Le vaccin d’AstraZeneca est au cœur de l’attention depuis quelques semaines, une surmédiatisation qui n’aide pas à y voir clair. Il y a pourtant une notion clé à bien comprendre : la balance bénéfices/risques.
Des cas « très rares »
Mi-mars 2021, plusieurs pays européens ont successivement suspendu l’usage du vaccin d’AstraZeneca dans l’attente des résultats de l’enquête de l’Agence européenne des médicaments (EMA) au sujet de thromboses soupçonnées de lui être reliées. Le 18 mars 2021, l’usage du vaccin d’AstraZeneca reprend, car l’EMA conclut que celui-ci est « sûr et efficace ». Plus précisément, « ses avantages pour protéger les personnes de la maladie Covid-19, avec les risques associés de décès et d’hospitalisations, dépassent les risques possibles ».
Depuis lors, on a recensé de nouveaux cas de thromboses « atypiques » survenues peu après l’injection d’une première dose. En France, sur plus de 2 millions de personnes vaccinées avec AstraZeneca début avril 2021, on recense 29 cas de thromboses de ce type. En Allemagne, c’est 31 cas sur 2,7 millions. Au Royaume-Uni, une trentaine de cas sur 18 millions de doses injectées. Le lien exact entre ces thromboses et le vaccin d’AstraZeneca reste mal compris, mais il pourrait concerner essentiellement les moins de 60 ans et, davantage, les femmes.
Suite à ce constat d’un lien possible entre ces thromboses atypiques et le vaccin d’AstraZeneca, l’Agence européenne des médicaments a rappelé dans une conférence de presse, le 7 mars, que ces événements thromboemboliques sont « très rares » et que la balance bénéfices/risques reste favorable au vaccin, étant donné que la vaccination sauve des millions de vies. Cette balance est la raison pour laquelle le vaccin reste — et doit absolument rester — utilisé. Mais il est nécessaire de bien comprendre quel est le rôle médical de cette balance.
Balance bénéfices/risques favorable aux vaccins
Toute intervention médicale comporte à la fois un certain nombre de bénéfices possibles (des améliorations de symptômes, prévention d’une maladie…) et de risques potentiels. Ce niveau des risques peut être infime, faible, ou relativement élevé, en fonction de l’intervention. Notons aussi que l’attention médiatique portée aux vaccins contre le coronavirus peut biaiser notre perception de ces risques. La pilule contraceptive provoque, par exemple, des centaines d’événements thromboemboliques chaque année. Cet effet secondaire est bien plus récurrent que pour le vaccin mais il est bien moins médiatisé — il ne l’est d’ailleurs pas assez.
La balance bénéfices/risques est incluse au cœur de tout acte médical : si la balance est largement positive en matière de bénéfices, par rapport aux risques, alors l’intervention est jugée comme favorable. Toutes les autorisations de mise sur le marché (AMM), délivrées par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, reposent sur l’évaluation de cette balance — qui peut être réévaluée à plusieurs reprises selon les connaissances scientifiques. Pour un vaccin, la balance se pose à une échelle collective, celle de toute la population ; mais aussi à l’échelle individuelle, raison pour laquelle il peut y avoir des contre-indications à un vaccin, lesquelles sont évaluées par le médecin ou le soignant à partir du profil de santé.
Chaque vie compte. En cas d’épidémie, ici de pandémie, il s’agit de déterminer dans quelle cas la balance bénéfices/risques permet de sauver le plus grand nombre de vies. On compte 2,8 millions de décès dus au coronavirus dans le monde. Dans un pays comme la France, on compte 200 à 300 décès quotidiens en moyenne. Aux décès s’ajoutent les hospitalisations et les personnes en réanimation (5 729 personnes en réanimation en France au 7 avril), ainsi que l’épreuve des symptômes et le covid long.
C’est en ce sens que la balance bénéfices/risques est favorable au vaccin AstraZeneca. Il ne s’agit en aucun cas d’effacer les thromboses de l’équation. Mais ainsi fonctionne la balance : face aux risques très élevés posés par la pandémie, le vaccin d’AstraZeneca comporte essentiellement des bénéfices, celui de sauver des vies et d’éviter des formes graves, tout en ayant des risques très rares. Il a effectivement été administré par dizaines de millions dans le monde, et présente pour l’instant un excellent taux d’efficacité — une étude américaine récente avec 30 000 volontaires affichait une efficacité de 79 % contre les formes symptomatiques ainsi que de 100 % contre les hospitalisations et les formes graves.
La balance bénéfices-risques visuellement
Tout début 2021, des épidémiologistes du CRESS (Centre de Recherche en Épidémiologie et Statistiques ; adossé à l’Inserm) avaient proposé un simulateur en ligne de la balance bénéfices-risques pour les vaccins contre le coronavirus. Bien qu’elle soit en version bêta et ne repose que sur les données issues des essais cliniques fin 2020, elle permet surtout de « visualiser » à quoi ressemble cette balance sur une même population de 10 000 personnes. À gauche, sans vaccination, les cas positifs, les hospitalisations, les symptômes persistants et les décès sont plus nombreux qu’à droite, avec vaccination, où les effets secondaires sont certes présents mais proportionnellement moins importants au total.
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