Oui, cette simulation est clairement pertinente. Toutefois, elle relève aussi d’une communication politique : elle montre une vision valorisante pour la décision gouvernementale, en oblitérant toutes les critiques épidémiologiques qui sont formulées sur un confinement trop léger.

Lors du point presse du 5 novembre 2020, le ministre de la Santé Olivier Véran n’a pas annoncé de nouvelles mesures dans la lutte l’épidémie du coronavirus. Son discours visait essentiellement à synthétiser la situation actuelle, puis à défendre les choix politiques et sanitaires du moment. Parmi les éléments qu’Olivier Véran a présenté en ce sens, il y a deux simulations. La première projette une situation nationale sans confinement, la seconde une situation nationale avec confinement respecté.

Que valent ces simulations ?

Situation nationale projetée au 5 novembre, sans confinement. // Source : Gouvernement

Situation nationale projetée au 5 novembre, sans confinement.

Source : Gouvernement

La simulation sans confinement montre, sur le graphique présenté par le ministère, un pic exponentiel et continuel dans les admissions en réanimation dans les hôpitaux ; jusqu’à ce que les capacités soient largement dépassées.

Arrive ensuite une autre simulation, où l’on voit qu’avec un confinement « respecté », la courbe de la deuxième vague arrive plus rapidement à un pic plus bas, évitant la saturation, avant de redescendre. Dans les deux cas, la barre 05/11 montre où l’on en est dans la chronologie ce 5 novembre.

Projection avec confinement respecté. // Source : Gouvernement

Projection avec confinement respecté.

Source : Gouvernement

Le premier graphique — l’absence de confinement — ne montre rien de bien surprenant : la deuxième vague était effectivement exponentielle, et grave. De fait, sans une réduction du taux de reproduction effectif (le nombre de personnes contaminées par une seule personne positive au coronavirus), et donc une réduction du nombre potentiel de contacts à risque, la deuxième vague serait restée sur sa courbe exponentielle. Le second graphique est également logique, puisque toute mesure restrictive supplémentaire, a fortiori un confinement, vient alors réduire le taux de reproduction effectif du virus, et donc aplanir la courbe.

Des projections réalises, mais qui manquent de contexte

Les simulations montrées par Olivier Véran représentent donc une réalité. Oui, le confinement est une nécessité et, oui, des infections et des décès sont clairement évités avec cette message. Elles montrent toutefois une vision valorisante des choix récents du gouvernement dans la gestion de cette deuxième vague.

Il faut garder une posture critique : ces simulations manquent de contexte en gommant les critiques épidémiologiques qui sont formulées sur la forme actuelle du confinement.

Voici les deux limites :

  • Les insuffisances du confinement actuel ne sont pas abordées. Or, si les études scientifiques prouvent solidement que le confinement a un effet significatif pour éviter tant des infections que des décès, ces études montrent également qu’un confinement allégé aurait moins d’effet. Il n’est pas clair si la simulation montrée par Olivier Véran prend en compte ces faiblesses. Si c’est le cas, alors cela oblitère la possibilité d’une forme de confinement à l’impact encore plus efficace.
  • La temporalité du reconfinement fait également l’objet d’un débat épidémiologique. Plus un confinement est décrété rapidement, plus il a un impact pour aplanir rapidement la courbe, et beaucoup de scientifiques appelaient depuis plusieurs semaines à reconfiner. Paradoxalement, et même s’il est facile de brandir des « et si », la simulation présentée par Olivier Véran vient justement rappeler que cela aurait été probablement plus efficace d’en arriver plus rapidement à un reconfinement, plutôt que de passer par un couvre-feu, puisque la courbe aurait commencé à s’aplanir bien plus tôt.

En résumé, les simulations avec ou sans confinement présentées par le ministère sont pertinentes, mais présentent la décision gouvernementale sous son meilleur jour. La forme actuelle du confinement reste contestable aux yeux de beaucoup d’épidémiologistes et, dans une note qu’Europe 1 s’est procurée, le Directeur général de la santé Jérôme Salomon s’inquiète lui aussi de cette forme très légère. Cela n’a rien d’un problème franco-français.

Globalement, tous les pays d’Europe ont choisi un reconfinement allégé, pour des raisons économiques notamment, et il s’avère que la France a l’un des reconfinements les plus stricts à l’heure actuelle, comme on peut le constater sur notre carte des reconfinements européens.

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