Inscrire la protection de l’environnement dans la Constitution est une bonne idée. Mais cela a déjà été fait. Reste maintenant à faire appliquer les textes existants.

La déception était visible dans les rangs de la majorité ce mardi 6 juillet 2021. Le Sénat a refusé de voter la version du texte, proposé par l’Assemblée nationale, pour inscrire la protection du climat dans la Constitution. « Depuis huit mois, les sénateurs s’opposent de façon brutale à cette inscription dans la Constitution et à la possibilité des Français de trancher cette question par référendum », a déploré le député LREM et rapporteur du projet de loi, Pieyre-Alexandre Anglade, note Les Échos.

Ce désaccord contraint le gouvernement à stopper son processus de révision constitutionnelle. « C’est profondément regrettable », a conclu le Premier ministre qui a dénoncé ceux qui « refusent de voir la réalité en face » au sujet de la crise climatique et « privilégient une approche idéologique ». Ces déclarations choc oublient de donner une précision cruciale : la préservation de l’environnement est, en réalité, déjà inscrite dans la Constitution française depuis plus de quinze ans.

Les Pyrénées, en France // Source : Julie Girard / Unsplash

Les Pyrénées, en France

Source : Julie Girard / Unsplash

La protection de l’environnement est déjà dans la Constitution

La Charte de l’environnement a en effet été inscrite, en 2005, dans le bloc de constitutionnalité du droit français. Elle a donc autant de poids que la Constitution de 1958 ou la Déclaration des droits de l’homme. « Et son texte pose noir sur blanc ce devoir de préserver l’environnement », souligne l’avocat spécialisé en droit public et droit de l’environnement, Arnaud Gossement, contacté par Numerama. Il est ainsi possible d’invoquer la charte de l’Environnement auprès des administrations et des parlementaires, s’ils élaborent des textes de droit (loi, règlement, etc.) qui entrent en conflit avec cet objectif.

« Et si les alerter ne suffit pas, il est possible d’invoquer la Charte de l’Environnement devant un juge », précise Me Gossement. On peut ainsi demander au Conseil constitutionnel ou au Conseil d’État d’invalider des lois non conformes à cette charte. « La charte de l’Environnement existante est extrêmement bien rédigée », précise Arnaud Gossement. Si le projet du gouvernement qui vient d’être retoqué fixait globalement un objectif de protection de l’environnement similaire à celui de la Charte, il ne le détaillait par exemple pas aussi précisément qu’elle. « Dans le texte qui a été refusé, c’est à la France qu’était posé un devoir de protection, or la France n’est pas un sujet de droit, vous ne pouvez pas lui passer les menottes. Cela suggère que ce projet avait une portée plus symbolique qu’autre chose. La charte de l’Environnement qui existe déjà pose, en revanche, ce devoir à ‘toutes personnes’, ce qui est bien plus précis : cela englobe les personnes physiques et morales, et le droit peut en effet s’appliquer à elles », explique Me Gossement.

Préserver l’environnement ne suffit plus

La charte de l’Environnement pose par ailleurs des contraintes plus fortes que celles que le projet porté par le gouvernement contenait. Elle ne se contente ainsi pas de fixer un devoir de préservation de l’environnement, mais également un devoir d’amélioration. « C’est important car dans certaines zones, où l’environnement est très dégradé, la préservation seule n’est pas suffisante, il faut améliorer la situation », souligne l’avocat spécialisé en droit de l’environnement et droit public. La Charte de l’Environnement constitue en somme déjà un outil juridique puissant en faveur de l’écologie. Et ce qui manque n’est pas tant un texte supplémentaire, que l’application de ce texte qui existe déjà.

Cela nécessite bien sûr de mieux informer sur ce que la loi permet ou interdit. Mais cela requiert surtout que les moyens alloués par l’État, au contrôle du bon respect des textes de loi, soient accrus. Il ne suffit pas d’interdire aux entreprises de polluer ou d’émettre du CO2 : il faut s’assurer qu’elles respectent bien leurs obligations, en envoyant régulièrement des inspecteurs chargés de contrôler ces points. Le gouvernement rechigne hélas à investir franchement dans l’environnement. Pour preuve, en pleine crise climatique, France Info révèle que les effectifs du ministère de la Transition écologique — déjà régulièrement réduits — risquent de l’être encore davantage.

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