Alors que le confinement était déclenché dans plusieurs pays du monde, en mars 2020, le jeu Animal Crossing : New Horizons arrivait sur Switch au même moment. Pour beaucoup de gens, le jeu de simulation fut l’occasion de s’occuper, de se divertir, mais aussi de nouer du lien social pendant cette période compliquée. La chercheuse en psychologie Lin Zhu s’est penchée sur la situation particulière de cet opus d’Animal Crossing pour explorer la psychologie des jeux vidéo. Elle a publié ses conclusions dans la revue Human Behavior and Emerging Technologies en septembre, étude repérée par le médiateur scientifique Pierre Henriquet sur Twitter le 26 janvier 2021.
New Horizons nous invite à construire notre propre foyer, sur une île initialement déserte. Il faut contracter un prêt (auprès du terrible tanuki capitaliste Tom Nook), gérer cet argent, explorer les lieux, pêcher, décorer les lieux à notre image, cultiver son jardin, partir à la rencontre d’autres villageois ; tout cela dans l’allégresse d’un monde coloré. Il est possible, au cours des pérégrinations d’îles en îles, de rencontrer d’autres joueurs et joueuses.
Le jeu fut un immense succès et, pour expliquer cet enthousiasme, la situation du confinement n’y est sans doute pas pour rien. En tout cas, pour Lin Zhu, il est clair que les mécanismes psychologiques derrière le plaisir éprouvé en jouant à Animal Crossing durant cette période montrent le caractère positif que peuvent prendre les jeux vidéo, contrastant avec leur image habituelle. La psychologue soutient que le jeu a « ouvert la porte à un monde parallèle, a apporté un confort spirituel et du soutien à ses fans ».
Un monde parallèle rêvé ?
Le premier mécanisme que Lin Zhu met en avant réside dans la capacité du jeu à mobiliser notre envie instinctive d’un monde rêvé, une utopie sans les lourdeurs du monde réel. Une échappatoire, en somme. « C’est comme un havre qui vous tient à l’écart du Covid-19 », mais aussi à l’écart du travail, des factures, des problèmes. Même s’il y a des tâches à accomplir, le rythme est beaucoup plus calme. Il n’y a pas véritablement d’impératif, « le joueur peut choisir ce qu’il veut faire un jour donné ». Le monde d’Animal Crossing est également dénué de violences et de dangers. Lin Zhu pointe d’ailleurs un éventuel revers de la médaille pour ce monde parallèle : l’échappatoire est bien là, mais elle est virtuelle et temporaire, ce qui peut affecter le moral lorsqu’on sort de ce refuge — elle en appelle à de futures études sur cet aspect.
Deuxième mécanisme relevé par la psychologue : la socialisation, même virtuelle, reste une forme importante de lien social. Il se trouve que New Horizons n’inclut pas de combats, et les rapports ne sont pas non plus exclusivement commerciaux. Il est possible de se retrouver pour simplement discuter, par exemple, ou organiser des événements. « Il existe même des histoires vraies de gens qui ont organisé des mariages dans le jeu après que leurs cérémonies aient été annulées dans la vraie vie. »
Lin Zhu considère qu’il s’agit là d’une façon agréable de se construire des souvenirs, d’échanger, de rire, de papoter ensemble sans pouvoir le faire en étant physiquement présent. Ces interactions sociales répondent « au désir des joueurs de poursuivre les contacts sociaux entre eux pendant la pandémie Covid-19 et de réduire leur sentiment de solitude », ce qui n’est pas négligeable étant donné l’impact de la solitude du confinement sur la santé mentale. Les bons souvenirs créés pendant le confinement, bien réels malgré la virtualité d’un jeu vidéo, se retrouvent alors à l’équilibre avec les mauvais souvenirs provoqués par le contexte sanitaire.
Pour Lin Zhu, Animal Crossing n’est pas un cas isolé, mais un cas pratique de ce que peuvent apporter les jeux vidéo dans la société dans différentes circonstances. Le rôle d’un opus comme New Horizons pendant la pandémie « nous a fait réaliser que la psychologie derrière les jeux vidéo a bien plus d’implications que ce que nous en savons déjà. Par la suite, d’autres trésors attendent d’être explorés dans de futures études ».
+ rapide, + pratique, + exclusif
Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.
Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Abonnez-vous à Numerama sur Google News pour ne manquer aucune info !