Attention à l’emballement sur cette information concernant un infirmier américain qui a été infecté par le coronavirus quelques jours après une première injection du vaccin de Pfizer. Ce constat, mal présenté, n’a rien de significatif et contribue à la désinformation, en étant partagé à partir de titres qui peuvent induire en erreur.

« Un infirmier américain testé positif huit jours après avoir été vacciné » : cette information, accompagnée de cette présentation des choses dans le titre, est de plus en plus diffusée, depuis quelques heures, par les internautes adeptes de théories mensongères sur la pandémie (Florian Philippot en chef de file). Ces derniers faussent alors la réalité. Car l’information en elle-même a très peu d’intérêt informatif ou scientifique.

Des articles publiés sur le sujet les 30 et 31 décembre 2020

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Le plus paradoxal, c’est que les articles donnent bien les détails sur cette infection, mais le titre, lui, induit clairement en erreur sur sa portée réelle. Voici pourquoi cette information est une non-info, rappelant qu’il faut veiller à ne pas tomber dans l’excès informatif, au risque de brouiller la compréhension de la réalité par le public et de favoriser les désinformateurs.

Explications.

Il y a deux doses aux vaccins Pfizer et Moderna

Les vaccins de Pfizer et de Moderna, tout comme celui d’AstraZeneca, fonctionnent en deux doses, injectées à un intervalle défini par les laboratoires durant leurs essais. Pour celui de Pfizer, concerné ici par l’infirmier américain infecté, la deuxième injection doit avoir lieu 21 jours après la première. Le vaccin a besoin des deux doses pour être pleinement efficace : le patient n’est pas encore complètement vacciné avant cela. Ce qui ne signifie pas que la première dose ne confère aucune protection.

Différence entre l'incidence du coronavirus dans le groupe sous placebo et le groupe vacciné. // Source : FDA

Différence entre l'incidence du coronavirus dans le groupe sous placebo et le groupe vacciné.

Source : FDA

Les données des essais cliniques de Pfizer, réalisés auprès de 40 000 personnes lors de la phase 3, montrent bien une différence d’efficacité entre la première et la seconde dose. Dans les jours suivant la première injection, l’efficacité totale est de 55 %. Sur le graphique ci-dessus, on voit bien qu’au huitième jour après la première dose, les courbes placebo et vaccin restent encore relativement proches. Une protection est d’ores et déjà conférée par le vaccin à ce stade, mais elle est plus fragile, moins systématique — cela peut déjà éviter les formes sévères de la maladie même en cas de développement infectieux.

Après la deuxième dose, en revanche, c’est là que l’efficacité monte à 95 %. Comme l’expliquait l’immunologue Akiko Iwasaki, la deuxième injection génère un « boost » absolument essentiel qui permet d’inscrire de manière durable une réponse immunitaire beaucoup plus robuste. Le développement d’une bonne immunité demande du temps à l’organisme.

Rien de bien significatif

Il faut aussi garder à l’esprit que les vaccins n’ont pas 100 % d’efficacité. Des exceptions minoritaires peuvent se poser à l’immunité conférée, et les essais cliniques de Pfizer comme de Moderna montrent en effet que quelques cas d’infection peuvent survenir, même après la deuxième dose. Cela reste des cas exceptionnels à l’échelle du nombre de personnes vaccinées. L’infection de cet infirmier s’inscrit dans le cadre de plus de deux millions d’autres personnes vaccinées depuis la mi-décembre aux États-Unis.

Comme le rappelle l’infectiologue Christian Ramers auprès d’ABC, il existe d’autres cas comme cet infirmier, notamment auprès de soignants qui sont particulièrement exposés très tôt après la vaccination, ne laissant pas le temps à l’immunité de se développer. L’article d’ABC titre d’ailleurs avec justesse que l’infirmer est « testé positif quelques jours après la première dose du vaccin, rappelant que la protection n’est pas instantanée ».

Par ailleurs, insistons sur ce point, même lorsqu’une infection survient après l’injection du vaccin, les essais cliniques ont montré que cela permet d’éviter les formes les plus sévères de la maladie, qui ne survenaient pas ou en nombre minime dans les groupes vaccinés, contrairement aux groupes sous placebo. L’immunité n’est pas encore pleine et entière, mais le processus étant enclenché, l’organisme reste mieux armé que sans aucune injection.

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