La HAS recommande que les primovaccinés de moins de 55 ans avec AstraZeneca soient injectés avec une deuxième dose issue du vaccin de Pfizer ou de Moderna.

Fin mars 2021, la Haute Autorité de Santé (HAS) a décidé de limiter le vaccin d’AstraZeneca aux personnes de plus de 55 ans, puisque les effets secondaires graves, qui restent rares, ont prioritairement lieu chez cette population plus jeune. Restait alors en suspend la question des primovaccinés de moins de 55 ans : comment leur vaccination allait-elle se poursuivre ? L’autorité a finalement pris sa décision, ce 9 avril, en estimant que ces personnes primovaccinées de moins de 55 ans avec le vaccin AstraZeneca devraient recevoir celui de Pfizer ou de Moderna (à ARN messager) en deuxième dose.

Que sait-on sur l’efficacité et la sécurité d’un tel schéma, connu dans la communauté médicale sous le nom de vaccination « prime-boost hétérologue » ?

En Angleterre, une large étude est menée sur le mélange des vaccins Covid-19, afin d’évaluer l’efficacité de combiner une dose d’AstraZeneca et une dose de Pfizer, ou l’inverse. Les résultats de ces travaux de recherche, démarrés le 3 février, n’ont pas encore été publiés. Les données préliminaires sont prévues pour mai/juin. Il n’y a donc pas d’étude clinique complète sur le sujet.

Cela ne veut pas dire que les connaissances scientifiques sur le sujet sont manquantes, et l’on sait que ce mélange ne pose pas de problème particulier en matière de sécurité. Au contraire, des recherches menées à propos du coronavirus ou d’autres maladies suggèrent que la piste « prime-boost hétérologue » pourrait bouleverser positivement la vaccination.

Deux vaccins, une même cible antigénique

Si les vaccins d’AstraZeneca et ceux de Pfizer/Moderna ne reposent pas sur la même technique, ils ciblent tous deux la protéine Spike du coronavirus. À partir de l’exacte même cible antigénique, l’objectif est dans les deux cas d’apprendre au système immunitaire à reconnaitre cette protéine issue du coronavirus SARS-CoV-2, et donc à éviter l’infection lorsque le véritable pathogène se présente.

La façon de produire cette réaction est différente, mais la mécanique comme le résultat sont similaires, ce qui ne crée pas d’incompatibilité et ne rend pas la combinaison illogique.

La consigne générale des autorités sanitaires à ce sujet, par exemple le CDC aux États-Unis ou bien dans la politique du Royaume-Uni, est pour l’instant de privilégier deux doses d’un seul et même vaccin en l’absence de résultats finaux sur le sujet, mais, si jamais une deuxième injection s’avère impossible avec le même vaccin pour une raison ou une autre (stock, etc.), alors elle peut avoir lieu avec un autre vaccin ciblant la même protéine du coronavirus. Ce choix est considéré comme préférable à l’absence de deuxième dose. Une telle situation n’est donc pas totalement une surprise médicale.

D’ailleurs, l’option de combiner deux vaccins différents est possiblement une voie qui permettrait de créer un plus grand « boost » immunitaire, et il s’agit là d’une des raisons ayant poussé l’Angleterre à mener un essai clinique sur le sujet. Cette piste vaccinale est étudiée depuis quelques années pour vacciner contre Ebola ou pour le VIH. « Nous ne savons pas exactement pourquoi une approche mixte peut être plus efficace. Mais il est possible que la combinaison de deux vaccins différents — qui présentent la même cible antigénique, mais stimulent le système immunitaire de manière différente — puisse mieux concentrer l’attention de nos cellules immunitaires sur la bonne cible », explique la biologiste médicale Kylie Quinn.

Une étude mélangeant deux vaccins différents contre le coronavirus (vaccin vecteur viral à adénovirus et vaccin ARNm), mais menée uniquement sur des souris et aux données disponibles seulement en preprint, a conclu récemment que « les réponses en anticorps sont plus élevées dans les schémas de vaccination hétérologue à deux doses que dans les schémas à dose unique », car ce schéma induirait davantage d’anticorps neutralisants.

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