La panne de l’ordinateur de bord du télescope spatial Hubble oblige actuellement la Nasa à suspendre ses observations. Le célèbre observatoire a une particularité : il est le seul télescope à permettre actuellement d’observer dans l’ultraviolet.

En 31 ans passés dans l’espace, le télescope Hubble rencontre un problème inédit. Cette fois-ci, la panne concerne son ordinateur de bord, chargé de contrôler les instruments. Depuis le 13 juin 2021, les observations scientifiques sont suspendues. La Nasa était encore en train de faire ses diagnostics et de préparer des opérations de mise en route de l’ordinateur de secours, à la date du 30 juin.

Cette panne suscite inévitablement des inquiétudes dans la communauté des astronomes. À chaque souci de fonctionnement, ces scientifiques redoutent la perte de l’observatoire mythique, dont la longévité est déjà impressionnante. Une catégorie d’astronomes doit particulièrement surveiller l’évolution de la situation : celles et ceux qui ont besoin d’observer dans le domaine de l’ultraviolet (UV). « Une particularité de Hubble est d’être le seul télescope qui permet de faire des observations dans l’ultraviolet, explique à Numerama Élodie Choquet, astronome au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille. Pour cela, il faut être dans l’espace, et il n’y a pas d’autre télescope ou d’autres missions qui font cela. Toute une partie de notre communauté, qui dépend des observations en ultraviolet, utilise beaucoup Hubble, car cela ne peut pas être fait depuis le sol. »

L’atmosphère terrestre est opaque aux UV

Pour observer au-delà du violet, il faut nécessairement aller à plus de 35 kilomètres d’altitude. La faute à l’atmosphère terrestre, nous indique la spécialiste : « Notre atmosphère est opaque aux UV. La couche d’ozone, qui nous protège des rayons UV du Soleil, nous empêche par contre d’observer le reste de l’Univers dans l’ultraviolet avec les télescopes sur Terre. » C’est pourquoi il faut envoyer ce type de télescopes au-dessus de l’atmosphère terrestre, afin de réaliser de telles observations.

La pouponnière d'étoiles N159 vue par Hubble. // Source : Flickr/CC/ESA/Hubble & NASA (photo recadrée)

La pouponnière d'étoiles N159 vue par Hubble.

Source : Flickr/CC/ESA/Hubble & NASA (photo recadrée)

Un autre télescope est bien en préparation du côté de la Nasa (avec une participation des agences spatiales européenne et canadienne), le JWST, pour James Webb Space Telescope. Il doit être lancé dans l’espace à la fin de l’année 2021, et est particulièrement attendu des astronomes. Cependant, il ne pourrait pas prendre la relève de Hubble, si celui-ci venait à cesser de fonctionner, dans le domaine de l’ultraviolet. « Le gros télescope suivant, le JWST, n’est pas prévu pour fonctionner dans l’ultraviolet. Il est optimisé pour l’infrarouge, et observe un peu dans le visible, mais absolument pas dans l’ultraviolet. Quand ça sera fini pour Hubble, ça en sera aussi fini pour cette partie-là de la science qu’il permet de faire », détaille la spécialiste.

« On espère tous que la Nasa sélectionne un grand projet »

D’autres projets pour pouvoir continuer à observer dans l’ultraviolet par d’autres moyens existent. Plusieurs missions ballon ont déjà eu lieu, dès 2007 et 2009. Ces missions « consistent à envoyer un petit télescope en haut de l’atmosphère terrestre, pour faire des observations. Néanmoins, cela restera très petit comparé à Hubble, l’envergure de la science que l’on pourra faire n’est pas la même », fait remarquer Élodie Choquet.

Des suggestions sont faites auprès de la Nasa pour concevoir un futur télescope, qui observerait dans le visible et dans l’ultraviolet, comme Hubble. « On parle plutôt de télescopes qui seraient là dans les années 2035 », précise Élodie Choquet. Pour l’instant, l’agence spatiale américaine n’a pas indiqué si elle souhaitait ou non concrétiser un projet de ce genre.

Beaucoup d’astronomes souhaitent que la réponse soit positive. « On espère tous qu’ils sélectionnent un grand projet ambitieux avec un grand télescope, de l’ordre d’une dizaine de mètres de diamètre, qui soit capable de couvrir les longueurs d’onde entre l’UV et l’infrarouge. Cela couvrirait la science que fait Hubble, avec un diamètre de télescope plus grand, avec une meilleure résolution sur nos images et une sensibilité encore plus importante », espère Élodie Choquet.

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