Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous sommes confrontés à un choix difficile ? C’est ce qu’essaye de savoir un algorithme construit par machine learning. Un programme qui a analysé 10 000 choix jusqu’à comprendre, mais aussi prévoir comment un humain réagirait.

Des psychologues aux traders, tout le monde cherche à savoir comment les humains vont réagir face à un choix risqué. Est-ce que vous préférez toucher 50 euros tout de suite, ou attendre pour avoir 50 % de chance d’obtenir 100 euros ? Et si on monte à 60 % ? Ou à 1 000 euros ? A partir de quand bascule-t-on d’un choix sûr à un autre plus incertain avec un bénéfice supérieur ? Des chercheurs en neuroscience, en psychologie et en informatique de l’Université de Princeton se sont alliés pour construire un programme qui prédit comment un humain réagirait face à ces dilemmes.

De nombreuses recherches existent déjà sur le sujet mais celle parue dans Science ce 10 juin 2021 est la plus grande jamais réalisée, puisque pas moins de 10 000 choix ont été intégrés dans un algorithme qui, à terme, arrive à imiter avec une précision jamais égalée la prise de choix d’un être humain. Une vraie révolution selon les auteurs : « Nous avons pu récapituler les théories historiques, établir que nous pouvons les améliorer, et trouver une meilleure représentation de la prise de décision de l’esprit humain

La machine face à l’humain irrationnel

Tout au long du XXè siècle, les théories de la décision se sont multipliées. L’idée générale est que l’individu, face à un choix, va sélectionner l’option qui maximise son bénéfice, son bien-être. Dans le cas où il y a une incertitude, l’évaluation se fait sur un calcul de probabilité connu de l’utilisateur lui-même. Mais derrière cette apparente solidité mathématique se cache tout un ensemble de variables plus ou moins identifiables liées aux émotions, à la mémoire ou à la perception. Bref, à l’irrationalité des humains. Tellement de possibilités qu’au cours des décennies, aucune théorie n’a vraiment pu se dégager pour faire consensus.

Pourtant la demande est grande, car au-delà de la sphère des psychologues, les économistes et même les politiques sont très friands de savoir ce qui peut faire basculer un individu d’un choix à un autre. Des basculements qui peuvent entraîner des conséquences très concrètes comme la chute d’un titre en bourse par exemple.

Jusque là, les modèles d’analyses faits directement par des humains étaient bien plus performants que ceux qui mettaient les machines aux commandes. Jusqu’à un certain point en tout cas, puisque les auteurs assurent que leur théorie fonctionne mieux quand il y a davantage de données traitées. Ils écrivent : « Cela peut impliquer le fait que la complexité des théories comportementales peut être contrainte par la limitation des données.» Autrement dit, les modèles deviennent plus fins et plus justes quand il y a davantage de cas à traiter, ce qui est mieux fait par un ordinateur que par un humain.

Le machine learning, un composant essentiel

Ici, ce sont des milliers d’humains qui ont donc « aidé » l’algorithme à apprendre la prise de décision. Un apprentissage qui lui permet aujourd’hui d’imiter au mieux un humain confronté à un choix risqué.

À terme, la machine décrit tout le cheminement neuronal produit dans un cerveau humain lors d’une prise de décision. Pour Sudeep Bhatia, un chercheur en psychologie qui a également écrit un article dans Science consacré à l’étude : « Ils ont montré le vrai pouvoir de cette approche (…) De futurs travaux vont sans aucun doute montrer des avancées dans de nombreux domaines grâce à cette méthode de machine learning.»

Le chercheur ajoute que le machine learning a de beaux jours devant lui dans ce type d’études : « Cela deviendra un composant essentiel dans la boîte à outils des scientifiques en revitalisant, (voire peut-être en révolutionnant), la recherche théorique sur le comportement humain.»

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