La Chine a donc réussi le lancement de sa mission Chang’e 5, qui a pour but de récolter et ramener sur Terre des fragments de la Lune. Mais son challenge ultime ne surviendra vraiment que dans quelques années.

La mission spatiale chinoise Chang’e 5 sera-t-elle un succès ? En tout cas, son départ s’est déroulé sans accroc. Elle a bien décollé le 23 novembre 2020, depuis la base de lancement de Wenchang, sur l’île de Hainan, tout au sud du pays, grâce au lanceur Longue Marche 5. Désormais en route vers la Lune, elle poursuit un but très ambitieux : atterrir sur le satellite, collecter des échantillons et les ramener sur Terre.

Ambitieux et complexe, car rares sont les pays à avoir réussi à un tel exploit. Ils ne sont en fait que deux : les États-Unis et la Russie du temps de l’Union soviétique, dans les années 1970. Depuis la dernière mission du genre, Luna 24 en 1976 par l’URSS, aucun autre État n’a tenté le coup. Jusqu’à l’émergence de la Chine comme grande puissance spatiale, avec une mission lancée 45 ans plus tard.

Ce désintérêt pour le satellite naturel de la Terre est-il le signe que son sol et son sous-sol n’ont plus guère d’intérêt sur un plan scientifique ? Il est vrai que dans ce domaine, ce sont d’autres objectifs qui ont été poursuivis, comme Stardust (récolte des poussières interstellaires et de particules d’une queue de comète) et Genesis (particules de vent solaire) pour la NASA, et Hayabusa 1 et 2 pour l’agence spatiale japonaise JAXA, avec un recueil d’échantillons sur deux astéroïdes. Hayabusa 2, d’ailleurs, doit finir sa mission en fin d’année.

La Chine met les bouchées doubles sur la Lune

Mais pour la Chine, l’enjeu est peut-être moins scientifique que politique. Depuis quelques années, Beijing poursuit un programme ambitieux pour explorer la Lune. Baptisé Chang’e — un hommage à la déesse chinoise de la Lune –, il se compose de plusieurs jalons de plus en plus techniques. Autant de marqueurs qui permettent de voir aussi où en est la Chine dans son ascension parmi les grandes nations de l’espace.

Ainsi, Chang’e 1 et Chang’e 2 étaient des satellites d’observation placés en orbite, lancés respectivement en 2007 et 2010. En 2013, Chang’e 3 a donné lieu à un atterrisseur et un rover (le fameux lapin de jade) placés sur la face visible de la Lune. Quant à Chang’e 4, qui a commencé ses activités en 2019, il s’agit de reproduire le même exploit, mais cette fois du côté de la face cachée du satellite (avec le lapin de jade 2).

Chang’e 1 et 2 constituaient la première phase du programme. Chang’e 3 et 4, la suivante. Avec Chang’e 5, c’est la troisième étape qui est enclenchée. Ici, une fois l’engin déposé sur la surface lunaire pour la récolte du prélèvement, celui-ci devra ensuite être placé dans un module adapté pour faire la navette entre le sol et l’orbite lunaire, où une sonde restera en orbite, avant de lui faire faire le chemin du retour.

Ultime défi attendu dans 3-4 ans

Mais c’est véritablement à l’horizon 2023/2024 que l’ultime challenge attendra la Chine. Si Chang’e 5 est un succès (et on le saura assez tôt, car la livraison des roches est prévue à la mi-décembre 2020), Beijing pourra embrayer sur Chang’e 6, qui consiste à faire la même chose… mais sur la face cachée de la Lune. Et là, ce sera une première : pas même les USA et l’URSS n’ont tenté le coup de l’autre côté du satellite.

Chang’e 6 a sans doute indirectement souffert du retard subi avec la mission Chang’e 5. En effet, celle-ci devait partir au départ en 2017, mais un échec au cours du deuxième vol cette même année a forcé l’agence spatiale chinoise à faire une pause jusqu’en 2019. Ce n’est qu’à ce moment-là que les vols ont repris. Depuis, quatre décollages ont eu lieu, sans autre incident.

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Une fusée Longue Marche en exposition. // Source : DLR

Un succès en 2023 ou 2024 sera très significatif, notamment parce que la Chine sera alors parvenue à réussir un exploit qui n’aura pas été préalablement fait par une autre grande puissance spatiale. Et même si les États-Unis conservent encore une très forte avance (à cette date, ils seront en train de concevoir une station spatiale en orbite autour de la Lune), le fossé séparant les deux pays ne sera plus aussi abyssal.

Il est à noter que la France se glissera dans les bagages chinois lors de la mission Chang’e 6. En effet, pendant que Beijing collectera ses fragments du sol et du sous-sol, dans trois à quatre ans, le Centre national d’études spatiales intégrera ses expériences spatiales. Un accord de coopération a été signé en ce sens en 2019. Ce n’est pas tous les jours que l’on accède à la face cachée de la Lune.

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