L’armée américaine aimerait utiliser des fusées réutilisables dans le cadre de ses missions. SpaceX, avec sa fusée Starship en cours de développement, pourrait répondre à ce besoin.

SpaceX sera-t-il bientôt un maillon de la logistique de l’armée américaine ? Une chose est sûre : le Pentagone s’intéresse de près aux fusées capables de transporter du fret n’importe où dans le monde en un temps record. Précisément, c’est vers les lanceurs réutilisables, une capacité que maîtrise déjà pleinement SpaceX avec la Falcon 9,  que regardent certains hauts gradés de la hiérarchie militaire.

Ce sujet attire tellement l’Air Force qu’il est d’ailleurs prévu un investissement d’un peu moins de 50 millions de dollars d’ici les prochains mois pour une « fusée cargo » qui serait totalement réutilisable (sous-entendu le premier étage et les étages supérieurs, a priori), pouvant atteindre n’importe quelle destination en l’espace d’une heure et avec la faculté d’acheminer jusqu’à 100 tonnes de charge utile.

En comparaison, l’US Air Force s’appuie sur trois avions de transport dont les capacités de transport vont de 20 tonnes (Lockheed C-130J Super Hercules) à plus de 100 tonnes (Lockheed C-5 Galaxy), en passant par un seuil intermédiaire d’un peu moins de 77 tonnes (McDonnell Douglas C-17 Globemaster III). Ces avions ont de fait un rayon d’action limité et une vitesse moindre, par rapport à une fusée.

tank char armée

Aujourd’hui, des tanks peuvent être transportés par avion. Demain, par fusée ? // Source : Roland Balik

La fusée Starship, candidate idéale ?

Vu l’usage militaire de cette fusée, on trouverait à bord du matériel pour soutenir les troupes comme des pièces de rechange, des armes, des munitions, des véhicules (y compris, pourquoi pas, des chars, le plus lourd en dotation ne dépassant pas les 70 tonnes), du ravitaillement en vivres, du carburant et de l’équipement selon les besoins de certaines spécialités (génie, transmissions, service de santé, etc.).

Le transport de troupes n’est par contre pas évoqué, même s’il peut être une suite logique. Il n’est toutefois pas du tout certain que cette piste s’avère viable, notamment parce que les soldats à bord ne pourraient sans doute pas être en tenue de combat, mais en combinaison d’astronaute. De fait, les fantassins risquent de ne pas être tout de suite opérationnels en arrivant sur zone.

Compte tenu des besoins exprimés par l’US Air Force, le Starship que SpaceX est en train de développer pourrait correspondre : il a la capacité de transporter plus de 100 tonnes en orbite terrestre basse et il a vocation à être réutilisable. De plus, ce véhicule existe, même si son développement n’est pas encore achevé. Enfin, c’est une entreprise américaine qui le développe et elle a déjà travaillé avec l’armée.

Évidemment, ce projet soulève des problématiques qu’il faudra résoudre au fur et à mesure : comment, par exemple, charger et décharger rapidement le contenu d’une « fusée cargo » de l’US Air Force ? L’engin pourra-t-il se poser sur des terrains sommaires ou faudra-t-il que la zone soit aménagée ? Quid aussi des éventuels dénis d’accès par une armée adverse, via par exemple une défense antiaérienne ?

Une alternative éventuelle pourrait être une fusée larguant depuis l’espace sa charge utile et celle-ci pourrait rejoindre sa zone d’atterrissage grâce à l’emploi de divers procédés (des parachutes, une propulsion pour ajuster la trajectoire, une analyse du terrain, un signal GPS, etc.). Cette approche existe déjà avec les avions de transport, qui peuvent larguer en vol du matériel, y compris des véhicules.

Une approche pas si récente

D’après la presse américaine, ce projet est encore à un stade préliminaire. L’armée discute avec divers prestataires potentiels. SpaceX apparait en tout cas un très sérieux candidat, si un appel d’offres est publié et les fonds pour financer ce projet sont débloqués. Cela serait une nouvelle prestation de l’entreprise pour le compte de la défense américaine, après les satellites de renseignement.

Il n’en demeure pas moins que cette approche n’est pas en tant telle très récente. Déjà en 2018, il a été évoqué la possibilité de mener des missions de transport ultrarapides grâce à une fusée qui décollerait des USA et le rejoindrait un théâtre d’opérations. Autre piste : pré-positionner des équipements en orbite autour de la Terre afin de gagner du temps si un conflit a lieu.

Une chose est sûre : SpaceX est disponible pour aider l’armée dans ses missions — c’est le cas aussi des autres entreprises du secteur spatial, comme Boeing, Lockheed Martin. En 2018, lors d’un symposium Air Space Cyber, la présidente et directrice opérationnelle de la société, Gwynne Shotwell, se disait prête à envisager de déployer des armes dans l’espace, pour le compte des États-Unis, si cela participe à la défense du pays.

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