenu cette apparence lunaire à cause d’une « altération spatiale extrême » expliquée par son exposition au rayonnement du Soleil sur le long terme, plus intense sur les astéroïdes troyens de Mars que sur n’importe quel astéroïde de la ceinture principale (située entre Mars et Jupiter).
  • Si l’astéroïde vient bien de la Lune, on pourrait imaginer que l’astre aurait été frappé lorsque le système solaire était encore assez jeune, projetant un éclat de la Lune jusqu’à l’orbite de Mars, alors encore en train de se former.
  • Dernier scénario : et si (101429) 1998 VF31 était originaire de Mars ? Comme la Lune, la planète a subi des impacts au début de son histoire. Un impact comme celui qui aurait pu donner naissance au Bassin boréal sur Mars aurait aussi pu envoyer un morceau vers le point L5. Le scénario d’une origine martienne est en tout cas cohérent avec notre connaissance actuelle de la planète.

Y a-t-il des astéroïdes troyens de la Terre ?

Un autre objectif portait sur la recherche de potentiels astéroïdes troyens liés à la Terre. Pourquoi regarder du côté de Mars dans ce but ? Comme l’explique le planétarium d’Armagh dans son communiqué, il serait plutôt difficile de repérer des astéroïdes troyens de la Terre (à supposer qu’ils existent) avec un télescope, car ils seraient toujours proches du Soleil dans notre ciel. L’étude de (101429) 1998 VF31 révèle qu’en raison du rayonnement solaire, des débris peuvent s’échapper des zones où sont logés les astéroïdes troyens de Mars.

Si la Terre avait des astéroïdes troyens comparables à ceux de Mars, le même phénomène pourrait se produire. On pourrait alors espérer observer ces astéroïdes, identifiables à leur composition inhabituelle. Ce pourrait être une mission pour le futur Observatoire Vera-C.-Rubin, un télescope optique construit au nord du Chili.

Découvrez les bonus

+ rapide, + pratique, + exclusif

Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.

Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci

Il y a une bonne raison de ne pas s'abonner à

Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.

Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :

  • 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
  • 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
  • 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.

Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez-nous sur WhatsApp !