« La plupart des régions de France ont vu leurs émissions [de gaz à effet de serre] diminuer sur la période 2015-2018, parfois de manière significative (Île-de-France, Centre-Val de Loire, Auvergne-Rhône-Alpes) », note le rapport annuel 2021 du Haut conseil pour le climat, publié le 30 juin. Ce document prend acte que des progrès ont bel et bien été réalisés ces dernières années, notamment dans les secteurs du bâtiment, de l’industrie, de l’énergie et de l’agriculture. Les transports, quant à eux, sont en stagnation et restent le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France, avec 31 % des émissions totales (plus de la moitié de ce pourcentage provient de la voiture individuelle, le trafic routier étant particulièrement polluant).
Malgré des constats encourageants en bien des aspects, la conclusion du rapport est sans appel : les politiques publiques françaises de réduction des émissions sont « globalement trop peu alignées » avec les orientations de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), ce qui ne permet pas de garantir d’atteindre les objectifs bas carbone à l’horizon 2030.
La réduction annuelle des émissions doit doubler
Les objectifs sont effectivement ambitieux. Dans le fameux SNBC, la France vise une réduction de ses émissions de -40 % (par rapport à 1990) d’ici l’année 2030 ; et une neutralité carbone pour 2050. Cet objectif national s’ajoute désormais, depuis avril 2021, à l’objectif européen beaucoup plus élevé à court terme d’une réduction nette de -55 %.
Le Haut conseil pour le climat estime que les efforts actuels ne suffiront clairement pas pour être à la hauteur des ambitions, notamment car la France a déjà « accumulé du retard ». En chiffre, l’instance consultative estime que les budgets carbone doivent être remaniés : la réduction annuelle doit « pratiquement doubler », pour atteindre au moins 3,0 % dès 2021, puis 3,3 % de baisse annuelle, en moyenne, sur la période du troisième budget carbone (2024-2028).
Cinq recommandations
L’instance consultative a dressé cinq recommandations générales :
- Clarifier des politiques publiques « encore peu lisibles ». Le Haut conseil pour le climat estime que les mesures et calendriers actuellement en place ne fixent pas des perspectives claires et stables ; et que les objectifs contraignants temporels doivent voir leur date rapprochée. L’instance suggère de fixer la date d’arrêt de vente des véhicules thermiques à 2030, comme au Royaume-Uni, et d’annoncer pareillement une date pour l’arrêt des énergies fossiles pour le chauffage des bâtiments. Les exemptions de taxes sur le fioul devraient quant à elles être levées dès maintenant. L’idée est de construire un véritable calendrier de décarbonisation.
- Finaliser « sans attendre » les documents stratégiques et « les faire converger progressivement vers les objectifs nationaux » : il s’agit là d’harmoniser l’ensemble des ministères et du territoire avec les objectifs de décarbonisation fixés à l’échelle de la France.
- Pérenniser les aides et investissements au sein des plans de relance « qui contribuent aux changements structurels bas-carbone » : l’instance estime que les investissements dans la rénovation des bâtiments, le développement des transports en commun, le développement de l’hydrogène décarboné, etc., sont « indispensables », car il s’agit aussi de « créer de nouvelles filières et de nouveaux emplois ».
- Améliorer l’évaluation et le suivi des politiques publiques, comme les études d’impact, des processus « insuffisants » à l’heure actuelle.
- Intégrer « systématiquement » l’adaptation au changement climatique dans les politiques publiques aux échelons nationaux et territoriaux. Il s’agit là encore de clarifier des objectifs, sur des secteurs prioritaires (agriculture, tourisme, eau…), avec un calendrier défini et des indicateurs de progressions.
Adaptation et atténuation
On comprend à la lecture du rapport que, dans l’ensemble, l’instance estime que la stratégie française de décarbonisation reste bien trop floue. Cela concerne d’abord les mécaniques d’adaptation : « L’adaptation au changement climatique ne peut plus se réduire à des réponses ponctuelles et réactives mais doit devenir transformationnelle et proactive, pour anticiper sur la poursuite des conséquences du changement climatique qui sort des plages de variabilité naturelle et dont les effets sont déjà visibles », explique le Haut conseil pour le climat.
Toutefois, l’instance rappelle qu’il est inenvisageable, pour atteindre les objectifs, de se contenter de l’adaptation. L’atténuation est une stratégie incontournable. « Il n’est pas possible de continuer à émettre des gaz à effet de serre en pensant qu’il sera possible de s’adapter à n’importe quel niveau de changement climatique », alerte l’instance.
Ces deux volets, adaptation et atténuation, doivent fonctionner en synergie et, dans sur ces deux aspects, les politiques publiques doivent « se projeter à différentes échelles
temporelles et spatiales », en fixant un calendrier clair et défini ainsi qu’en mobilisant tous les échelons territoriaux.
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