« Ces travaux nous aident à comprendre comment la vie a pu se former sur Terre et comment elle pourrait encore se former sur d’autres planètes semblables à la Terre », affirme le planétologue Benjamin Hess. Avec ses collègues Sandra Piazolo et Jason Harvey de l’université de Yale, il est à l’origine d’une étude sur le rôle potentiel de la foudre dans l’apparition de la vie sur Terre. Les résultats de ces travaux ont été publiés le 16 mars 2021 dans Nature.
La vie provient d’un cocktail complexe d’ingrédients. Parmi eux, le phosphore, que l’on retrouve au sein de l’ADN ou encore des membranes cellulaires. Mais il y a des milliards d’années, cet élément était profondément enfoui dans des minéraux insolubles, alors comment a-t-il pu se trouver en quantité suffisante et disponible pour favoriser l’apparition de la vie ?
Les fulgurites impliquées dans le mécanisme de la vie ?
L’une des théories les plus admises est que le phosphore fut amené par des météorites, puisque cet élément est présent dans le schreibersite, un minéral qu’elles contiennent. Cette hypothèse dépend toutefois de la fréquence des impacts météoritiques et il se trouve que le moment où la vie est apparue sur Terre est aussi le moment où la région est devenue plus calme, les impacts de météorites devenaient alors moins fréquents.
Le travail publié par l’équipe de recherche de Yale vient apporter une hypothèse complémentaire. L’étude rappelle en effet l’existence de la fulgurite : ce verre naturel se forme spécifiquement lors de l’impact d’un éclair sur de la roche terrestre. Or, il contient du phosphore — celui présent sous forme originellement insoluble dans les minéraux terrestres, mais cette fois-ci sous forme soluble en raison de la foudre.
Les auteurs ont mené une simulation informatique visant à évaluer le nombre d’impacts d’éclairs dans l’histoire terrestre. Il y a quelques milliards d’années, du fait de conditions climatiques différentes, les éclairs étaient beaucoup plus fréquents. D’après cette modélisation, entre 100 millions et 1 milliard d’éclairs auraient touché le sol chaque année, libérant constamment des quantités considérables de phosphore sous sa forme soluble.
Les éclairs comme « source étendue et régulière de phosphore » sur la Terre primitive
« Nous proposons que dans les conditions de la Terre primitive, la concentration du phosphore par les éclairs est un processus plus important que ce que l’on pensait jusqu’à présent, fournissant une source étendue et régulière de phosphore devenu soluble », écrivent les auteurs dans l’étude.
Qui plus est, les éclairs ne sont pas distribués de façon homogène, mais plutôt dans les régions tropicales : on y trouve une prédominance dans l’activité volcanique, ce qui provoque davantage de foudre, et, en plus, génère du basalte contenant de grandes quantités de phosphore — que les éclairs ont donc pu libérer massivement. C’est aussi dans les régions tropicales qu’étaient présents, à l’époque, d’autres ingrédients essentiels de la vie, tels que de l’eau liquide. Tout le cocktail était donc idéalement réuni.
Les auteurs estiment ainsi que les éclairs — au travers des fulgurites générées et les régions touchées — sont devenus, il y a 3,5 milliards d’années, une source de phosphore soluble plus importante encore que les météorites, ce qui aurait directement contribué à la vie.
L’équipe de recherche suggère même que cela pourrait être élargi au-delà de la Terre, et représenter un « mécanisme indépendant du flux de météorites pour générer continuellement du phosphore réactif prébiotique sur des planètes semblables à la Terre, ce qui pourrait faciliter l’émergence sans fin de la vie terrestre ». Selon les auteurs, la potentielle présence de foudre devrait donc également faire partie des signaux à surveiller pour la recherche d’une vie extraterrestre.
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