Les astronomes s’attendaient à ce que cette galaxie cesse de croitre sous l’effet de son trou noir vorace. Pourtant, ils y ont observé d’importantes quantités de nouvelles étoiles en formation. La découverte, présentée par la Nasa le 27 novembre 2020, a été rapportée en début de mois dans The Astrophysical Journal (une version prépubliée de l’étude est accessible).
Il est admis que la plupart des grandes galaxies possèdent en leur centre un trou noir. Celui de la Voie est nommé Sagittarius A*. On pense que les plus « affamés » d’entre eux absorbent tant de matière environnante qu’ils empêchent leur galaxie de prospérer en formant de nouvelles étoiles. Mais la galaxie étudiée par les chercheurs, CQ 4479, paraît connaître les deux processus : tandis que son trou noir absorbe énormément de matière, elle forme de nouvelles étoiles, environ 100 de la taille du Soleil chaque année.
Les trous noirs logés au centre de galaxies massives accumulent du gaz pour grandir. Les scientifiques pensent que la croissance d’une galaxie s’achève lorsque le gaz absorbé par le trou noir l’est en quantité suffisamment élevée pour produire une énergie, qui chauffe le reste de la galaxie. De cette façon, le reste de la galaxie ne peut plus former de nouvelles étoiles et elle cesse de croître.
La galaxie analysée ici ne correspond pas à cette description. « CQ 4479 est une galaxie à sursaut de formation d’étoiles avec une composante de poussière froide et un moteur central lumineux à rayons X », détaillent les auteurs. Il est assez rare d’observer ces caractéristiques coexister, résume l’université du Kansas dans un communiqué : un noyau actif de galaxie émettant des rayons X (sous l’effet du trou noir supermassif) et un gaz froid qui alimente la naissance de nouvelles étoiles.
Qu’est-ce qu’un quasar froid ?
C’est pourquoi CQ 4479, qui se trouve à plus de 5,25 milliards d’années-lumière de nous, est décrite comme un « quasar froid » par les scientifiques. « Les quasars froids sont une sous-population rarement observée connue pour héberger des noyaux actifs de galaxie aux rayons X lumineux non obscurcis, tout en conservant une alimentation en gaz froid qui alimente des taux de formation d’étoiles élevés », résument les scientifiques. Avec CQ 4479, les chercheurs pensent que l’on observe un laps de temps très limité de la vie de la galaxie : le moment où le trou noir grandit et où les étoiles qui se trouvent autour de lui se forment encore. Selon la Nasa, on assiste là à « une phase précoce de la mort d’une galaxie », l’étape juste avant que la galaxie ne subisse les effets du trou noir vorace en son centre. L’agence indique qu’avec CQ 4479, c’est la première fois qu’un quasar froid est examiné en détail.
« Une phase précoce de la mort d’une galaxie »
L’observation de CQ 4479 a été rendue possible par SOFIA, l’Observatoire stratosphérique pour l’astronomie infrarouge de la Nasa. Il s’agit d’un télescope observant dans l’infrarouge, porté par un Boeing 747 SP. Ces observations ont permis d’estimer la quantité de nouvelles étoiles formées pendant les 100 derniers millions d’années de la vie de la galaxie.
L’étude de CQ 4479 peut aider les astronomes à comprendre comment des galaxies si massives ont pu apparaître, alors qu’aujourd’hui l’Univers abrite majoritairement des galaxies qui ne forment plus d’étoiles. Cet exemple semble montrer que la croissance de trou noir central ne met pas immédiatement un terme à la formation de nouvelles étoiles : il faudrait donc peut-être repenser les modèles actuels de l’évolution des galaxies.
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