Vénus n’est pas la seule planète que l’on soupçonne d’avoir perdu son eau par le passé. Le cas de Mars intrigue aussi les scientifiques, qui continuent de chercher comment l’eau a sans doute dû s’échapper de la planète rouge (et s’échappe peut-être aujourd’hui encore). Un nouveau phénomène qui a pu contribuer à ce processus de perte d’eau vient d’être identifié, a annoncé la Nasa le 13 novembre 2020. Il a été détaillé le même jour dans un article de la revue Science.
« Mars était autrefois une planète humide, mais elle a perdu la plus grande partie de son eau par des réactions qui produisent de l’hydrogène, qui s’échappe de la haute atmosphère vers l’espace », peut-on lire dans Science. Ce sont les tempêtes de poussière qui pourraient avoir joué un rôle, selon ces auteurs, dans la manière dont l’eau serait transportée vers la haute atmosphère martienne et changée en hydrogène.
L’eau atteindrait des altitudes plus élevées que prévu
Ce que les chercheurs constatent, c’est que l’eau pourrait atteindre des altitudes bien plus élevées que ce que l’on pensait avant. Ceci serait tout particulièrement vrai lors des tempêtes de poussière, qu’elles soient à l’échelle de la planète ou plus localisées. Ce processus pourrait même expliquer en grande partie la perte actuelle d’eau par Mars. Lorsque l’eau est projetée dans l’atmosphère à ces altitudes qui n’étaient jusqu’alors pas envisagées, les scientifiques montrent qu’elle peut être facilement détruite par des ions.
Les scientifiques ont utilisé des données obtenues par MAVEN (Mars Atmosphere and Volatile EvolutioN), une sonde de la Nasa en orbite autour de la planète depuis 2014, avec son instrument NGIMS, un spectromètre de masse dédié à l’étude de la composition de la haute atmosphère de Mars. L’instrument est capable de séparer les ions qui sont présents dans l’air grâce à leur masse. Ainsi, les scientifiques peuvent les identifier. L’abondance des ions dans la haute atmosphère de la planète a été suivie pendant deux années (martiennes).
Deux facteurs : les tempêtes et la chaleur
À 150 km au-dessus de la surface de l’astre, les auteurs ont constaté que la vapeur d’eau était en quantité plus importante pendant l’été dans l’hémisphère sud. Or, à ce moment-là la planète, plus proche du Soleil, est plus chaude, ce qui augmente les chances que les tempêtes de poussière surviennent, résume la Nasa. « L’abondance de l’eau dans la haute atmosphère variait selon les saisons, culminant en été au sud, et augmentant pendant les tempêtes de poussière, y compris la tempête de poussière planétaire de 2018 », écrivent les chercheurs. Ils ont remarqué qu’en juin 2018, lors de cette imposante tempête de poussière (qui menaçait alors le rover Opportunity), Mars a dû perdre autant d’eau en 45 jours qu’elle n’en perd généralement pendant une année martienne.
Les températures estivales associées aux vents puissants des tempêtes de poussière permettent à la vapeur d’eau d’atteindre les zones élevées de l’atmosphère de Mars. C’est à cet endroit qu’elle peut se décomposer, en oxygène et hydrogène (l’eau, de formule H2O, est composée de deux atomes d’hydrogène et un atome d’oxygène), brisée par les ions. L’oxygène et l’hydrogène peuvent alors fuir dans l’espace. Jusqu’à présent, si l’on savait que l’eau pouvait être soulevée lors des tempêtes martiennes, on ignorait qu’elle était en mesure d’atteindre le haut de l’atmosphère.
Un phénomène peut-être encore à l’œuvre
Le phénomène peut permettre de mieux cerner le passé du climat martien, qui aurait évolué d’un « état chaud et humide il y a des milliards d’années à la planète froide et sèche que nous observons aujourd’hui », écrivent les auteurs. La quantité d’eau perdue est telle que les chercheurs estiment que Mars aurait pu posséder un océan couvrant sa surface qui aurait fait des dizaines, voire des centaines, de mètres de profondeur.
Le phénomène est peut-être toujours en cours aujourd’hui, estiment les chercheurs. Selon eux, de la vapeur serait formée par la sublimation (passage de l’état solide à gazeux, sans passer par l’état liquide) au niveau des calottes polaires glacées aux moments de l’année où le climat est plus chaud. Cette vapeur se déplacerait ensuite jusqu’à une haute altitude.
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