Après cinq jours de blocage, le trafic dans le canal de Suez a pu commencer à reprendre le 29 mars 2021. La semaine précédente, un cargo de la compagnie Evergreen Marine s’est échoué dans le canal, qui relie la mer Méditerranée et la mer rouge. Le navire de 400 mètres de long et de 220 000 tonnes s’est retrouvé en travers du canal. L’incident a rapidement suscité l’intérêt du grand public, qui a pu suivre les événements en direct ou s’en est amusé en créant des mèmes.
La pleine Lune, qui avait lieu ce dimanche 28 mars 2021 (à 20h48), a vraisemblablement joué un rôle dans le déblocage de la situation. Évidemment pas directement, mais par l’intermédiaire du phénomène de la marée. Il faut savoir que le canal de Suez n’a pas d’écluses : ainsi, il était envisageable qu’une marée venant de la mer Rouge (le navire s’étant échoué de ce côté) puisse se propager dans le canal.
L’amplitude des marées est liée à la position relative de la Terre, du Soleil et de la Lune. Ce sont les forces de gravitation de ces astres qui peuvent déclencher les mouvements des liquides, comme les océans. En raison des masses relatives de la Lune et du Soleil, ainsi que de leurs distances à la Terre, l’action exercée par la Lune est 2,17 fois plus forte que celle du Soleil.
Des marées de vives eaux à la pleine Lune
La force qui génère la marée peut varier en intensité : à la pleine Lune et à la nouvelle Lune, on a ce qu’on appelle des marées de vives eaux (« spring tides » en anglais, bien qu’il n’y ait rien à voir avec la saison du printemps). On parle de syzygie pour décrire lorsque le Soleil et la Lune sont en opposition (pleine Lune) ou conjonction (nouvelle Lune) par rapport à la Terre.
Comme l’explique l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), « pendant les pleines ou nouvelles Lune — qui se produisent lorsque la Terre, le Soleil ou la Lune sont presque alignés — l’amplitude moyenne des marées est légèrement plus grande ». Ces marées légèrement plus grandes se produisent donc deux fois par mois. À l’inverse, on observe des marées dites de mortes eaux, quand le Soleil et la Lune forment un angle de 90° par rapport à la Terre (période de quadrature) : ces marées ont une amplitude inférieure à la moyenne.
À cela s’ajoute probablement un autre élément : la Lune a atteint son périgée le 30 mars à 8h15. Il s’agit du point de son orbite où sa distance à la Terre est minimale (par opposition à l’apogée). La Lune suit une trajectoire elliptique autour de la Terre et atteint le périgée une fois tous les 28 jours environ. Ce 30 mars, elle s’est trouvé à une distance de 360 309 km, par rapport à la Terre. La NOAA souligne que pendant les périodes de périgées, il y a « une augmentation de l’amplitude moyenne des marées ». L’agence explique que 6 à 8 fois par an, la nouvelle Lune ou la pleine Lune peut coïncider (plus ou moins étroitement) avec le périgée, et que cela peut avoir une influence sur les marées.
Évidemment, il faut garder à l’esprit que les marées sont des phénomènes complexes, et que leur hauteur peut être influencée par de nombreux facteurs. La NOAA indique ainsi que les marées les plus hautes que l’on peut voir dans une année ne sont pas nécessairement des marées de vive eau qui surviennent pendant la période des périgées.
Des marées d’équinoxe plus importantes
D’autres phénomènes astronomiques, en plus de la pleine Lune/nouvelle Lune et du périgée, peuvent contribuer à faire varier l’amplitude des marées. On sait ainsi que le jour de l’équinoxe, l’attraction du Soleil s’exerce principalement sur l’équateur (l’axe de rotation de la Terre est incliné, pour rappel), ce qui explique pourquoi on peut observer des marées plus importantes à cette période. Et si la Lune se trouve également alignée avec le Soleil, les marées peuvent être encore plus importantes. Le vulgarisateur scientifique Jamy Gourmaud l’expliquait très bien dans l’émission C’est pas sorcier. D’ailleurs, nous ne sommes pas très loin de l’équinoxe de printemps, survenu le 20 mars dernier à 10h37.
Il n’est donc pas improbable que la pleine Lune, par le phénomène des marées, ait joué un rôle pour résoudre le problème du cargo échoué dans le canal de Suez. Selon le New York Times, le niveau d’eau dans le canal serait monté jusqu’à 46 centimètres (18 pouces) plus haut que d’habitude, et les courants de marée étaient au plus fort dimanche et lundi. Ceci a visiblement pu « aider à pousser le navire vers le haut », comme l’a mentionné Peter Berdowski, CEO de la société Boskalis mandaté pour extraire le navire du canal.
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