Les particules de type « mésons D0 » sont un peu comme le chat de Schrödinger, qui est à la fois vivant et mort. Elles sont tout à la fois la particule et leur propre antiparticule. Il s’agit d’une superposition quantique : elles « oscillent » entre matière et antimatière, la particule devenant antiparticule, puis à nouveau particule. Dans leur composition, les mésons D0 sont faits de particules fondamentales appelées quarks. Elles contiennent un quark et un antiquark : la particule méson D est faite d’un quark « charm » et d’un antiquark « up », quand l’antiparticule méson D est faite d’un antiquark « charm » et d’un quark « up ».
Seules quatre particules connues du Modèle standard de la physique sont capables d’une oscillation entre particule et antiparticule ; et il n’y a de preuve par l’observation que pour une seule d’entre elles (le méson « Strange B »). Mais en juin 2021, des physiciens de la collaboration LHCb du CERN, au Grand Collisionneur de Hadrons, ont apporté la première preuve par la mesure de ce phénomène pour les mésons D0. Cette observation a d’ailleurs franchit le seuil statistique de « cinq sigmas », le niveau minimum en physique pour considérer que l’on vient de réaliser une véritable observation.
L’infime mais cruciale différence de masse
Lorsque les mésons D0 oscillent, cette superposition quantique génère deux particules de masse différente : un particule plus légère (D1) et une particule plus lourde (D2). Au CERN, les physiciens ont répertoriés toutes les fois où cette oscillation advient lors des collisions proton–proton générées dans le Grand Collisionneur de Hadrons. Ce faisant, ils ont finalement pu mesurer la différence de masse entre le méson D1 et le méson D2, c’est-à-dire la différence entre le méson le plus léger et le plus méson le plus lourd.
Les scientifiques ont abouti au calcul d’une différence de masse de 0,00000000000000000000000000000000000001 grammes, soit 10-38 grammes. Pour remettre en contexte ce tout petit chiffre, « c’est la même chose que la masse d’une boule de neige comparée à la masse de l’ensemble du Mont Blanc », explique le physicien Chris Parkes sur le site du CERN. Cette différence est la manifestation de la superposition quantique, et elle est même ce qui contrôle la vitesse de l’oscillation entre la particule de méson D0 vers une antiparticule de méson D0 (et inversement ensuite).
Cette simple mesure vient confirmer la prédiction et constitue « une étape importante dans l’étude du comportement oscillatoire des particules D0 ».
Cela ouvre tout un nouveau champ aux scientifiques. Ils peuvent maintenant se pencher sur l’oscillation elle-même à proprement parler, car reste à déterminer par exemple si le taux de transition particules/antiparticules est le même que le taux de transition antiparticules/particules. Par ailleurs, ces oscillations sont-elles influencées par des particules encore non prédites par le Modèle standard ?
Tous ces questionnements ont notamment pour but de résoudre l’un des plus grands mystères de l’histoire de la physique : l’assymétrie entre matière et antimatière. Au commencement, il aurait dû y avoir autant de matière que d’antimatière ; mais une asymétrie s’est produite en faveur de la matière, phénomène grâce auquel il existe tout ce qui existe.
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