L’accident de Tchernobyl aura eu « un impact minimal sur la santé des générations suivantes », conclut une rassurante étude. Mais une autre étude montre aussi que les enfants qui ont été soumis aux radiations, en 1986, étaient particulièrement susceptibles de développer une tumeur.

Ce lundi 26 avril 2021, l’Ukraine commémore les 35 ans de l’accident de Tchernobyl — l’une des plus graves catastrophes nucléaires de l’histoire. Celle-ci a donné lieu à une « zone d’exclusion » d’une superficie de 2 200 km², en Ukraine, autour de la centrale. Les retombées radioactives ont rendu inhabitable cette zone, et pour bien longtemps à certains endroits où les éléments radioactifs n’atteindront leur « demi-vie » que dans 900 ans.

La radioactivité a eu des conséquences sur la santé des habitants qui étaient aux alentours de l’accident lorsqu’il s’est produit en 1986 : le rayonnement ionisant produit par un tel niveau de radioactivité s’avère cancérigène. Deux études publiées dans Science le 22 avril 2021 se penchent plus particulièrement sur les effets de la radioactivité chez les enfants. La première a étudié le développement de cancers chez les personnes présentes dans la zone en 1986 étant enfants. La seconde s’est centrée sur l’éventuelle transmission parents-enfants des détériorations génétiques causées par la radioactivité.

Le cas des cancers de la thyroïde

Un problème de santé majeur qui a pu être relié à Tchernobyl sont les cancers de la thyroïde chez les enfants, dont on a recensé 20 000 cas entre 1991 et 2015. Un rapport des Nations Unies publié en 2018 montrait qu’au moins un quart de ces cancers étaient très probablement reliés directement à l’exposition radioactive.

La zone d'exclusion de Tchernobyl est un périmètre de 30 kilomètres autour de la centrale nucléaire. // Source : Pixabay

La zone d'exclusion de Tchernobyl est un périmètre de 30 kilomètres autour de la centrale nucléaire.

Source : Pixabay

La nouvelle étude, parue ce mois d’avril 2021, s’est intéressée à 440 cas de cancers de la thyroïde ; une partie chez des personnes exposées aux radiations de Tchernobyl étant enfants, une partie de personnes non exposées, nées après l’accident. Pour ce faire, les auteurs ont notamment étudié l’épigénétique des patients : comment les gènes s’expriment et la façon dont certaines modifications de cette expression sont le résultat des radiations.

Les auteurs ont trouvé une différence significative entre les deux groupes, au niveau de l’endommagement génétique. Lorsque des doubles brins d’ADN se brisent, ils risquent de se recoller de façon inadéquate, ce qui peut se transformer en événement initiateur d’une tumeur. Dans le groupe exposé aux radiations de Tchernobyl à l’âge de l’enfance en 1986, les chercheurs ont identifié davantage de cassures des doubles brins d’ADN ; là où chez les personnes non exposées, la tumeur provient d’une seule mutation clé, qui est ponctuelle et localisée.

Les résultats de cette étude sont également utiles, plus largement, pour aider les scientifiques à repérer les cancers provenant de radiations, et les distinguer des autres tumeurs, tout en identifiant la dose de radioactivité qui génère cette distinction. « Un aspect passionnant de cette recherche était la possibilité de relier les caractéristiques génomiques de la tumeur à des informations sur la dose de radiation — le facteur de risque qui a potentiellement causé le cancer », expliquent les auteurs.

Les détériorations génétiques sont-elles transmises à la descendance ?

Le second papier de recherche publié le 22 avril dans Science étudie la question suivante : les détériorations génétiques causées par l’accident de Tchernobyl sont-elles transmises à la descendance, c’est-à-dire aux enfants des personnes exposées en 1986, y compris lorsque ces dernières n’ont pas été atteintes par un problème de santé ? Cela concerne par exemple des parents qui ont fait partie de l’équipe de nettoyage, qui vivaient dans habitations de la zone ou à proximité, ou qui ont consommé du lait issu de vaches nourries par des pâturages contaminés.

Pour cette étude, les scientifiques ont cherché à savoir si les enfants dont les parents ont été exposés à l’accident étaient nés avec davantage de mutations « de novo », c’est-à-dire des mutations qui ont lieu dans les gamètes d’un des parents. N’observant pas un taux anormal de mutations chez ces enfants, les chercheurs en déduisent que l’exposition à l’accident de Tchernobyl aura eu « un impact minimal sur la santé des générations suivantes ».

Selon les auteurs, la nouvelle est d’autant plus bonne que ces résultats apparaissent « très rassurants pour les personnes qui vivaient à Fukushima au moment de l’accident en 2011 », où les doses de radiation détectées étaient plus faibles qu’à Tchernobyl.

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