Vous vous êtes peut-être perdus virtuellement dans les catacombes de Paris grâce aux prouesses de la technologie LiDAR qui permet de scanner son environnement en 3D. Bientôt, vous pourrez explorer tout le territoire français de la même manière grâce au travail de l’IGN.
L’entreprise d’État vient de lancer son programme LiDAR HD qui a pour ambition d’offrir « une cartographie 3D très précise » de la totalité du territoire français (excepté la Guyane) d’ici à 2025. Une mission qui permettra d’éclairer les politiques publiques et qui pourra aussi servir « comme moteur de développement des PME ou comme vivier pour la recherche scientifique » d’après l’institut.
Concrètement, plusieurs avions dotés de scanner laser vont quadriller la France en scannant le relief des campagnes, des villes et des routes françaises. L’opération est prévue pour durer 5 ans, nécessitera 7 000 heures de vol au-dessus du pays, générera 3 pétaoctets de données (3 millions de gigas) et coûtera 60 millions d’euros. De quoi donner une idée de l’ampleur du projet.
Un outil pour lutter contre le dérèglement climatique
« Le programme Lidar HD va décupler la connaissance du territoire nécessaire au déploiement des politiques publiques », pointe l’IGN pour justifier cet investissement. Loïc Gondol, chef du projet, revient sur la genèse du projet auprès de Numerama : « On savait depuis longtemps que le LiDAR pouvait être utile à beaucoup de politiques publiques. L’IGN l’utilise ponctuellement depuis une dizaine d’années le long de certains cours d’eau et sur les zones littorales pour mesurer les risques d’inondations ». En établissant un profil topographique hyper précis de certaines zones et en le croisant avec des données météorologiques, il devient possible de mieux réagir face aux risques climatiques.
Mais cela ne concerne pas que la montée des eaux. « Avec le LiDAR on peut aussi visualiser les risques d’éboulements, de ruissellements ou d’avalanche », liste Loïc Gondol. Après le passage de la tempête Alex fin 2020, l’IGN a fait des relevés dans les territoires touchés pour permettre aux ingénieurs en génie civil de mieux examiner la zone. « Un relevé à 10 points par m2 [densité retenue pour la mission, ndlr] permet aussi d’avoir une évaluation de la biomasse forestière », complète le responsable.
Le LiDAR peut aussi être utile pour lutter contre le dérèglement climatique : « En zone urbaine, ça permet de mieux modéliser les toitures des bâtiments pour installer des panneaux photovoltaïques », illustre Loïc Gondol qui imagine la création d’un « cadastre solaire » pour mieux exploiter le potentiel des énergies renouvelables.
1 million d’euros pour un capteur LiDAR
Au-delà de ces problématiques climatiques, une représentation 3D du territoire peut aussi aider au développement de l’agriculture grâce à une connaissance plus fine des terrains. Mieux modéliser les immeubles et maisons pourrait aussi permettre de mieux connaitre la surface habitable et d’ainsi mener des politiques d’urbanisation plus efficace. « On ne connait pas tous les usages qui seront réalisés avec ces données-là », admet Nicolas Lambert, chef du service des partenariats et des relations institutionnelles chez IGN. « C’est une bonne nouvelle, ça veut dire que certains vont être découverts. On pourra susciter de l’intérêt et apporter de nouveaux financements », se réjouit le responsable.
Mais avant de penser usage, carte en 3D et lutte contre le réchauffement climatique, il faut déjà réussir à récolter et traiter correctement ces données. Une carte interactive montre l’état de l’avancement du projet et il est assez clair que la mission va encore prendre quelques années. « Faire ce programme en 5 ans, c’est extrêmement ambitieux », explique Nicolas Lambert, qui ajoute que l’IGN travaille avec des sous-traitants issus du privé.
Le résultat d’un scan LiDAR est un « nuage de points » sur lequel on peut ensuite appliquer des textures issues de photographie aérienne pour représenter un bâtiment en 3D. Mais les outils capables de faire ça coûtent cher. « Un capteur LiDAR coûte autour de 1 million d’euros. Ce n’est pas le même outil qui équipe l’iPhone 12 Pro », plaisante le responsable. « C’est un peu la même différence qu’entre une GoPro les appareils photo qu’on utilise pour la photographie aérienne.»
Ouvrir les données à tous, même Google
Une fois l’acquisition faite, il faudra encore traiter ces données. Et sans surprise, pour trier, classer et ranger ces nuages de points, l’IGN va faire appel à des intelligences artificielles capables de traiter de grands volumes de données et d’en dériver des modèles exploitables. « L’IA peut avoir un vrai plus dans l’amélioration des performances de traitement automatique », explique Loïc Gondol.
Ensuite, ces données pourront être intégrées dans différents projets publics comme GéoPortail, le service de cartographie de l’IGN, mais aussi exploitées par tout un chacun. Les différents jeux de données seront ouverts et libres d’accès pour encourager les PME, les startups et les acteurs du privé à s’en emparer afin de faire naitre de nouveaux usages. « Encourager les usages, ça commence par la mise à disposition de ces données », résume Nicolas Lambert.
Interrogé sur la possibilité qu’un Béhémoth comme Google puisse exploiter ces données issues de l’investissent public, Nicolas Lambert fait un pas de côté : « On ne sait pas si Google va s’en servir, en tout cas c’est aux porteurs français de la politique sur l’open-data d’accompagner les PME et startups françaises sur le développement des services », conclut le responsable.
Infographie : comment ça fonctionne, un relevé LiDAR ?
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