Blue Origin a pris la décision de repousser le vol inaugural de sa nouvelle fusée New Glenn à la fin de l’année prochaine.

L’espace est difficile, dit-on. Il est parfois aussi frustrant. Blue Origin vient d’en avoir une illustration récente, en constatant que son précédent calendrier de lancement pour sa future fusée super-lourde : la New Glenn, n’est plus viable. Dans un point d’étape publié le 25 février, l’entreprise a fait savoir que le vol inaugural de son prochain lanceur est donc désormais fixé à fin 2022.

« Le calendrier a été affiné pour répondre à la demande des clients commerciaux de Blue Origin », lit-on dans le communiqué de la société spécialisée dans le vol aérospatial qui été fondée par Jeff Bezos, qui est accessoirement à l’origine du plus gros site de e-commerce sur le net, Amazon. Blue Origin lie ce report à une récente déconvenue de la New Glenn, qui était sur les rangs pour fournir des services à l’armée.

« Cette mise à jour de l’objectif du premier vol fait suite à la récente décision de la Space Force de ne pas sélectionner New Glenn pour la phase 2 de l’acquisition des services de lancement (LSP) de la National Security Space Launch (NSSL). […] Nous espérons lancer des charges utiles NSSL dans le futur, et restons engagés à servir la mission de défense nationale des États-Unis », écrit la société.

Site officiel Blue Origin

La New Glenn en vol, dans une vue artistique. // Source : Blue Origin

Pour Blue Origin, il s’agit du deuxième report pour la New Glenn, une fusée nommée en l’honneur de John Glenn, le premier astronaute américain ayant effectué un vol orbital, en 1962. L’entreprise, qui a présenté l’engin en septembre 2016, tablait initialement sur un vol inaugural en 2020, avant de le fixer à 2021. La crise du coronavirus, apparue début 2020, n’a évidemment pas arrangé les choses.

Désormais, Blue Origin mise sur un vol au quatrième trimestre 2022.

New Glenn sera la deuxième fusée de série construite par Blue Origin. La première, New Shepard a déjà réalisé quinze vols, mais suborbitaux, c’est-à-dire à une vitesse et une trajectoire ne lui permettant pas de se maintenir en orbite autour de la Terre. Le lanceur a été nommé en l’honneur d’Alan Shepard, premier Américain à aller dans l’espace, dans le cadre du programme Mercury de la Nasa.

Une fusée aux caractéristiques hors normes

Sur le papier, New Glenn présente des caractéristiques remarquables : haute de presque 100 mètres, composée de deux étages, dont le premier doit être réutilisable comme ce que fait SpaceX avec la Falcon 9, la fusée est capable d’acheminer de 10 à 45 tonnes de charge utile dans l’espace, en orbite géostationnaire ou en orbite basse. Elle fait d’ailleurs partie de la catégorie des lanceurs lourds.

En 2016, Jeff Bezos s’était laissé aller à une comparaison sur Twitter en montrant la taille de plusieurs lanceurs. Il apparaissait alors que la New Glenn, dans sa version à deux étages dépassait déjà de la tête et des épaules la plupart des lanceurs existants. C’était encore plus flagrant avec la version à trois étages. Seule Saturn V, qui a servi à aller sur la Lune, était encore devant.

Jeff Bezos n’avait néanmoins pas mentionné le Space Launch System (SLS), qui est en développement depuis une décennie dans les ateliers de la Nasa. Or, c’est aussi une fusée lourde en cours de développement, plus haute et dont le baptême de fusée est prévu pour la fin 2021. C’est elle qui servira au programme Artemis, pour ramener des astronautes sur la Lune. En somme, c’est la nouvelle Saturn V.

De son côté, les ambitions de la New Glenn paraissent bien plus modestes, avec l’envoi de satellites en orbite. Mais, pourquoi pas, à terme ajouter d’autres cordes à son arc, comme le ravitaillement ou le transport d’astronautes vers la Station spatiale internationale — la New Glenn apparait toutefois surpuissante pour ce type de mission : SpaceX utilise pour sa part un engin nettement plus léger, la Falcon 9.

Une autre possibilité pourrait être de voir la New Glenn participer au transport des futurs modules de la station spatiale lunaire (LOP-G  ou Lunar Orbital Platform-Gateway). Après tout, SpaceX va le faire également. La puissance de la New Glenn trouverait alors ici une raison d’être. D’autant que la station LOP-G est un travail qui prendra plusieurs années : de quoi laisser assez de temps à Blue Origin d’être fin prête.

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