Les scientifiques visitant le site archéologique de Castell Henllys ne pensaient pas tomber, lors de leurs nouvelles fouilles, sur autant d’emballages de friandises Bounty ou de couverts en plastique. Ni sur les trois milliers d’autres déchets plastiques excavés sur place. L’équipe d’archéologues relate cette découverte à travers un papier publié le 7 janvier 2021 dans Antiquity. Cette pollution du site de Castell Henllys relève, pour eux, d’une énième signature de l’ère de l’Anthropocène.
Cuillères en plastique, emballages et autres détritus
Situé dans le parc national du Pembrokeshire, au Pays-de-Galles, le site de Castell Henllys abritait autrefois un village — une riche famille ainsi qu’une communauté d’une centaine de personnes. Ce village prenait place en ces lieux vers la fin de l’âge de fer, il y a un peu moins de 2 000 avant aujourd’hui. Les fouilles archéologiques ont permis de déterminer à quoi pouvait bien ressembler ce village, comment il était bâti. Alors, sur la base de ces découvertes, les archéologues ont construit, sur place, au début des années 1980, des reconstitutions des maisons rondes de ce village disparu, en se reposant sur les mêmes techniques et matériaux utilisés à l’époque.
Le site est resté ouvert au public toutes ces années, à la fois aux touristes et aux visites scolaires. C’est une sorte d’expérience, dont le but scientifique peut se définir ainsi : observer et évaluer comment les matériaux de ces maisons se dégradent à travers le temps dans le sol, en raison des éléments de l’environnement, mais aussi par l’usage, le passage de nombreuses personnes.
En 2018 puis en 2019, deux des maisons ont dû être reconstruites pour des raisons de sécurité. Ce fut l’occasion de faire des fouilles terrestres, comme un bilan d’étape de l’expérience archéologique. Au cours des excavations, les archéologues ont pu analyser comment les matériaux de construction s’étaient sédimentés dans le sol, et quel a été l’impact des nombreux passages. Mais ils ont aussi, voire surtout, découvert « une quantité inattendue de détritus en plastique » ayant perduré dans le sol, bien au-delà des prévisions, « indiquant comment, même dans des contextes bien gérés, le plastique pénètre dans les dépôts terrestres ».
Pourquoi est-ce un signe de l’Anthropocène ?
Le site est situé sur une colline relativement reculée, dans la campagne galloise, et les maisons sont régulièrement nettoyées après les visites touristiques et scolaires. Raisons pour lesquelles l’excavation d’une telle quantité de plastique était d’autant moins prévisible. La découverte met en exergue une forme de pollution persistante, cependant discrète pour l’œil humain de prime abord. « Dans un contexte de sensibilisation croissante au rôle du plastique dans la pollution marine, cette étude démontre son omniprésence terrestre », écrivent les auteurs de l’étude parue dans Antiquity.
L’Anthropocène [ère des humains] est l’ère que de nombreux scientifiques proposent pour définir l’impact significatif de l’humanité sur la planète, comment nous métamorphosons de manière radicale les écosystèmes. Cet impact laisse une trace, marquant une époque ou une ère géologique.
« L’ère du plastique »
Les auteurs de l’étude dédiée au site de Castell Henllys estiment, dans cette perspective, que tous les déchets plastiques qu’ils ont mis au jour révèlent « comment la façon de vivre depuis la fin du 20e siècle et le début du 21e siècle crée des motifs distincts qui représentent une partie de la signature de l’Anthropocène ».
Les auteurs rappellent que l’archéologie repose en grande partie sur les dépôts matériels laissés dans le sol par un certain mode de vie (ustensiles, logements…). Or, les sédiments récents se distinguent par une haute quantité et une grande diversité de matériaux, relevant tout particulièrement d’emballages plastifiés (sachets de bonbons, bouteilles de boissons). Il se peut, selon les auteurs, que cette abondance plastique soit une caractéristique archéologique de notre époque, démontrant alors une « ère du plastique » à proprement parler.
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