Une étude fournit des informations sur la réponse immunitaire du vaccin ARNm-1273 de Moderna. Mais celle-ci est issue de la phase 1 des essais cliniques de l’entreprise. C’est très prometteur, mais limité en portée. Voici ce qu’il faut retenir, à ce stade, de cette étude.

Alors que Pfizer et Moderna ont récemment annoncé la finalisation de leur phase 3, et qu’une première autorisation a été émise au Royaume-Uni pour Pfizer, la communauté scientifique internationale attend de nouvelles publications de la part des deux entreprises, principalement celles qui sont issues de la phase 3. Le problème est bien que, pour l’instant, les seules données disponibles sur cette phase-ci sont essentiellement issues de communiqués de presse. Comme nous vous l’indiquions pour d’autres sujets liés au coronavirus, il est impossible de tirer des conclusions rigoureuses d’un communiqué.

Il se trouve que le 3 décembre 2020, The New England Journal of Medicine a publié une étude issue de la phase 1 des essais conduits par Moderna, phase débutée en mars 2020. Ce ne sont donc pas les données tant attendues de la phase 3, mais elles fournissent quelques premières informations sur la durée de la réponse immunitaire. Les résultats fournis dans cette étude sur le vaccin de Moderna sont prometteurs, validés par un comité de lecture indépendant, mais limités en portée.

Voici ce qu’il faut en retenir à ce stade.

Les informations apportées

Alicia T. Widge, immunologue au National Institute of Allergy and Infectious Diseases, et ses consorts, en arrivent à la conclusion que « ces résultats montrent que malgré une légère baisse attendue des titres d’anticorps de liaison et de neutralisation, l’ARNm-1273 [nom du vaccin] a le potentiel de fournir une immunité humorale durable ».

Les données issues de la phase 1 des essais cliniques de Moderna montrent en effet que la réponse immunitaire contre le coronavirus a persisté pendant les 3 mois qui ont suivi les injections. Plus spécifiquement, les anticorps neutralisants ont été détectés encore 119 jours après la première dose, et 90 jours après la deuxième dose. Cela donne un indice important pour estimer que la réponse immunitaire créée par le vaccin de Moderna peut persister dans le temps.

Pour le vaccin de Moderna comme celui de Pfizer, deux doses espacées dans le temps sont nécessaires. // Source : Pexels

Pour le vaccin de Moderna comme celui de Pfizer, deux doses espacées dans le temps sont nécessaires.

Source : Pexels

Dans certains groupes, la réponse immunitaire a légèrement baissé au fil des semaines, principalement dans les deux groupes comprenant les patients les plus âgés. Mais cette baisse était prévue et n’est donc pas spécialement cause d’inquiétude. Chez les 34 personnes vaccinées, le niveau d’anticorps est en tout cas resté au-dessus de celui détecté dans le groupe de contrôle — 41 personnes guéries de la maladie Covid-19 — même après la baisse attendue.

Autre bonne nouvelle que les auteurs livrent au cours de leur papier : aucun effet secondaire néfaste n’a été détecté, même après 3 mois.

Les limites à éclaircir

Il s’agit ici surtout de la réponse en anticorps. Ce n’est qu’une partie du fonctionnement de la réponse immunitaire — reste la question des lymphocytes T et B. Les auteurs indiquent que « des études sur les cellules B induites par le vaccin sont en cours », et précisent que le vaccin aurait par ailleurs provoqué des réponses des lymphocytes T auxiliaires encore après 43 jours, sans donner toutefois plus de détails. Concrètement, cette étude ne fournit qu’une réponse partielle sur la réponse immunitaire créée par le vaccin.

Qui plus est, il s’agit des résultats issus de la phase 1. Cette première phase est plus limitée que les phases suivantes (les recherches de Moderna viennent actuellement de boucler leur phase 3, raison pour laquelle le processus d’autorisation est enclenché). Cela signifie que les données fournies dans cette étude se basent sur un échantillon limité, comme c’est toujours le cas en phase 1. Les résultats concernent ici un échantillon de 34 adultes.

Pour comparaison, dans la phase 3, plus de 30 000 personnes ont été impliquées. La marge est importante. Il est toutefois assez logique qu’en matière de durée de l’immunité, les premiers résultats proviennent de la phase 1 : il faut un recul temporel important pour évaluer cette durée, or la phase 1 date de plusieurs mois. Les auteurs précisent par ailleurs que les patients vont continuer à être surveillés pendant 13 mois. Il en ira de même pour les patients des autres phases. Et même les personnes qui seront vaccinées hors essais cliniques, après autorisation par les autorités sanitaires indépendantes, feront l’objet d’un suivi de pharmacovigilance pour surveiller leur immunité et des effets secondaires.

En conclusion, pour cette étude, le relevé la persistance de l’immunité après 3 mois est très prometteur. Mais il faut garder à l’esprit que ce résultat est tiré d’essais cliniques menés au début des phases de recherches, sur un nombre faible de patients. Les résultats des phases suivantes, conduites sur des milliers puis des dizaines de milliers de personnes, seront plus parlants. Quant au recul sur la durée de l’immunité, celui-ci viendra avec le temps. Une immunité à court ou moyen terme générée par des vaccins représenterait déjà une arme de poids pour freiner la propagation du coronavirus, même si cela impliquerait par exemple de réitérer de manière saisonnière le vaccin.

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